Le bal des prétendants à Matignon
C’est le secret le mieux gardé du moment. Et pour cause : Emmanuel Macron a assuré que celui ou celle qu’il s’apprête à nommer à Matignon n’est même pas au courant. Si ça se trouve, à part Brigitte, personne n’est dans la confidence… Du coup, commentateurs et éditorialistes font leur miel des supputations et pronostics en tous genres. Au gré des interviews, le président élu dimanche soir a pourtant restreint le champ. Ainsi nous expliquait-il récemment que «le critère, c’est la compétence, la capacité à tenir une majorité au Parlement et à mener un programme robuste». Il excluait alors de faire appel à une personnalité de la société civile, précisant que « pour la fonction de Premier ministre, il faut quelqu’un qui connaît la vie politique ». Il y en a quelques uns... Le bal est donc ouvert. Régulièrement cité, l’actuel ministre de la Défense Jean-Yves le Drian est le seul poids lourd socialiste sorti indemne du quinquennat. Sa légitimité est réelle, mais ce choix ne refléterait pas vraiment la volonté de rassemblement et d’ouverture exprimée par le nouveau président. Il faut reconnaître aussi que l’âge de Le Drian (bientôt 70 ans) n’évoque pas franchement le renouveau. Il n’est pas impossible qu’à défaut de proposer Matignon au Breton, Emmanuel Macron préfère le conserver à la Défense. L’intéressé joue la prudence, demandant qu’on laisse au futur locataire de l’Élysée «le temps de réfléchir ». Fidèle de la première heure, Richard Ferrand, 54 ans, présente un profil idéal. Élu député PS en 2012, le secrétaire général d’En marche! a l’expérience parlementaire requise et la confiance absolue de Macron. Handicaps: sa notoriété est à construire et son poids politique insignifiant. Plus à droite de l’échiquier politique, le député-maire du Havre Edouard
Philippe pourrait correspondre au portrait-robot du Premier ministre idéal. Pilier du camp Juppé, passé un temps au PS pour suivre Rocard, ce quadra tenait la corde auprès des commentateurs hier et figurait même en tête des top tendances Twitter dans la matinée. C’est dire ! Une belle prise en somme, mais là aussi le petit déficit de notoriété d’Edouard Philippe pourrait constituer un frein. Un handicap que n’a pas Xavier Bertrand, suffisamment modéré pour être compatible mais qui a pour défaut majeur d’avoir déjà été plusieurs fois ministre. La notoriété, François Bayrou, 65 ans, en a, lui, à revendre. Peutêtre trop d’ailleurs aux yeux d’une partie de la droite qui ne peut pas le voir en peinture. Et puis côté renouvellement de la vie politique, comment dire… Même constat concernant Jean-Louis Borloo dont l’offre de service spectaculaire ne semble pas avoir soulevé un élan d’enthousiasme du côté d’En marche ! Il faut dire que l’ex-ministre de Sarkozy n’est pas un jeunot non plus (65 ans). L’âge semble être également un handicap pour le fidèle Gérard Collomb. À 70 ans, le sénateur-maire de Lyon est un parlementaire expérimenté. Pourquoi pas une femme, alors? Emmanuel Macron l’a envisagé à plusieurs reprises, mais les hypothèses ne sont pas si nombreuses. Députée européenne du MoDem depuis 2009, la Marseillaise Sylvie
Goulard a récemment organisé la rencontre entre Macron et Merkel. Si, à 52 ans, elle n’a jamais été élue à l’Assemblée, c’est une centriste, tout comme Anne-Marie Idrac dont le nom revient régulièrement. Cette ex-«Juppette » (secrétaire d’État aux transports en 1995) a dirigé notamment la SNCF et la RATP. À 65 ans, son expérience est solide, mais elle n’a rien d’une petite nouvelle en politique. D’autres noms sont régulièrement évoqués, mais avec moins d’insistance: Christine Lagarde dont l’étiquette FMI n’est pas le meilleur sésame pour la gauche, Bertrand Delanoë qu’on imagine mal sortir de sa retraite ou Bruno Le Maire ,le candidat du renouveau dont le poids politique à la primaire de la droite n’a pas dépassé 2,4%. Et si la solution se trouvait ailleurs ? Auprès d’une personnalité politique à laquelle personne n’a pensé, sauf le nouveau président. Réponse dans une semaine…