Un Irma en Méditerranée, c’est possible?
Un cyclone au large de notre littoral ? Non, il ne s’agit pas d’un scénario catastrophe. D’une certaine façon, le phénomène existe et est connu des climatologues. «Un cyclone restera toujours tropical: il se forme où la mer est chaude sur plusieurs dizaines de mètres de profondeur. Même avec le réchauffement climatique, il n’y en aura pas dans nos zones tempérées. Mais les “medicanes” se forment de la même façon», affirme Patrick Noterman, prévisionniste à MétéoFrance Sud-Est.
En , au large d’Hyères…
Un « medicane » ? Ce mot-valise, contractant « Méditerranée » et « hurricane » (tempête, en anglais), désigne « une dépression formée lorsque l’air froid polaire rencontre l’air chaud méditerranéen, décrypte encore le
prévisionniste. La température de la mer monte tout l’été, et reste élevée en automne, un phénomène qui va s’amplifier avec le réchauffement climatique. Ces dépressions se transforment alors en mini-cyclones, mais avec une intensité moindre. »
Les « épisodes cévenols » plus inquiétants ?
Un phénomène qu’on peut observer depuis la fin des années 1960, grâce aux progrès des images satellite. «Depuis 1969, on en a répertorié huit, précise Patrick Noterman. Le dernier remonte à novembre 2011. Il s’était formé en Méditerranée occidentale avant de remonter vers les îles d’Hyères, où il s’était affaissé. On avait enregistré des rafales de vent atteignant 154 km/h au large de Porquerolles. C’est loin des 350 km/h d’Irma, mais pas anodin. » Jusqu’ici, aucun medicane n’a atteint le littoral, «mais ce scénario n’est pas impossible ». D’autant que «le réchauffement va élever le niveau de la mer et aggraver la situation. Ces phénomènes gagnant en puissance, des vagues risquent de dépasser les digues. Ça n’aura pas les conséquences d’Irma, mais des zones très basses comme la Camargue ou l’aéroport de Nice peuvent être impactées.
» Le célèbre climatologue Jean Jouzel, membre du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), corrobore le constat mais, lui non plus, ne s’inquiète pas outre mesure. « Si
j’habitais le pourtour méditerranéen, je me préoccuperais bien davantage de la violence des épisodes cévenols », rappelant les dramatiques inondations qui ont frappé le Var et les Alpes-Maritimes ces dernières années. Une inquiétude partagée par son collègue, Robert Vautard, chercheur, qui a lui aussi participé à des rapports du Giec. Ce spécialiste des questions méditerranéennes affirme « de façon quasi certaine qu’un phénomène de type cyclone n’est pas possible en Méditerranée.» Tout en restant prudent sur les medicanes,
«objets de recherches actuellement ».
En revanche, le réchauffement climatique pourrait induire des épisodes cévenols de plus en plus violents. « En soixante ans, leur intensité a crû de 20 à 30 %. À chaque fois que la Terre se réchauffe d’un degré, les cumuls de pluie augmentent de 7 %. Il faut donc s’attendre à des pluies de plus en plus fortes. »