Projet de port : les litiges refont surface
Il n’est pas construit, mais fait toujours autant parler. Et la majorité a dû, hier en conseil municipal, se justifier sur les contentieux avec les délégataires chargés de réaliser le nouveau port
C’est un serpent de mer, vieux de plus dix ans, qui a animé hier la séance du conseil municipal. A l’ordre du jour, une décision modificative du budget de la Ville dont l’objet était, entre autres, d’anticiper des travaux sur des bâtiments communaux, de réaliser quelques acquisitions et… de provisionner 1,26 million d’euros dans le cadre du contentieux avec Cari Altaréa. Pour mémoire, il s’agit du groupement d’entreprises à qui, en 2007, la majorité municipale, dirigée alors par Arthur Paecht, avait attribué la délégation de service public (DSP) pour la réalisation du nouveau port de plaisance. Trois ans plus tard, l’équipe de Marc Vuillemot, constatant que les travaux n’avaient toujours pas débuté, décidait de résilier la DSP pour chercher un nouveau délégataire. L’affaire est donc allée devant la justice, Cari contestant la résiliation du contrat et demandant des dommages et intérêts. « Une affaire dont le dénouement est attendu pour 2018 », a précisé hier Marc Vuillemot… au moment du vote sur la revalorisation de la provision du contentieux.
« Cela ne devait pas coûter un euro aux Seynois »
Dans la foulée, c’est Sandra Torrès qui a ouvert le feu: «Lorsque vous avez cassé la DSP, vous disiez que toutes les dispositions étaient prises pour que cela ne coûte pas un euro aux Seynois. Et là, nous devons provisionner plus d’un million alors qu’il y a déjà des difficultés économiques pour gérer la ville. Et puis il y aura ensuite le litige avec Sifa, la deuxième entreprise que vous avez désignée pour réaliser le port, et qui réclame 14 millions. Vous n’avez peut-être pas assez mesuré le risque (...) Et nous n’avons toujours pas le nouveau port… ». Jean-Pierre Colin a abondé dans le même sens : « Ces affaires de DSP ont été ratées car mal préparées, mal négociées avec les entreprises. Et elles sont un gros boulet pour les finances municipales. Or à plusieurs reprises, je vous ai suggéré de travailler avec des spécialistes aguerris aux marchés publics compliqués. J’ai bien peur qu’il ne soit trop tard et que vous soyez responsable d’une catastrophe financière pour la commune ». Marc Vuillemot a tenté de calmer le jeu, expliquant que « cette provision n’a aucune incidence budgétaire puisqu’il s’agit d’un transfert de crédits d’investissement vers des crédits de fonctionnement. Sur le fond, je vous rappelle que le tribunal administratif de Toulon a validé la résiliation de la DSP avec Cari. Et l’appel ne l’a pas invalidé. Et ce, parce qu’il a été constaté que nous sommes allés au bout de ce que la Ville pouvait faire pour que Cari démarre les travaux. Mais au final, nous avons sans doute payé une vision divergente entre les entreprises associées dans le groupement. Toujours est-il qu’il reste à rembourser les frais engagés (presque 3 millions) et qu’il n’y a pas lieu de porter un jugement sur les responsabilités des uns et des autres».
« L’opposition vous avait alertés »
Explication insuffisante pour JeanPierre Colin : « S’agissant de dossiers comme celui-ci, il faut avoir une culture économique pour faire face à des entreprises mal intentionnées et habituées aux litiges. Par exemple, il faut comprendre que, dans le cas du deuxième appel d’offres, l’entreprise ne cherchait qu’à avoir une autorisation pour la revendre. Faute d’avoir été hyper vigilants, les Seynois se sont fait avoir par deux fois ». Claude Astore, adjoint au maire a alors estimé qu’il « n’est pas possible de nous faire un procès d’intention alors que nous avions choisi le groupement le plus cohérent; personne n’imaginait que le délégataire pensait qu’il pouvait commercialiser la DSP». Certes, a repris Sandra Torrès, « mais à l’époque, l’opposition avait relevé des irrégularités et vous avait alerté ». Ce qu’a confirmé Jo Minniti : «Lorsque Sifa a été choisie, nous vous avons mis en garde car cette société n’avait construit que des ports à sec, ce qui n’a rien à voir avec un port en mer. Et il suffisait de voir sur Internet qu’elle n’avait pas de salarié, pas de chiffre d’affaires, et qu’elle ne publiait pas ses bilans. Son seul but était d’obtenir le marché pour le revendre. Donc si vous aviez écouté votre opposition, le port serait en construction aujourd’hui ». En conclusion de ce débat, Marc Vuillemot devait répéter que «les commissions d’appel d’offres chargées d’examiner les candidatures avaient choisi les meilleurs dossiers, ceux qui étaient montés réglementairement. Les élus ont donc fait leur travail, accompagnés par des spécialistes et en présence d’un représentant de l’État. Après, les circonstances ont fait que… »