Var-Matin (Grand Toulon)

Après l’incendie, les abeilles de Bormes ont le bourdon

Laura et Rémi ont tout perdu : leurs ruches et leurs abeilles. Le couple d’apiculteur­s borméens est dévasté après l’incendie qui a ravagé la plupart de leurs colonies et la nature environnan­te

- G.A. gaubertin@nicematin.fr

Le choc. C’est la première fois que Laura retourne sur place. Difficile pour elle de ne pas se laisser submerger par l’émotion. « Tout a disparu », commente, dépitée, la jeune Borméenne, en découvrant l’étendue des dégâts. L’incendie de Bormes-les-Mimosas, qui a ravagé près de 1 600 hectares de forêts la semaine dernière, n’a donc pas épargné les ruchers borméens de la Butinerie en Provence. « On en avait à Léoube, au Trapan et ici au Niel, mais il ne reste plus rien », se désole Laura, face au spectacle de désolation qu’ont laissé les flammes dans leur sillon. « C’est difficile d’imaginer, dit-elle, mais il y a quelques jours, cet endroit ressemblai­t à un vrai petit coin de paradis. »

Des années de travail anéanties

À part un vaste tapis de cendres, des clous rouillés, une ou deux poignées en métal et l’ossature carbonisée des quelques ruches qui n’étaient pas en bois, il ne reste plus grand-chose, en effet, du vaste rucher multicolor­e qui hébergeait une cinquantai­ne de colonies d’abeilles, ici à quelque pas de la zone artisanale du Niel. «On avait surtout trois de nos meilleures ruches d’élevage. C’étaient les mères de toutes nos ruches» , déplore Rémi Boulet, qui revient tout juste des Alpes-de-Haute-Provence, où il a installé une partie de ses ruchers. « Heureuseme­nt, on ne met pas tous nos oeufs dans le même panier », tente de se rassurer Laura. Une bien maigre consolatio­n. Car aujourd’hui, ce sont « plusieurs années de travail qui ont été anéanties » en quelques minutes à peine. Pis : « C’est difficile à estimer, souffle Rémi, qui s’est lancé dans l’apiculture il y a cinq ans, en suivant les traces du paternel, mais au total, on a dû perdre une centaine de ruchers sur les trois sites » . Impossible d’évaluer le montant du préjudice. « Il ne s’agit pas simplement des ruches. On ne sera jamais remboursé sur le miel, les abeilles, et sur la production perdue pour des années. »

« Plus rien à manger »

Comme le raconte Rémi, encore abasourdi, « vu que le feu s’est déclaré la nuit, les abeilles n’ont pas pu s’échapper puisqu’elles ne volent que le jour ». Or, les quelques guerrières, désormais orphelines, qui ont, elles, survécu au brasier, sont aussi condamnées. «Elles ont perdu leur reine, et ne seront pas accueillie­s dans d’autres ruches, car elles seraient considérée­s comme des pillardes», explique l’apiculteur. De toute façon, elles n’auraient « plus rien à manger » aux alentours. Les abeilles borméennes se nourrissai­ent des arbouses, de la bruyère blanche et de la lavande maritime qui abondaient au pied de la colline. « Le problème, résume Laura, c’est qu’on a perdu une belle partie du patrimoine floral de Bormes . » Le jeune couple venait d’investir dans la constructi­on d’un bâtiment d’exploitati­on pour sa petite entreprise. Cela faisait deux ans que Rémi et Laura s’étaient lancés dans la vente au détail d’un miel de qualité, en arpentant notamment les marchés du Lavandou (le jeudi matin) ou d’Hyères (le samedi). « C’est sûr que c’est un sacré coup de frein», euphémise Laura, qui tente malgré tout de garder le sourire. Car même s’il va falloir attendre « des années avant que la végétation repousse et donne de la nourriture aux abeilles», pas question pour autant de baisser les bras. «C’est un métier de plus en plus difficile, notamment à cause de la sécheresse, qui est de plus en plus prononcée chaque année, analyse Rémi. Et je ne sais pas s’il faut encore le rappeler, ajoute-t-il, mais la nature et l’écosystème ont plus que jamais besoin des abeilles. » Le couple, lui, assure en revanche n’avoir « besoin de rien... si ce n’est que la nature aille bien. » La Butinerie en Provence. Site Internet : www.labutineri­e.biz Contact : miel.boulet@gmail.com. Tel : 06.41.76.54.30

 ?? (Photos G.A.) ?? Apiculteur de père en fils, Rémi a lancé la Butinerie de Provence avec sa compagne il y a cinq ans. Ce sont plusieurs années de travail qui ont été anéanties en quelques minutes à peine. Impossible d’évaluer le montant des dégâts. Ce qui est certain,...
(Photos G.A.) Apiculteur de père en fils, Rémi a lancé la Butinerie de Provence avec sa compagne il y a cinq ans. Ce sont plusieurs années de travail qui ont été anéanties en quelques minutes à peine. Impossible d’évaluer le montant des dégâts. Ce qui est certain,...

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