Au commissariat, l’agent d’entretien sert d’interprète
Le tribunal a annulé une procédure contre trois présumés voleurs, en raison du recours à une traductrice dont l’objectivité est jugée contestable : elle est femme de ménage au commissariat
Trois hommes âgés de 21 et 22 ans, qui se disent de nationalité algérienne, ont comparu, mercredi, devant le tribunal correctionnel de Toulon afin de répondre d’un vol à l’arraché commis dans la commune le 27 août. Présentés en comparution immédiate, les membres de ce trio, encadré par une escorte de huit gendarmes, devaient être interrogés sur le vol d’un téléphone mobile, d’un trousseau de clefs et d’une carte mémoire. Le dossier n’a toutefois pas été examiné sur le fond…
Traductions lors des gardes à vue
Saisie par des exceptions de nullité soulevées par Pascal Zecchini, avocat de la défense, Lucette Broutechou, la présidente du tribunal de grande instance de Toulon a estimé que la procédure était effectivement nulle, en raison « du recours à un interprète dont l’objectivité est contestée vu ses fonctions assurées au commissariat de police ». Lors des auditions en garde à vue, les policiers ont eu recours à l’assistance d’une femme de ménage du commissariat central afin d’assurer la traduction des échanges avec les trois hommes. Des actes jugés « intolérables et contraires au code pénal », a soulevé la défense, qui a également dénoncé « l’appel très tardif » aux services d’un avocat lors de la garde à vue des mis en cause (lire ci-contre). Ses arguments ont été balayés un après l’autre par Bernard Marchal, procureur de la République. Avec un tacle réservé à son contradicteur. « Monsieur l’avocat, soyez aussi exigeant avec vos pairs et rejoignez le conseil d’administration du barreau de Toulon pour disposer d’un avocat joignable à toute heure, ce qui n’est pas toujours le cas. Votre objectif est de faire du cinéma. Vous n’êtes pas ému de déposer des conclusions de nullités à 14 heures (ouverture des débats devant le tribunal correctionnel, Ndlr), vous qui réclamez plus d’égards. »
Mieux se pourvoir
Le procureur a estimé que les notifications de garde à vue ont été réalisées dans les règles, que l’un des mis en cause n’a pas souhaité se faire assister par un avocat et qu’aucun texte n’a été violé en ce qui concerne la détermination des âges respectifs. Le tribunal a fait partiellement droit aux demandes de la défense ; écartant toutefois la nullité de la notification tardive des droits. Comme le soulevait le représentant du parquet de Toulon, la notification avait été différée. Le tribunal a signifié au ministère public l’annulation de la procédure et la possibilité de mieux se pourvoir.