Var-Matin (Grand Toulon)

Bactérie tueuse d’oliviers: des avancées dans la lutte

L’équipe d’étudiants d’Aix-Marseille et l’Institut de microbiolo­gie de la Méditerran­née, unis pour éradiquer la Xylella fastidiosa ont obtenu des “résultats prometteur­s”. Les recherches continuent

- JEAN-MARC VINCENTI

Six mois de recherches théorique et trois mois d’expériment­ations en laboratoir­e pour éradiquer la bactérie tueuse de végétaux Xylella fastidiosa. Ce n’était hélas pas assez. Faute de disposer de plus de temps, les étudiants chercheurs d’Aix-Marseille Université soutenus par Var-matin, qui ont uni leurs compétence­s scientifiq­ues l’année dernière pour cibler et éliminer cette bactérie s’attaquant à près de 150 espèces végétales (dont les oliviers et la vigne) qu’elle tue en les parasitant, n’ont pas pu arriver au bout de leurs recherches.

Boston en novembre

Malgré tout, les premiers résultats obtenus sont jugés très prometteur­s par le professeur James Sturgis, enseignant chercheur, directeur du laboratoir­e d’ingénierie des systèmes macromocul­aires de l’Institut de microbiolo­gie de la Méditerran­ée (IMM) à Marseille. «Toute une série d’expérience­s montre que ça pourrait bien marcher», résume-t-il. C’est sous sa prestigieu­se tutelle scientifiq­ue que, pour développer le projet qu’ils ont nommé « Kill XYL », les étudiants en chimie, informatiq­ue, bio informatiq­ue, électroniq­ue, bio électroniq­ue, de niveaux bac+2 à doctorant, se sont regroupés au sein de l’associatio­n Igem Amu 2017. L’acronyme du concours internatio­nal d’ingénierie en biologie synthétiqu­e «Internatio­nal geneticall­y engineed machines», créé par le Massachuse­tts institute of technologi­e (MIT) de Boston, auquel ils Un rythme soutenu pour relever le challenge. Les étudiants chercheurs ont privilégié deux axes de recherche. La bactérie Xyllela fastidiosa attaque la plante en s’installant dans ses xylènes, les vaisseaux sanguins du végétal. Elle agit en tissant un biofilm (tissu matriciel) qui la protège de l’environnem­ent mais qui étouffe la plante. Pour tuer la bactérie et libérer la plante du biofilm, la première piste consiste à utiliser un phage (ou enzyme). C’est un virus, sans danger pour l’homme et présent dans la nature, qui attaquera uniquement la Xylella fastidiosa sans affecter les autres bactéries. participen­t comme plusieurs milliers d’étudiants du monde entier. « Un concours dans lequel ils conservent toutes leurs chances de médaille et où ils sont certains d’obtenir une récompense», assure le Pr Sturgis, dont des équipes d’étudiants engagées depuis trois ans dans la compétitio­n scientifiq­ue ont à chaque fois été récompensé­es. Tandis que les étudiants encore motivés – de trente au départ de l’aventure, il en reste seize à l’arrivée – se La deuxième piste de recherche vise à empêcher les bactéries de Xylella fastidiosa présentes dans la plante de communique­r entre elles. Et ce, via un acide gras. Dans cette hypothèse, les bactéries arrêtent de produire des biofilms et de se propager. Dans le laboratoir­e que dirige le Pr Sturgis, à l’Institut de microbiolo­gie de la Méditerran­ée, les expérience­s menées par une équipe de dix étudiants, dont certains n’avaient jamais manipulé, ont duré trois mois. « On a d’abord construit un kit pour réaliser le projet, en se dotant des préparent à partir en novembre pour le Giant Jamboree, la convention du MIT à Boston, où du 7 au 14 novembre ils exposeront leurs conclusion­s, leurs recherches ne s’interrompe­nt pas.

Les Corses intéressés

Une bonne nouvelle, et une reconnaiss­ance du chemin parcouru : «L’une des équipes de biochimist­es de l’université de Corte, en Corse, où je me suis rendu, est intéressée par ces travaux et va financer un stage de six mois, lors duquel l’année prochaine un étudiant de niveau master, dont nous aurons ciblé la compétence au regard des premiers résultats obtenus, poursuivra les recherches », se félicite le Pr Sturgis. Au-delà de l’aspect de la compétitio­n scientifiq­ue, les étudiants encore engagés dans le projet confient que l’expérience acquise a été riche, qu’ils ont beaucoup appris sur leurs limites, sur le travail d’équipe notamment, en explorant divers domaines de compétence­s. « C’est important aussi en matière de

différents outils nécessaire­s pour produire les enzymes dont nous avons besoin et réalisé des tests », expliquent Camille Garcia, manager du projet, étudiante en master  de biochimie structurel­le à Luminy et Martin Mestdagh, étudiant en master  de bio informatiq­ue, à qui elle a succédé à ce poste.

Travail sur une bactérie voisine

Les chercheurs, qui ne disposaien­t pas des accréditat­ions pour accéder à la bactérie visée (trop dangereuse) ont travaillé avec une de ses cousines, «la Xanthomona­s campestris, très proche de la Xylella fastidiosa, qui produit elle aussi du biofilm. Une bactérie très répandue qui réseau internatio­nal et au niveau de leur futur carnet d’adresse», assure le Pr Sturgis. Les jeunes chercheurs ont notamment déjà interagi avec des équipes étrangères et françaises engagées dans le concours du MIT... « Cet été nous avons invité des équipes de pays méditerran­éens (Université­s d’Aïfa en Israël, de Valence en Espagne et de Bordeaux) à venir nous présenter leur sujet», souligne Camille Garcia, manager du projet. «Nous avons aussi été invités à Paris, fin juillet, à rencontrer d’autres équipes françaises », ajoute Martin Mestdagh qui l’assiste. Un bon entraîneme­nt puisque les échanges se faisaient en anglais. Et le cycle continue... Déjà des étudiants se sont rapprochés du Pr James Sturgis pour mettre en oeuvre un nouveau projet dans le cadre d’une cinquième participat­ion l’année prochaine au concours internatio­nal du MIT. «Un nouveau projet qui démarrera en janvier », observe le chercheur. Var-matin l’accompagne­ra.

agit notamment sur les choux dont elle est responsabl­e de la nécrose des feuilles ». Pas très grave et sans danger donc. L’un des aspects de leur travail était axé sur la sécurité du produit utilisé qui ne doit pas polluer l’environnem­ent. « Des tests de longévité du produit dans de la terre collectée chez un oléiculteu­r ont également été réalisés, complètent les deux étudiants. On a observé que le produit avait une durée de vie de quelques jours. » « Les résultats prometteur­s ont été obtenus en matière de distributi­on et de circulatio­n des produits dans les plantes », synthétise le Pr Sturgis, alors que certains tests étaient toujours en cours.

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(Photos J.-M. V.) De g. à d. : le Pr James Sturgis, Camille Garcia et Martin Mestdagh.

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