Machine arrière
Bouygues, qui construit l’écoquartier de luxe de Monaco, a décidé d’amputer une partie du contrat signé avec la carrière du Revest suite à l’inquiétude suscitée par la traversée de nombreux camions en zone urbaine.
La carrière du Revest vient de perdre une partie de son marché dans le cadre de la construction d’un écoquartier de luxe à Monaco à l’horizon 2025. Hier soir, Bouygues Travaux Public, a annoncé sa décision de retirer du marché de l’aire toulonnaise une des deux phases dites « intensives » de ce chantier titanesque.
Que supprime-t-on ?
La phase qui prévoyait la livraison par camion d’1,2 million de tonnes de cailloux sur les 2 millions prévus dans le cadre de ce marché. Cette première étape devait débuter à partir de juillet 2017 et s’étaler jusqu’au mois de février 2018 à la zone industrialo-portuaire de Brégaillon. Ces matériaux, une fois traités, devaient être acheminés par navire à raison de trois trajets par semaine jusqu’à Monaco. Objectif : lesdits matériaux devaient combler le remblai d’assise des caissons dans le cadre de la réalisation de la plateforme maritime.
Pourquoi ce retrait?
« Il est clair qu’il y a une préoccupation persistante, qu’on peut comprendre sur la problématique des transports depuis la carrière. Cela représente 17 km entre Le Revest et le site de chargement au port de Brégaillon », explique Christophe Hirsinger, directeur du projet d’extension en mer chez Bouygues Travaux Public. On a beaucoup discuté avec les élus qui ont relayé cette préoccupation de cette cadence de transports en camions (270 camions par jour, soit 500 passages). Ce que je peux comprendre. » Bouygues avoue «avoir étudié à fond le sujet », y compris avoir examiné «la demande de Mme Hummel pour savoir s’il était possible de modifier le planning. » Mais cette option n’a pas été retenue.
Eviter les cadences les plus fortes
« Notre volonté est que cette opération soit du gagnant-gagnant », martèle Bouygues, soucieux de travailler sur le territoire de l’aire toulonnaise. Depuis des mois, dans le cadre de la concertation publique débutée depuis avril 2016, la problématique de l’acheminement des matériaux par camion et du choix des itinéraires cristallisaient les tensions, notamment avec les riverains et les élus. Une «inquiétude que nous avons entendue », insiste le représentant du groupe Bouygues, « fortement impliqué dans la phase de concertation ».« On voit bien que nous sommes dans une zone urbanisée. Les gens y sont bien-sûr sensibles. Nous nous sommes rendu compte que les nuisances étaient plus importantes sur cette durée de la première phase. Il nous est apparu plus raisonnable qu’on se cantonne à une phase qui puisse s’intégrer au mieux dans le tissu local. »
Quelles conséquences?
Aucun des 270 camions prévus par jour, ne viendra troubler le paysage de l’aire toulonnaise, et le navire de 200 mètres de long de Jan De Nul, maison mère d’Envisan qui assure toujours le dragage et le transport maritime de Brégaillon à Monaco, dans le cadre de ce marché, ne viendra pas dans la rade... Cette première phase va se dérouler ailleurs. Où ? Vers l’Italie ? « On a différentes sources de carriers avec lesquels nous sommes en discussion », répond Christophe Hirsinger. Quant à la société Someca, cette modification du contrat, signé avec Bouygues , au mois de juillet 2016, ne sera pas sans répercussions économiques. Début novembre 2016, son directeur, Frédéric Soulié, avait chiffré à 5 millions d’euros l’investissement consenti pour extraire et acheminer les matériaux, tablant en contrepartie sur un chiffre d’affaires de 30 millions d’euros sur trois ans. Une décision difficile à prendre, à quelques mois du démarrage du chantier ? «Oui, mais nous avons pris cette décision qui était pour nous la meilleure pour le projet et le territoire », répond Christophe Hirsinger. L’inquiétude des riverains et les discussions politiques ont-elles eu une influence ? « Ce ne sont pas les élus qui nous font renoncer. C’est un travail collectif pour arriver à trouver la meilleure solution pour que tout le monde puisse réaliser l’opération », insiste le représentant du groupe.
Bouygues maintient la seconde étape
Pour autant, Bouygues Travaux Publics ne renonce ni à travailler sur le territoire ni avec Someca. Il revoit, ainsi, son système d’approvisionnement de matériaux pour d’autres formes de remblais techniques et de ballastage des caissons. « Nous nous sommes focalisés sur l’approvisionnement de matériaux qui avait moins de cadences puisque plus étalé dans le temps », explique Christophe Hirsinger.
tonnes de matériaux extraits et acheminés
« La seconde phase démarrera vers avril 2018. Elle est assez étalée sur un an et demi, jusqu’à octobre 2019. Nous sommes sur des quantités de matériaux plus compatibles sur ce planning avec une cadence nettement plus raisonnable et qui se fonde dans le trafic », explique le directeur du projet monégasque. Cette seconde phase représente 800 000 tonnes de matériaux. « C’est une quantité importante en ligne avec ce qui avait été acheminé à l’époque ». Il rappelle avoir déjà « travaillé sur des phases d’extension en mer précédentes avec le type de matériaux de qualité de la carrière du Revest, et ce en quantité plus en rapport avec ce qu’on va faire maintenant. A l’époque, nous avions acheminé 500 000 tonnes de matériaux dans le cadre d’une extension à Monaco à la Condamines. »
Ce qui est préservé ou modifié
Les sédiments pollués mais « pas toxiques » selon Bouygues, issus des dragages de Monaco seront bien acheminés et traités dans le port seynois de Brégaillon par la société Envisan, spécialisée dans la dépollution. Les matériaux extraits de la carrière seront bien acheminés comme prévu mais à bord de navires d’un tonnage plus réduit. Quant à la plateforme qui doit être aménagée à Brégaillon, elle sera entièrement repensée.