Christian Estrosi : « Nous avons aujourd’hui besoin de reconstruire une grande famille populaire »
Dès potron-jaquet hier, Christian Estrosi a donné le ton de sa journée, se déclarant «triste» qu’Eric Ciotti n’ait pas décidé, comme lui, de soutenir Emmanuel Macron sans ambiguïté au second tour. «Je pensais que nous partagions les mêmes valeurs», taclait-il sur France 2. En soirée, le président de la Région n’était pas moins courroucé à la sortie du bureau politique des Républicains qui a accouché d’un communiqué mi-chèvre mi-chou appelant à faire barrage à Le Pen sans vraiment voter Macron. Tout un art dans l’équilibrisme… « Nous sommes un certain nombre (Alain Juppé, Jean Leonetti, Valérie Pécresse, Xavier Bertrand, JeanPierre Raffarin…) à être en désaccord avec ce texte, fulminait Christian Estrosi. L’enjeu, c’est l’avenir de notre famille politique. Depuis Jacques Chirac en 1988, nous avons toujours tracé une ligne infranchissable avec le Front national. Or, ce communiqué ouvre la porte à une certaine porosité que je n’approuve pas. Plutôt que de nous déclarer opposés à Marine Le Pen, nous aurions dû dire que pas une voix ne devait manquer à Emmanuel Macron.»
« Ne pas jouer avec le feu »
N’allez surtout pas glisser à Christian Estrosi que l’affaire est quasi pliée et le risque frontiste purement virtuel. « Le risque existe, répliquet-il aussi sec. Marine Le Pen n’est pas si loin derrière et imaginez que se produise un attentat qui viendrait la renforcer… Nous n’avons pas le droit de jouer avec le feu. Tous ceux qui se sentent gaullistes, qu’ils fassent partie de notre mouvement ou pas, ne peuvent faire autrement que de voter pour Emmanuel Macron. Nous avons le devoir historique de rassembler les républicains de tous bords. » Pour autant, explique-t-il, ce soutien n’empêchera en rien sa famille politique de faire pleinement campagne sous sa bannière aux législatives. « Je préfère être à jour avec ma conscience. Mais ensuite, je serai à fond derrière nos candidats à la députation. » Et Christian Estrosi le répète une nouvelle fois, il « n’est pas candidat à un poste ministériel ». « Cette question ne se pose pas. Emmanuel Macron n’a pas encore indiqué clairement ce qu’il compte proposer. Les Français attendent maintenant qu’il précise de quelle manière il entend réformer le pays. Il est surtout important d’éviter une situation de blocage. »
Un parti « dénaturé »
Le président de Paca n’en aspire pas moins à «voir se réaliser les réformes structurelles dont la France a besoin et que les conservateurs de gauche comme de droite ont toujours bloquées », regrettant au passage que le second tour n’oppose pas Macron à Fillon, «les deux seuls candidats qui avaient un projet réellement réformateur». Mais il ne résiste pas à glisser une ultime pique au candidat déjà bien couturé de la droite, qu’il revendique d’avoir essayé d’arrêter avant qu’il n’envoie toute sa famille politique dans le mur avec lui. C’était deux jours avant le rassemblement du Trocadéro. «Ça m’a valu d’être ensuite marginalisé dans la campagne. Mais si nous avions fait un autre choix, cela nous aurait évité bien des maux et nous aurions remporté cette élection. Nous avons aujourd’hui la lourde responsabilité d’avoir dénaturé l’essence même de notre formation…» Dans son collimateur, Sens commun autant que Fillon : «Nous étions une formation populaire et nous sommes devenus une formation élitiste. Le rassemblement du Trocadéro organisé par Sens commun a été une tromperie. Nous avons aujourd’hui besoin de reconstruire une grande formation populaire qui rassemble des Français de toutes origines.» Une manière d’acter que Les Républicains se retrouvent avec un rude chantier devant eux. Sans avoir forcément une vision partagée du bout par lequel le prendre...