Rien à déclarer ?
À La Seyne les rotations du roulier turc sont placées sous très haute surveillance douanière
Le port de Brégaillon de La Seyne, où accoste trois fois par semaine un navire turc chargé de fret, est placé sous haute surveillance douanière. Immersion…
La patience. «C’est la principale qualité d’un douanier », lance JeanClaude Pequignot, chef de service de la brigade de surveillance intérieure des douanes de Toulon. Il vient de rejoindre ses agents en uniforme, Muriel et Didier qui,
(1) postés debout devant les deux guérites de contrôle du port de Brégaillon, font le pied de grue depuis le début de la matinée. Le site, classifié « zone de douane », qu’on imagine écrasé de soleil l’été, ressemble à un parking géant sur lequel sont garées de longues remorques, à perte de vue. Il est animé par le ballet incessant des chariots de dockers déchargeant les remorques (contenance : 30 000 articles) du navire roulier U.N. Ro-Ro qui, en provenance de Turquie, a accosté vers 8h30, et les transportent jusqu’à l’un des deux parkings de dédouanement. Ils n’intéressent pas particulièrement les douaniers. « Nous ne les contrôlons pas systématiquement», observe le chef de service. Au côté des agents en uniforme, Yannik et Vanessa, habillés eux d’une combinaison gris clair, sont aussi présents. En civil, ils font partie de l’équipe «commerciale» de la douane, placée sous la responsabilité de Christian Houmaire, responsable du bureau de Toulon. Pour ce dernier, « un bon douanier est un chasseur ».
“Signalé suspect par la cellule de ciblage”
Voilà pour les présentations. Il est 11h47. Les choses sérieuses commencent enfin. Le premier camion avec chauffeur, un semi-remorque, apparaît et s’arrête avant les guérites – «là où on est encore à l’étranger» – sur l’injonction de Muriel et de Didier. Le convoi exceptionnel immatriculé en Roumanie a éveillé leur attention. L’identité du chauffeur de nationalité roumaine est contrôlée. En trois minutes, Muriel s’est aussi promenée autour de la longue remorque et a palpé en plusieurs points la cargaison dissimulée aux regards sous des bâches bleues. « C’est un chargement de machines industrielles fabriquées en Turquie», constate-t-elle. L’instinct de la douanière, intégrée à une brigade de renfort saisonnier qui est « détachée l’hiver à la montagne et l’été à la mer», et ses 31 ans d’expérience lui dictent que tout est normal. Le semi-remorque peut gagner le parking de dédouanement où le transporteur choisira de payer les droits de douanes (TVA notamment) en France ou de les payer (comme c’est le plus souvent le cas) dans le pays de destination. Un bus vide passe. Le deuxième camion, chargé de sept voitures Peugeot neuves, est immatriculé en Géorgie d’où il vient via la Turquie. Il a pour destination Lyon. C’est là que seront effectuées les formalités de dédouanement. Les quatre douaniers l’arrêtent. «Notre cellule de ciblage, je ne vous dirais pas pour quelle raison, l’a identifié comme potentiellement suspect», confie Muriel. Pendant de longues minutes, les douaniers, qui n’hésitent pas à grimper sur la remorque, inspectent l’intérieur de véhicules sélectionnés aléatoirement. Ils se font ouvrir portes ou coffre par le chauffeur géorgien. Comme pour cette berline située en hauteur: « Je l’ai choisie parce qu’elle est difficile d’accès», glisse la douanière. Cette fois, la cellule de ciblage nationale qui officie avec un taux de réussite de 50 % s’est trompée. Le camion part vers la zone de dédouanement qui sera une aire de transit pour lui. Les douaniers reprennent leur poste. C’est leur quotidien trois jours par semaine. (1) Pour respecter l’anonymat des agents, seul leur prénom sera mentionné.