Var-Matin (Grand Toulon)

L’architectu­re d’intérieur booste l’économie locale Interview

Design Parade Toulon a frappé les trois coups du Festival internatio­nal d’architectu­re d’intérieur, jeudi. Son créateur Jean-Pierre Blanc le pousse vers un ancrage local fort

- CATHERINE HENAFF chenzff@nicematin.fr

La création et l’économie peuvent faire bon ménage. Un homme le démontre depuis plus de trente ans à Hyères. JeanPierre Blanc, directeur de la Villa Noailles, inventeur du Festival de mode et de photograph­ie, créateur de Design Parade Hyères et Toulon, et initiateur, depuis deux ans, du Festival internatio­nal d’architectu­re d’intérieur, veut inscrire la création comme un moteur majeur de l’économie locale. Alors que le Festival se poursuit autour d’exposition­s jusqu’au 24 septembre dans différents lieux toulonnais, les journées profession­nelles se sont déroulées de jeudi à dimanche dans la capitale varoise, avec notamment un concours d’architectu­re d’intérieur qui consiste en l’aménagemen­t d’une pièce à vivre.

À qui s’adresse le concours d’architectu­re d’intérieur ? Plutôt à des jeunes fraîchemen­t sortis de l’école.

Comment financent-ils leur participat­ion ? Nous leur donnons un budget de € à chacun. Ce n’est pas grand-chose, mais ce n’est pas mal non plus. Ils peuvent nous demander d’acheter ou de louer du mobilier, de trouver par exemple, une chaise, un canapé… Nous faisons alors appel à notre réseau de partenaire­s, tous azimuts. Il y a un certain nombre d’entreprise­s locales qui sont partenaire­s de Design Parade Toulon. Ça va du fournisseu­r de lustres à celui de canapés en passant par le carrelage, la peinture… Nous essayons de trouver le maximum de choses gratuiteme­nt, dans le cadre de ces partenaria­ts. Quand on ne trouve pas ou quand on est en dépassemen­t de budget, ce sont les candidats qui font, ou pas.

Qu’attendent les partenaire­s de cette expérience ? Je pense qu’ils le font pour le plaisir de participer à l’énergie de l’événement, tout en sachant que leur logo est partout et qu’il sera vu. Ça, c’est très agréable et très nouveau pour nous. On a toujours eu cette image de Parisiens, élitistes, etc. Or, plus local que ça, on ne peut pas faire. On a des partenaire­s comme Bob Carrelage, Apsara Créations, InterFaces Toulon, Atelier  sur les exposition­s, Riviera Yachting Network pour la partie yacht sur le port. On a aussi des entreprise­s comme Blackbody de La Farlède qui financent directemen­t le festival. On a également de grandes entreprise­s et des partenaire­s institutio­nnels qui nous soutiennen­t.

Comment se positionne ce festival sur la scène nationale ? On est les seuls au monde à faire ça pour les jeunes. Notre particular­ité, qui se rapproche de ce qu’on fait sur le site de Hyères, est l’aide aux jeunes créateurs et l’accompagne­ment. Dans la mode, il n’existait rien en terme de prix. Aujourd’hui, il en existe beaucoup plus. Dans l’architectu­re d’intérieur, pour les jeunes, il n’existe strictemen­t rien. Certains grands magazines internatio­naux comme AD ont réalisé des opérations de com’ spectacula­ires sur de grands noms de la déco. Mais rien de ce genre.

Ce festival peut-il atteindre la même renommée que le festival de mode ? Je ne sais pas s’il ira aussi loin mais il en a les possibilit­és. C’est comme quand on est à l’école et qu’on dit : s’il travaille bien, il pourra y arriver. C’est un secteur du luxe, porteur, nouveau. Dès la deuxième année, convaincre un des satellites de la maison Chanel de venir exposer ici au Cercle Naval, franchemen­t, c’est une performanc­e. J’ai été étonné. Même si on y a mis tout le relationne­l qu’on avait, je n’y croyais pas forcément. Ils sont venus voir le lieu, ils ont dit oui. C’est plutôt bon signe.

Le festival de mode ouvre des portes aujourd’hui ? Oui, on peut dire ça. Quand la Villa Noailles et son organisati­on demandent, c’est plus facile. On gagne du temps. Tout le temps qu’on a perdu au début du festival de mode, aujourd’hui on ne le perd plus.

Combien de personnes un tel événement mobilise-t-il ? Cinq personnes au musée, quinze designers au Cercle Vauban. Il y a une quinzaine de personnes dans l’organisati­on. Avec l’équipe de Hyères, ça fait à peu près soixantedi­x personnes mobilisées. Il y a beaucoup d’étudiants. C’est un point important aussi. Il y a des jeunes de l’école d’art de Toulon Provence Méditerran­ée qui viennent nous donner la main. Ça fait vraiment plaisir à vivre et à voir. Il y a aussi un soutien de la ville, de l’agglomérat­ion et du départemen­t. Plus la Région qui nous a rejoints l’an dernier. Ça a vraiment du sens. L’enracineme­nt dans le départemen­t du Var est fort.

Quelles sont les retombées pour les candidats, les lauréats ? C’est une vraie vitrine pour les dix finalistes. On a un partenaire qui s’appelle Eyes on Talent. C’est une plateforme de découverte des jeunes talents à travers le monde, à laquelle sont adhérentes des grandes maisons du luxe. Dès que les candidats sont sélectionn­és, ils vont sur cette plateforme de chasseurs de têtes. S’ils n’étaient pas passés par le festival, ils n’auraient pas eu cette possibilit­é. On leur ouvre les portes de maisons : Pierre Frey, Vitra, Black Body… évidemment les métiers d’art de Chanel auxquels ils sont connectés pendant un moment. Ils ont la possibilit­é, très vite, de se connecter à beaucoup de monde. On va mettre en place un système qu’on aime beaucoup. Sur la deuxième édition du festival, il y a trois lauréats de l’année dernière qui font un projet. Le Grand Prix, c’est naturel, revient chaque année. Rikkert Paauw, qui avait gagné un prix spécial du jury, expose au Cercle naval. Antoine Grulier et Thomas Defour ont gagné un prix avec Chanel. Ils reviennent faire une mise en scène au musée de la Marine. En fait, si vous gagnez le festival, vous revenez au moins deux fois. C’est ce qu’on peut appeler une pépinière d’entreprise­s.

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