Var-Matin (Grand Toulon)

Samu Manoa, le grand huit

De retour à son poste de prédilecti­on, en numéro 8, l’Américain du RCT semble revivre depuis le début de la saison, sa troisième au club. « Je veux marquer mon territoire », clame-t-il

- PHILIPPE BERSIA

Mardi, 13 h 45, fin de l’entraîneme­nt du RCT. L’Américain Samu Manoa s’est engagé à répondre à nos questions. Le « Mec » est profession­nel et va s’y plier. Mais l’exercice n’est pas vraiment sa tasse de thé. On le sent, on le sait. On lui propose de s’asseoir sur un muret, il décline poliment en arguant qu’il doit filer à la douche en suivant. L’entretien express se déroule donc dans les couloirs de Berg, debout, avec l’aide précieuse de Tom Whitford. Tout à côté, le bureau de Luc le Belge d’où s’échappe un standard de Bob Marley. La musique crie à tue-tête, Samu Manoa, bonnet vissé sur la tête, nous toise de ses 2,01 m pour 124 kg. Il semble apprécier le reggae. Ce qu’il nous confirme dans un grand sourire.

Dents en or et faux départ

Avec ses habituelle­s casquettes de base-ball, ses tatouages de bad boy et maintenant ses dents du bas en or, on l’aurait plus facilement imaginé en rappeur... Mais l’un n’empêche pas l’autre évidemment. Né à Concord en Californie, Manoa est resté profondéme­nt attaché aux États-Unis. Sept ans après son départ de la West Coast pour Northampto­n, et trois après son arrivée au RCT, il continue de souffrir de l’éloignemen­t de l’Oncle Sam. Sa famille, d’origine tongienne, lui manque et le « way of life » aussi, même s’il concède facilement apprécier la région et la météo à Toulon. Cet été, il a même flippé « grave » pour les siens quand les incendies ont ravagé les abords d’Hollywood. Mais tout est finalement rentré dans l’ordre et, chez lui, il n’y a pas eu de victime. Un vrai soulagemen­t pour ce père de cinq enfants très attaché à ses proches et à ses racines. Le dernier des Manoa, le petit Imani, est né à Toulon. Il a failli très vite « quitter la raison ». Car après trois années de compétitio­n, pas aussi concluante­s qu’il l’aurait espéré, son père a envisagé de déménager pour tenter de relever un nouveau challenge… Le Stade toulousain, intéressé par le profil surpuissan­t et polyvalent de Manoa (il peut jouer deuxième comme troisième ligne), s’était positionné. Et il se disait alors que Mourad Boudjellal, qui à l’origine l’avait fait signer quatre ans, ne serait pas contre un départ anticipé. Il est vrai que le public de Toulon n’a jamais vraiment vu le phénomène annoncé : le troisième ligne centre qui traversait les rucks et les terrains de Premiershi­p en Angleterre et qui devait créer la sensation en Top 14. Souvent utilisé en deuxième ligne, freiné par des blessures comme l’an dernier où sa saison s’est arrêtée en février sur une fracture de l’avant-bras, Manoa avait de quoi être un peu frustré. Comme le président du RCT.

« J’ai un peu douté à l’intersaiso­n »

« C’est vrai, j’ai un peu douté à l’intersaiso­n et on a pu avoir l’impression que j’allais partir, mais je ne voulais pas. Je suis content ici », confirme Manoa que l’on sent effectivem­ent plutôt bien dans ses crampons en ce début de saison. L’homme affirme qu’il n’a pas changé. Mais comme Mathieu Bastareaud, à 32 ans, il semble avoir bien grandi depuis son arrivée au RCT. Et puis, Fabien Galthié l’a relancé à son poste préféré. « J’ai toujours joué en 8, précise ce gros manieur de ballon. C’est mon poste préféré, mais si on a besoin de mois ailleurs, bien sûr que je jouerai volontiers… » Peut-être. Mais en ce début de saison, Manoa semble quand même plus à son aise et à son avantage en troisième ligne. Bien qu’à nouveau stoppé dans sa progressio­n par un problème musculaire au mollet qui l’a tenu éloigné des terrains trois semaines, il a repris toute sa place dans l’effectif cinq étoiles du RCT. Et il compte bien la défendre malgré la concurrenc­e, parfaiteme­nt conscient qu’il n’a encore pas tout donné dans ce club. « C’est vrai, reconnaît l’internatio­nal américain. J’essaie de marquer mon territoire, mais c’est compliqué. Aujourd’hui, ça va mais il faut que je joue plus... » Et puis, il faudrait aussi qu’il gagne un trophée pour atteindre l’objectif fixé à son arrivée au RCT. Preuve qu’il n’a renié aucune ambition et se sent de nouveau très motivé par le challenge toulonnais, avant de s’éclipser, Manoa nous lâche dans un grand éclat de rire : «Jeveux juste gagner le Top 14 et la coupe d’Europe ! » Cinq minutes et quaranteci­nq secondes viennent de s’écouler. Il se fend d’un « check » sympa et tourne les talons. Vite, la douche va refroidir, le match l’attend déjà.

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(Photos Dominique Leriche) Samu Manoa est reparti pour un tour au RCT.

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