Var-Matin (Grand Toulon)

Affaire Lalès à Aix : messieurs « Possible » et « Stupide » à la peine

- LAETITIA SARIROGLOU (LA PROVENCE)

Pas facile de témoigner devant la cour d’assises quand on a été trop bavard en cours de procédure. Surtout quand il s’agit de revenir sur ses propos. Il faut du sang-froid et une constructi­on intellectu­elle en béton. À défaut, le numéro d’acrobate tombe à l’eau et donne un effet désastreux. À l’image de celui produit par monsieur « Possible » et monsieur «Stupide». Incarcéré pour une vilaine affaire de «jeux», Mathieu Assadouria­n est venu jusqu’à la barre encadré de policiers.

Audi A ou RS ?

L’homme s’est placé dans une position plus que délicate en rendant de multiples services à Jean-Baptiste Dominici, accusé d’avoir ordonné à Jean Bengler les tirs mortels sur la police, le 28 novembre 2011 à Vitrolles (lire notre édition de mercredi). Placé en garde à vue quelques heures, il avait tricoté toute une histoire, lorsque les enquêteurs lui avaient appris avoir retrouvé son empreinte dans une Audi… Et le gang des voleurs de crevettes, le soir des faits, circulait dans une Audi. Pour se sortir de ce mauvais pas, Mathieu Assadouria­n avait expliqué s’être appuyé, un soir, sur une Audi A3, dans laquelle se trouvaient quatre hommes encagoulés. Et sous leur cagoule, il avait même reconnu Dominici et Bruno Bonati… À la barre, tout se dégonfle. D’autant que l’Audi était une RS4… « La police ne m’avait pas précisé le modèle », bredouille-t-il. « Peuton imaginer que vous ayez fait des déclaratio­ns qui ne correspond­ent pas à la réalité pour sauver votre peau ? », suggère Me Marsigny. «C’est possible. Il se peut que j’ai donné ces informatio­ns pour me sortir de cette affaire. » « Avez-vous pensé avoir un lien génétique avec l’Audi de Vitrolles ? », poursuit Me Simonin. «Heu… je sais pas, bredouille-t-il, c’est possible. » «Vous aviez tout réitéré devant le juge, alors pourquoi?», s’agace le président : « Dans notre souvenir, vous resterez “Monsieur Possible” ! »

« J’ai colporté des ragots »

Jean Bianconi est également venu sous escorte. Celle des gendarmes. Incarcéré dans une affaire d’assassinat, il a, lui, opté pour une séance d’autoflagel­lation. «Je suis stupide, stupide, stupide », martèle-t-il. S’il avait pu, il se serait même mis des baffes. En prison, ne se sachant pas écouté, il s’était laissé aller à quelques bavardages. « Piou (Jean Bengler, Ndlr), il est mal… Pourquoi Dominici prend pas tout sur son dos? Il est rentré pour des crevettes! Il va prendre 30 ans minimum », avait-il échangé avec un membre de sa famille. À la barre, revirement total. « J’ai dit n’importe quoi! J’avais 23 ans, je voulais faire mon intéressan­t », promet-il, pressé d’en finir. Je suis stupide. Aujourd’hui, je vis ce qu’ils vivent… » « Vous avez l’air content qu’il risque de prendre 30 ans, Piou. Quel est le contentieu­x entre vous ? », lui demande sèchement Me Marsigny. « Aucun, c’est de la méchanceté gratuite. J’étais une grosse merde », se repent le témoin. « Cette écoute peut avoir un impact important sur la responsabi­lité de Jean Bengler », insiste l’avocat : « Alors, je vous, le redemande, pourquoi? »« Mais non, non», implore « Monsieur Stupide » : « J’ai colporté des ragots. C’est tout ». «Vous ne voulez pas aider la justice, monsieur», lâche, cinglant, Me Marsigny. Lundi, deux témoins sous X sont appelés à témoigner. L’anonymat facilitera-t-il leur déposition ?

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