A Nice : Tom Morel, le résistant du maquis des Glières tué à ans
Les éboulements dans le hautpays des Alpes-Maritimes sont fréquents. Ils surviennent au moment des pluies de printemps, à la fonte des neiges ou vers la fin de l’automne. Cela arriva avec une particulière violence le 23 novembre 1926, provoquant à Roquebillière, dans la vallée de la Vésubie, une catastrophe dont la presse nationale parla. Le magazine L’Illustration de Paris y consacra un reportage dans son édition du 11 décembre. « Une des plus pittoresques régions des Alpes-Maritimes, la haute vallée de la Vésubie, affluent du Var, vient d’être le théâtre d’une catastrophe meurtrière... Pour que l’on puisse se rendre compte des conditions dans lesquelles l’accident s’est produit, rappelons que Roquebillière se trouve situé aux bords de la Vésubie, dominée par une pente très escarpée portant à environ 250 mètres au-dessus du torrent les maisons de Belvédère. Rappelons également que dans cette partie du bassin méditerranéen, la saison des pluies s’étend sur octobre et novembre et que ces pluies sont généralement torrentielles; par suite, rarement dans notre Midi cette période ne se passe sans que l’abondance des eaux n’y détermine quelque calamité.
Le déboisement : la panacée des explications
Cette année, les précipitations atmosphériques automnales ont été particulièrement copieuses. À la suite de ces averses diluviennes, le 22 novembre une crevasse s’ouvrit dans le sol en dessous de Belvédère, sur la pente dominant la Vésubie ; des tassements de terrain se manifestèrent aussitôt; puis brusquement, dans la nuit du 23 au 24, à trois heures du matin, l’épiderme de la montagne se décollant en aval de la fente en question, une énorme masse de terre, de boue, de rochers entraînait quelques maisons de Belvédère heureusement évacuées, puis tombait sur le quartier de Roquebillière, situé sur la rive gauche du torrent, renversant une douzaine d’habitations et ensevelissant 25 de leurs occupants. »On dénombrera finalement 19 morts ou disparus. Depuis le VIe siècle, le village de Roquebillière a été six fois détruit par des éboulements et inondations. Il a été chaque fois reconstruit sur le même lieu. Quelle est la cause de cet éboulement, interroge Charles Rabot, le journaliste de L’Illustration ? « Naturellement, on a invoqué le déboisement. Le déboisement ! Tant de gens en vivent intellectuellement. C’est la panacée pour expliquer tous les accidents en montagne. Faisons, à ce propos, observer que les racines des arbres ne pénètrent pas assez profondément dans le sol pour assurer la cohésion de ses diverses assises. Bien plus, il est fort heureux que la pente dominant Roquebillière n’ait pas été boisée; autrement, entraînés avec la terre qui les portait, les arbres auraient formé dans la Vésubie des barrages qui, en se rompant ensuite, eussent déterminé la formation de mascarets dangereux pour l’aval. La catastrophe de Roquebillière est la manifestation d’un phénomène non point accidentel et extraordinaire, mais en quelque sorte normal, habituel même dans les pays montagneux. Ces protubérances du sol renferment, dans de nombreuses localités, à une faible profondeur, des argiles et des marnes; par suite, lorsque les couches sus-jacentes se trouvent saturées d’eau et que la pente est rapide, elles se décollent sous l’action de la pesanteur et glissent vers l’aval. Dans nos Alpes, fréquemment, à la fonte des neiges, de pareils éboulements se produisent, mais, n’entraînant que de minimes dégâts matériels, ils n’attirent pas l’attention. En Savoie, depuis des années, toute une portion de montagne glisse lentement comme une coulée d’asphalte. Les glissements de terrain meurtriers dont la vallée de la Vésubie a été le théâtre sont un phénomène de cet ordre. »
Souscription nationale pour aider les habitants
Comment gérer la suite ? Se résigner ? Agir ? Le journaliste de L’Illustration a son point de vue : « Dès la nouvelle de la catastrophe de Roquebillière, de hauts fonctionnaires ont été envoyés étudier les lieux et les travaux à entreprendre pour parer à la situation. L’art de l’ingénieur demeure impuissant devant les convulsions des Alpes comme devant celles de l’océan. Aussi bien, au lieu de dépenser inutilement des centaines de milliers de francs à essayer en vain d’étayer la montagne, ne vaudrait-il pas mieux les distribuer aux sinistrés de Roquebillière et de Belvédère? On obtiendrait en tout cas un effet utile.» Dans sa séance du 26 décembre 1926, le conseil général votera une aide de 250000 francs. La majeure partie des habitants rebâtiront leur village sur la rive droite de la Vésubie où se trouvait déjà une église du XVe siècle. Une souscription nationale d’aide aux victimes rapportera près de 1 400 000 francs. La catastrophe de Roquebillière avait ému la France entière. Jusqu’au mai, la bibliothèque Raoul-Mille propose une exposition sur Théodose Morel, premier chef du maquis des Glières. Place forte qui fut, pendant la Seconde Guerre mondiale, un haut lieu de la Résistance. La courte vie de Théodose Morel fut un modèle de dévouement à l’armée et à sa patrie. Il n’a que ans, lorsqu’en , il entre dans la clandestinité. Devenu chef du bataillon des Glières, il a été l’âme de la Résistance du Plateau, son chef et son organisateur. Il a donné sa vie pour défendre la France et ses valeurs. Cette exposition présente des photos d’archives prêtées par le petit-fils de Tom et la Fédération des soldats de montagne.
Jusqu’au 12 mai, le mardi, mercredi, samedi de 10 h à18 h et jeudi, vendredi de 14 h à18 h. Bibliothèque RaoulMille, 33 av. Malausséna, Nice. Renseignements : 04.97.13.54.28.