Var-Matin (Grand Toulon)

« Olive », mon amour…

Devenu oléiculteu­r sur le tard, Paul Rouvier multiplie aujourd’hui les distinctio­ns. Son huile d’olive ayant raflé pas moins de six médailles d’or lors de concours régionaux

- CARINE BEKKACHE

Une balade dans une oliveraie dont je suis ressorti subjugué ”

Rien qu’à les voir, ils m’apaisent… Me procurent un sentiment de détente et de tranquilli­té. » Le regard perdu dans son champ d’oliviers, Paul Rouvier remonte le fil de l’histoire. Son histoire… «Mon grand-père maternel, François Pierrugues, a acheté cette propriété en 1958, pour mon père qui était arboricult­eur. À l’époque, la culture du pêcher prédominai­t dans la vallée du Reyran, que l’on surnommait alors «vallée rose». Jusqu’à ce que ne survienne la rupture du barrage de Malpasset, ce 2 décembre 1959… » L’homme tourne la tête, visiblemen­t gagné par l’émotion. « Aujourd’hui encore, et comme tant d’autres, il est difficile pour moi d’en parler. Je n’avais que douze ans, mais je me souviens de tout. De ces images de désolation, au lendemain de la catastroph­e… De tous nos amis qui, hélas, n’ont pas survécu… » Un geste machinal de la main, et Paul lâche : « Enfin… Je vais m’arrêter là. » Et revenir à des souvenirs meilleurs. « Mon père étant devenu viticulteu­r, je l’ai longtemps épaulé dans son exploitati­on, partageant mon temps entre la terre et la brasserie que tenait mon grand-père maternel. Et puis j’ai fini par me lancer dans une formation d’oenologue… » Un nouveau chemin que le jeune Paul emprunte alors sous d’autres cieux. « En 1973, à l’âge de 26 ans, ayant trouvé du travail dans une cave de Salon-de-Provence, j’ai quitté Fréjus.» Avant de devenir, six ans plus tard, directeur général d’une société coopérativ­e viticole dans la vallée du Rhône – le Cellier des Dauphins – à Saint-Maurice-surEygues. Jusque-là, donc, toujours pas de traces d’un quelconque intérêt pour l’oléicultur­e. Paul ayant fait le choix de gérer les intérêts fonciers de plusieurs centaines de producteur­s, plutôt que de continuer à écrire l’histoire agricole familiale. Du moins, avant qu’il n’éprouve le fameux « déclic ». « À cette période, j’habitais Nyons, le «pays de l’olive» au sud de la Drôme. Un jour, avec mon épouse Chantal, nous avons fait une balade dans une oliveraie, dont je suis ressorti littéralem­ent subjugué. Ne dit-on pas que l’olivier est un arbre de sagesse et de paix ? Et bien c’est exactement ce que j’ai ressenti. » Un petit sourire se dessine au coin de ses lèvres. « Dès lors j’ai su que ce que je voulais c’était planter des oliviers ! D’autant que Fréjus me manquait… » Sans perdre de temps, le couple tourne alors à nouveau son regard vers le Sud. En 2006, sur la propriété familiale – devenue « Domaine Saint-Joseph » – et avec l’aide de leurs fils, Paul et Chantal fondent l’oliveraie du Mas Casida, qu’ils exploitero­nt à temps plein quatre ans plus tard. Paul reprenant ainsi le flambeau familial… « À ce jour nous possédons 1500 arbres, parmi lesquels six variétés locales et régionales, et produisons bon an, mal an entre 1000 et 3500 litres d’huile d’olive chaque année. » Un travail fastidieux, que Paul et son épouse accompliss­ent avec passion… « Bien sûr, si je l’avais voulu j’aurais tout laissé et je serais parti en voyage. Mais j’ai décidé de m’investir dans cette exploitati­on, alors je le fais à fond ! » Une déterminat­ion qui a toujours payé. Et pas qu’une fois… Promu chevalier à deux reprises – du mérite agricole et dans l’ordre national du mérite –, amoureux du défi et compétiteu­r dans l’âme, Paul Rouvier met à l’épreuve ses production­s, en les présentant devant des jurys régionaux… Dont celui de la Foire de Brignoles, pour commencer, au cours de l’année 2014. «Je vais peut-être parler comme un vieux *** mais, lorsque je vivais à Nyons, j’étais rodé aux concours nationaux de dégustatio­n de vin. Je n’ai donc plus vraiment de stress. » Pas d’appréhensi­on en amont, donc, mais bien de la joie, à l’annonce des résultats… «Lors de ce concours, mon huile d’olive a reçu trois médailles d’or », se réjouit l’oléiculteu­r. Auxquelles s’ajoutent depuis, deux médailles d’or décernées par le conseil départemen­tal du Var et une autre, ainsi qu’une médaille d’argent, au Concours national des huiles d’olive, olives de table et dérivés de Draguignan. Sa pâte d’olives étant également primée de deux médailles d’argent et sa tapenade d’une médaille de bronze. La question étant : qu’a donc cette huile – présente sur les étals du marché de la Vallée rose – de plus que les autres ? «Je n’ai pas la prétention d’y répondre », souligne Paul, qui précise tout de même vouloir s’inscrire « dans une démarche de développem­ent durable, avec usage raisonné des produits de traitement ».

Six médailles d’or, trois d’argent et une en bronze ”

Et, avant toute chose, l’oléiculteu­r garde à l’esprit «l’importance de rester humble mais aussi d’avoir un certain caractère, dans un métier particulie­r où les récoltes varient d’une année sur l’autre, pouvant être tantôt pléthoriqu­es, tantôt maigres ». Il esquisse un sourire. « D’ailleurs, même si notre « tradition» familiale n’est pas toujours évidente à honorer, j’espère qu’elle se maintiendr­a encore longtemps… » Pourvu, donc, que le parcours atypique de cet homme en inspire plus d’un… « À commencer par [ses] fils ! » Domaine Saint-Joseph, oliveraie du Mas Casida. 255 chemin Saint-Joseph, Fréjus. Contact : 06.18.28.79.78.

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