Emotion et inquiétude dans le golfe de St-Tropez
Saint-Tropez, Saint-Barth, Saint-Martin : ces trois lieux mythiques sont unis depuis longtemps par les gens qui les fréquentent, qui y travaillent ou qui y brassent des affaires. L’été se passe à Saint-Tropez que l’on soit saisonnier ou professionnel du tourisme et la saison achevée, tels des oiseaux migrateurs, nombreux sont ceux qui partent faire la saison d’hiver dans les Caraïbes sur les deux îles sinistrées par l’ouragan Irma. Aussi hier, après le désastre, ils étaient nombreux à attendre des nouvelles d’un ami, à s’inquiéter pour leurs installations ou à connaître l’état de leurs biens. Des communications impossibles ou furtives par portable ou Internet, de grands silences ; ce qui se passe de l’autre côté de l’Atlantique mobilise un bon nombre d’habitants du golfe.
Les professionnels du tourisme touchés
Ainsi Christophe Tricoit, qui travaille avec Gilles Magnan sur la plage Pearl Beach à Saint-Tropez était hier plutôt rassurant concernant l’île de Saint-Barthélémy. Avec moins d’habitants et des maisons plus modernes, l’île, bien que très touchée, aurait apparemment mieux résisté que sa voisine. « Je sais que Gilles va bien. Bien sûr, il y a des dégâts importants et certaines installations de plage comme celle de Nikki Beach sont très endommagées, voire ont disparu. Mais rien à voir avec Saint-Martin. » Bertrand Luftman est directeur général du groupe Riviera village qui compte notamment Kon-Tiki à Ramatuelle, sur la plage de Pampelonne. Il possède aussi de nombreuses installations touristiques à SaintMartin. Hier, il préférait ne pas se prononcer sur l’étendue des dégâts n’ayant pas assez d’information. « Rappelez-m oi demain », nous a-t-il répondu d’une voix qu’on sentait évidemment très tendue. Idem du côté de l’hôtel de luxe V illa Marie, dont l’alter ego se trouve aux Antilles. Pas assez d’informations pour donner un bilan.
« C’était comme une bombe atomique »
Jérôme Spriet, lui, a vécu durant cinq années à Saint-Martin. Il avait alors subi l’ouragan Luis, en 1995. Ce restaurateur tropézien compte encore de nombreux amis sur l’île. Il racontait hier matin d’une voix blanche le très bref entretien téléphonique qui avait été le sien avec son ami d’enfance Benjamin : « On n’a pu discuter que trente secondes, avant que la communication soit coupée. J’ai du mal à en parler sans émotion, car il n’y a plus rien là-bas. Il était terrorisé. Il m’a dit : “On est vivant, mais c’était comme une bombe atomique. Plus rien n’est debout !” Lui, il a des commerces de vente de vin. Il n’avait pas encore pu aller voir les dégâts. Il est en état de choc. Nous avons vécu ensemble l’ouragan Luis, et déjà, il avait été traumatisé. On a du mal à se rendre compte d’ici ce que cela peut être, un ouragan. Et puis il va y avoir des morts dont on ne parlera jamais. Tous ces gens qui sont là incognito, venus d’Haïti ou d’ailleurs, sans papier ni existence légale. C’est une tragédie. J’espère avoir plus de nouvelles par Facebook peut-être ou dès que le téléphone remarchera. » Une bonne partie du golfe de Saint-Tropez attend donc des nouvelles, suspendue au fil de la Toile, la boule au ventre.