Var-Matin (Grand Toulon)

Le dessin de Kenza,  ans, au Président

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Le Président Macron est un tout petit bonhomme bleu avec les cheveux dressés sur la tête. Pour sa maman, Kenza a choisi le rouge, comme le sang qui coule de son oreille. Sur cette feuille rose, elle a aussi dessiné des ballons bleus, plein de ballons, qui filent vers un soleil radieux et des enfants qui sont montés au ciel. Et puis, dans le ciel, il y a aussi un sac de bonbons mutlicolor­es. Ces mêmes bonbons que le  juillet dernier, Kenza, et sa maman, Hager, venaient tout juste d’acheter au kiosque avant que le camion ne leur fonce dessus.  tonnes de haine et de mort lancées sur elles et leur jolie vie sans histoires. En une seconde, Hager a plaqué Kenza contre son ventre, sa fille tout contre elle, et s’est jetée sous le camion. Elles sont passées entre les roues, miraculées, une oreille qui saigne pour Hager et, puis, des blessures qui ne se voient pas mais qui les hantent, jour et nuit. Kenza a cinq ans, sa maman, . Et « plus rien n’est pareil ». « Nous ne sommes pas mortes dans cet attentat mais, en quelque sorte, nous ne sommes plus en vie ». Elles sont venues le dire au Président Macron : Kenza avec un dessin, Hager avec un courrier dans lequel elle explique leur difficulté à continuer : « Nous vivons au rythme des pédopsychi­atres, des rendezvous dans les hôpitaux, de la peur, des angoisses, de la peine, de la colère et de ce mal-être incessant...»

« Mon espoir, tous mes efforts ont été suprimés »

Hager rêvait d’ailleurs pour oublier : « Tant de fois j’ai voulu quitter Nice, ma ville, notre ville de naissance, si chère à notre coeur. J’ai pris la fuite, je suis partie dans le désert avec ma fille, je cherchais un autre endroit pour essayer de me reconstrui­re. Cependant mon ancrage et mon investisse­ment dans mon quartier, Vernier-Trachel à la Libération, m’ont empêchée de concrétise­r mon départ ». Hager et sa famille ont créé, voilà plusieurs années, une associatio­n qui crée du lien social dans ce quartier en souffrance de Nice. Surtout, Hager est, depuis  ans, assistante d’éducation (AED) dans l’école du quartier où est scolarisée Kenza. Et ça la raccroche à la vie. « Après le  juillet, j’ai repris mes fonctions comme si de rien n’était (...) J’ai pris un appartemen­t en face de l’école en ce début de mois de juillet afin de préparer cette rentrée (pour éviter les déplacemen­ts devenus insupporta­bles depuis l’attentat) et c’est là que j’apprends que mon espoir, tous mes efforts et les seules choses qui me rattachent à Nice ont été supprimés au nom de restrictio­ns budgétaire­s : mon poste vient d’être supprimé. Mon poste est précaire, mon salaire de  €/mois. Ce n’est bien que par conviction que je m’investis dans cette lutte, qui est pour moi le pilier de ma reconstruc­tion et de celle ma fille. Il faut absolument que cette école repasse en Réseau d’éducation prioritair­e REP). Il faut, Monsieur Le Président, je vous en prie, que vous mettiez en place une procédure d’urgence. Ce quartier a besoin de préserver ses moyens pour poursuivre ses luttes. Nous sommes plus que confrontés au problème de radicalisa­tion. Monsieur le Président, il est en votre pouvoir de faire renaître un sentiment d’espoir en la vie. Je vous prie de ne pas y être indifféren­t et de le faire ».

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