Certaines espèces n’ont pas le temps de s’adapter”
permettra d’organiser le mouillage. En distinguant des zones d’interdiction, des zones de mouillage aménagées et des zones de mouillage pour la petite et grande plaisance…
Multiplier les réserves marines
Autre solution à mettre en oeuvre localement : la création de nouvelles aires marines protégées. « Ces réserves existent déjà, à Port-Cros par exemple, elles sont essentielles car elles permettent de soustraire les espèces aux agressions et au stress liés à la pêche, la pollution. Si on fait en sorte qu’elles soient moins vulnérables, insiste Jean-Pierre Gattuso, ces espèces résisteront mieux aux effets du réchauffement climatique. À l’acidification et à l’augmentation de la température de l’eau, des changements plus longs à contenir. » Créé en 1963, le Parc national de Port-Cros (dont les coeurs battent à Port-Cros et Porquerolles sur 1 700 hectares de terres émergées et 2900 hectares de surface marine) est l’un des plus vieux parcs nationaux de France. L’une de ses priorités est de « favoriser la transition écologique et énergétique ». Or, pour tenter de combattre le réchauffement climatique et limiter l’augmentation de la température de la mer, encore faut-il en comprendre les causes et le fonctionnement. «Notre objectif premier est de tirer un bilan scientifique précis des relevés effectués sur les aires de répartition des espèces, afin de savoir comment elles évoluent », rappelle d’entrée Marc Duncombe, le directeur du Parc. Ces études ont notamment permis de constater que la plupart des espèces (terrestres ou marines) avaient tendance à se déplacer vers le Nord. « L’accélération rapide du réchauffement fait que certaines espèces n’ont pas le temps de s’adapter. C’est pour cela aussi que le Parc a un rôle à jouer. » Car, quand la population de krill (plancton des mers froides) baisse aux abords des îles, ce sont les rorquals qui se voient privés de nourriture. Tel est le principe de la chaîne alimentaire qui peut entraîner «des conséquences en cascade». D’où l’inquiétude pour les chercheurs d’assister à la migration des cétacés. « Ces phénomènes que l’on observe nous permettent de lancer des alertes dans le but de maintenir l’écosystème », résume le directeur du Parc.
Sensibiliser la jeunesse
Cela passe donc par la sensibilisation du public. À commencer par le milieu scolaire. «On a des projets pédagogiques à tous les niveaux, du primaire au lycée», détaille Franck Alary, chargé de mission Éducation à l’environnement et au développement durable. Les plus jeunes apprennent ainsi à « comprendre le fonctionnement de la posidonie à travers la mise en place d’aires marines éducatives ». Quant aux lycéens, ils peuvent jouer les scientifiques en herbe en procédant, eux-mêmes, à des relevés de données. Au-delà des campagnes de prévention classiques type «Ecogestes» (qui visent à informer les plaisanciers), le Parc développe également des programmes de science participative. «Cela permet au grand public de s’impliquer dans le suivi et la connaissance du milieu », précise Franck Alary.
Travailler avec les collectivités
Mais, comme le nuance aussi Annie Aboucaya, botaniste au service Connaissances du patrimoine, «l’homme croit souvent qu’il peut faire mieux que la nature, en replantant, par exemple, des arbres après les incendies… Mais c’est une er reur ». Pour les scientifiques, il s’agit au contraire de «laisser plus de temps et d’espace à la nature». Un savant dosage à respecter. Et à bien expliquer ensuite aux collectivités qui ont également leur rôle à jouer. Le Parc national de Port-Cros a d’ailleurs observé les effets de la pollution lumineuse sur les espèces animales, notamment les puffins, très présents sur les îles d’Hyères. «Cela a permis d’avoir une réflexion sur l’éclairage nocturne des villes », précise Marc Duncombe. Cette concertation a ensuite abouti à une baisse de 30 % de consommation énergétique pour la ville de La Garde. Pour le Parc national de Port-Cros, il s’agit évidemment de montrer l’exemple. « L’idée, résume ainsi le directeur, est de susciter le développement de bonnes pratiques écologiques en faisant de Porquerolles un exemple», que ce soit en matière d’urbanisme ou de consommation d’énergie. Un défi d’autant plus important pour Porquerolles qui accueille chaque année des centaines de milliers de visiteurs. Comme à Cavalaire, le Parc national de Port-Cros travaille lui aussi sur des modes de mouillages un peu plus écolos, afin de limiter l’impact des pratiques touristiques sur la posidonie, qui est « un véritable puits de carbone ». À terme, développe Marc Duncombe, on voudrait étendre ces dispositifs d’amarrage avec des bouées en surface aussi bien autour de PortCros qu’au niveau des plages de Porquerolles». Un dispositif simple qui ne fera évidemment pas baisser la température de la Méditerranée du jour au lendemain. On est loin de l’effet d’un glaçon dans un verre de rosé. Mais pour les chercheurs, c’est en cultivant les petits gestes qu’on parviendra à sauver la Méditerranée, sa faune et sa flore. Comme le dit Annie Aboucaya : «c’est une évolution globale qu’il faut combattre par des solutions locales. Cela a toujours été le leitmotiv de l’écocitoyenneté. »
Il faut laisser plus de temps et d’espace à la nature”