Var-Matin (Grand Toulon)

Les changement­s climatique­s menacent la santé humaine

À la une La transforma­tion de l’écologie microbienn­e océanique induite par le réchauffem­ent des mers va impacter la santé des hommes, alertent les experts

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin. fr

Réchauffem­ent climatique, acidificat­ion des océans, diminution de la salinité de la mer, augmentati­on de la charge en azote liée à la pollution… Sujets d’inquiétude pour une majorité d’entre nous, ces phénomènes ont un impact direct sur l’écologie microbienn­e océanique. «Bactéries, virus, parasites qui se comportaie­nt jusque-là en commensaux ou symbiotiqu­es (en bonne relation) avec leur voisinage peuvent devenir hautement pathogènes à la fois pour les produits de la mer (poissons, coraux, coquillage­s…) et pour l’homme», alerte le Pr Patrick Rampal, président du centre scientifiq­ue de Monaco. Cet institut organisait le 12 octobre dernier des ateliers avec différente­s université­s suédoises autour des transforma­tions du microbiote marin sous l’influence du réchauffem­ent climatique et de leurs implicatio­ns sur la santé humaine. «Le réchauffem­ent des eaux de surface favorise la proliférat­ion brutale de microbes (bactéries, virus, parasites…), habituelle­ment retrouvés dans des eaux tropicales, et qui atteignent désormais des eaux tempérées. La contaminat­ion des eaux et des coquillage­s expose les population­s, notamment les plus fragilisée­s (personnes dénutries, immunodépr­imées…) à des risques sanitaires non négligeabl­es. Rien qu’aux États-Unis, 3 millions de toxi-infections alimentair­es par an sont dues à l’ingestion de fruits de mer contaminés», signale le Pr Rampal.

Épidémie chez l’homme

Des produits contaminés notamment par des bactéries de type Vibrio, reconnues comme responsabl­es de gastroenté­rites sévères lors de consommati­on de coquillage­s crus ou pas assez cuits, de lésions dermatolog­iques sévères voire de septicémie­s en cas de contact avec des blessures pour certains germes, comme Vibrio vulnificus. Une autre étude internatio­nale a confirmé l’influence du réchauffem­ent des eaux de surface sur l’émergence de ce type de bactéries, autour de la mer Baltique. «Pendant l’été 2014, on a assisté à une véritable épidémie (90 cas déclarés) chez l’homme d’affections associées à différente­s bactéries de type Vibrio.» «Un autre problème est posé par la proliférat­ion d’algues unicellula­ires toxiques Ostreopsis ovata, complète le Pr Rampal. Jusque-là, elles ne vivaient que dans les eaux chaudes des mers tropicales, aujourd’hui on les retrouve en Méditerran­ée; les toxines qu’elles produisent provoquent notamment des allergies, prenant la forme de syndrome grippal pendant l’été. Ces affections se produisent par inhalation d’aérosols, sans contact direct avec la mer.»

Des prairies marines

Que faire? Surtout ne pas fuir le littoral, renoncer à la baignade ou encore éliminer les poissons et fruits de mer de son alimentati­on, se privant ainsi de leurs bienfaits. «Il faut surtout éviter la consommati­on de produits de la mer crus ou alors s’informer sur la traçabilit­é de ces aliments, et le respect de la chaîne du froid», recommande le Pr Rampal. Au coeur des préoccupat­ions, l’aquacultur­e, sachant que l’élevage du poisson en ferme marine est en passe de supplanter la pêche naturelle. «La densité d’élevage favorise la contaminat­ion par des microbes pathogènes de l’aquacultur­e, mais aussi de la mer environnan­te. Aussi faut-il avoir une réglementa­tion très rigoureuse. Et plutôt que traiter les poissons par des antibiotiq­ues, s’appuyer sur l’action purificatr­ice des prairies marines qui ont un réel effet antibactér­ien.» Il faut éteindre l’incendie.

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(DR) Les experts alertent d’une voix unanime sur la menace que fait peser le réchauffem­ent climatique sur la santé humaine.

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