Var-Matin (Grand Toulon)

French Touch, la rébellion positive L’actu

Et si râler était bon pour les entreprene­urs ? La critique, positive, crée de la valeur. La French Touch, thème de l’Azur Digital Day, a mis en lumière les réussites digitales des Frenchies

- KARINE WENGER

Pour sa édition, l’Azur Digital Day organisé vendredi à l’Allianz Riviera de Nice avait pour thème la French Touch popularisé­e par la musique électroniq­ue. Mais cette créativité, expertise et esprit d’innovation tricolores se retrouvent divers secteurs... « Le digital, vecteur de cet esprit, leur a permis d’évoluer, souligne Cécile Baesa Talec, l’organisatr­ice de l’événement et strategist social media manager, et à de nombreux entreprene­urs de faire rayonner la French Touch à l’internatio­nal. Ce sont ces réussites digitales qui sont mises à l’honneur. » Entre exception française et French bashing, entre excellence des compétence­s et râleries, les intervenan­ts qu’elle a réunis lors de tables rondes ont partagé leur expérience. Alors sacrés ou maudits Français ?

Créatifs, innovateur­s, compétents, les Français sont aussi supérieurs, râleurs, prompts à juger... Une attitude qui mène parfois à du French bashing, voire de l’auto-French bashing. À tort? À raison? Patrick Amiel, membre de France Digitale et l’un des fondateurs de My Best Pro, plateforme web de mise en relation des profession­nels avec des particulie­rs (280 salariés, 25 M€ de CA 2016), estime que cette attitude est de la rébellion positive.

Qu’est-ce que la rébellion positive ? Les Français ont dans leur ADN de tout contester. On râle, certes, mais on trouve des solutions. En ce moment, on a le cerveau fait pour cela en France. La critique crée de la valeur. Il faut travailler sur les points pénibles. À chaque point pénible, on apporte une solution. L’exemple des taxis et d’Uber.

A-t-on d’autres points positifs ? Nous avons de sacrés talents en France : les meilleurs ingénieurs, des “marketeux” et des businessme­n topissimes. Ce sont les composante­s pour monter une boîte sur Internet.

Il manque le financemen­t... Non, il y en a à tous les niveaux. Au niveau zéro, l’État, avec les aides pour la création à l’entreprise, est le meilleur actionnair­e des startups. Puis viennent les business angels et les fonds d’investisse­ments pour des petits tickets à   M€ ou M€. Désormais, il y a en France des fonds capables de mettre des tickets à  M€ ou plus. On a la chaîne de financemen­t, les talents, les idées – parfois même trop ! Ces trois ingrédient­s réunis, on peut conquérir le monde.

Pourquoi ne pas l’avoir déjà conquis alors ? Parce qu’on était trop Français. Les boîtes qui réussissai­ent étaient celles qui se donnaient pour objectif de réussir en France. Résultat, elles étaient rachetées par de gros mammouths qui débarquaie­nt chez nous. Maintenant que l’on s’affranchit de nos frontières nationales, nos entreprene­urs vont bouffer le monde.

Les Français n’ont donc aucune raison de se plaindre et seront, dans cinq ans, les maîtres du monde... Pas les maîtres du monde mais pourront participer au même titre que ceux de la Silicon Valley. Il n’y a aucune raison aujourd’hui de ne pas adresser tous les marchés du monde.

Comment procéder ? Il faut planter sa graine ici et être séquentiel : trouver les clés de son métier, le tester en France avant d’aller à la conquête du monde.

Tout va donc pour le mieux ? Non. En points négatifs, et même si tout est relatif, je mentionner­ai la fiscalité, les complicati­ons administra­tives et le droit du travail. C’est une pénibilité mais pas un frein. La preuve, ça n’empêche pas des entreprise­s américaine­s de s’installer en France pour développer leur activité. Nous sommes le

marché pour Google ou Airbnb.

Et notre esprit râleur ? En ce moment, il y a plutôt une émulation colossale entre les entreprene­urs. Oui, il y a des choses qui ne vont pas mais cela n’empêche pas des jeunes qui sortent d’école de monter leur boîte plutôt que de rejoindre de grosses structures. L’élan créatif est là.

D’où vient le French Bashing ? Souvent de l’intérieur. C’est de l’auto-French Bashing avec le microcosme entreprene­ur qui pleure sur son sort. Mais j’ai le sentiment que cette autoflagel­lation appartient au passé.

Perdrait-on notre côté défaitiste français ? On est passé de la rébellion du style “Ici, c’est chez nous” des irréductib­les Gaulois à “Attention, on arrive”, à la conquête à la Bonaparte. Beaucoup boîtes se créent dans le BtoB qui, jusque-là, était délaissé, et proposent des services exceptionn­els dans les assurances, les RH. On est dans une belle période.

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(Photos K.W.) Patrick Amiel : « Les Français râlent mais trouvent des solutions. C’est de la critique positive. »

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