Contre le cancer, l’union fait la force Traitements
Thérapies ciblées, immunothérapies… c’est en combinant ces molécules que l’on pourra espérer venir à bout du cancer, selon le Pr Guigay, directeur du Centre Antoine-Lacassagne
Depuis dix ans, on a accompli des progrès incontestables dans la lutte contre le cancer, aussi bien dans le champ de la chirurgie que de celui de la radiothérapie ou encore des traitements médicamenteux ; souvent, la prise en charge des patients atteints de cancer associe ces trois piliers. » Le Pr Joël Guigay, oncologue et directeur du Centre de lutte contre le cancer de Nice est résolument optimiste. À elles seules, la chirurgie et la radiothérapie parviennent aujourd’hui à guérir environ 60 % des cancers. Les traitements médicaux, qui complètent l’arsenal, font eux aussi leur révolution, au bénéfice de la qualité de vie des patients. «Ils sont beaucoup moins toxiques que les anciennes chimiothérapies, précise le Pr Guigay. Ces dernières étaient souvent émétisantes [responsables de nausées et/ou des vomissements, ndlr], difficiles à supporter, elles nécessitaient plusieurs jours d’hospitalisation, ce qui accroissait le risque infectieux. » Des doses réduites, des traitements hebdomadaires plutôt que quotidiens, de nouvelles molécules mieux tolérées… permettent désormais que la plupart des prises en charge se déroulent en ambulatoire.
Pas un, mais des cancers
« On a par ailleurs, pour plusieurs cancers, bénéficié du développement de thérapies dites ciblées (par opposition aux chimiothérapies), délivrées il devra être prouvé en réalisant soit par voie intraveineuse systématiquement une (pour les anticorps analyse moléculaire des tumeurs. comme le trastuzumab ou le » cetuximab), soit pour la plupart Autre révolution en marche : par voie orale (pour les l’immunothérapie. Son principe inhibiteurs de tyrosine kinase), : s’appuyer sur les défenses beaucoup moins toxiques naturelles pour détruire au niveau hématologique, les cellules cancéreuses. et mieux tolérées. » « Il n’y a pas un jour sans L’apparition de ces médicaments que des patients nous demandent «personnalisés s’ils ne peuvent pas » a accompagné la en bénéficier ». Beaucoup
« Beaucoup fin d’un dogme. « Il n’y d’espoirs se nourrissent
moins toxiques a pas UN mais DES en effet de ses cancers. Cela a été vérifié promesses que les médias
mieux tolérées. » pour le poumon, ont largement relayées. le sein, le cancer colorectal Sans tempérer et aujourd’hui, cela devient de la tumeur à un les enthousiasmes, le Pr Guigay de plus en plus une stade avancé. « Une question appelle à la prudence. règle générale. » est en suspens : pourquoi ne « Si ces traitements innovants Les tumeurs se distingueraient pas utiliser ces molécules aux ont apporté la preuve de leur par la présence d’anomalies stades précoces ? Personnellement efficacité dans certaines tumeurs spécifiques, à la genèse je crois en l’intérêt curatif (du poumon et de la même de leur développement. de cette approche, mais peau en particulier…), ils «Grâce à la généralisation de la caractérisation des tumeurs, on s’oriente de plus en plus vers un traitement “à la carte” pour chaque patient et chaque tumeur. » Il reste que, pour l’heure, ces thérapies ciblées sont essentiellement utilisées en cas de rechute, ou de découverte n’agissent pas sur tous les cancers. Et pour un même type de tumeur, les résultats peuvent être spectaculaires chez certains patients, inexistants chez d’autres, voire les mettre en danger. Pour progresser, il faut que l’on comprenne pourquoi. »
Vers la fin de la chimiothérapie ?
Ces avancées annoncentelles la fin de la chimio, dont les effets secondaires tant redoutés, sont justement liés à son défaut de précision? Selon le Pr Guigay, il s’agit là d’une vraie question, mais la réponse doit être nuancée. « Cela fait longtemps qu’on l’espère. La chimiothérapie s’attaque en effet à toutes les cellules en division, saines ou cancéreuses,
d’où toutes les complications. Mais la chimiothérapie continue de sauver des malades ; le meilleur exemple est celui du cancer des testicules, pour lequel on ne dispose pas de thérapies ciblées, mais qui parvient à être guéri dans la grande majorité des cas grâce à la chimiothérapie. » Selon le spécialiste, l’avenir thérapeutique du cancer repose sur les traitements combinés. « Les associations « immunothérapie thérapie ciblée, ou chimiothérapie, sont aujourd’hui testées sur de nombreux organes, avec une amélioration nette de l’efficacité. » Une manière d’encercler un ennemi, aux identités si multiples.