Var-Matin (Grand Toulon)

Université­s: la sélection en question

- Par MICHÈLE COTTA

Sélection ou non-sélection ? Une chose est certaine, c’est que le système de l’entrée à l’université tel qu’il fonctionne a fait depuis des années la preuve de son inefficaci­té et surtout de son hypocrisie. Le mot seul, sélection, fait monter la températur­e des syndicats étudiants qui affirment vouloir lutter, bec et ongles contre tout système qui limite ou même oriente tous les futurs étudiants, à peine leur baccalauré­at en poche, vers les études supérieure­s. Et pourtant, le système actuel est de loin le plus aléatoire et le plus injuste. D’abord parce qu’il commence par un tirage au sort, basé sur l’algorithme baptisé APB, pratiqué pour départager le nombre des candidats en licence lorsque les places manquent dans telle ou telle discipline. Quoi de plus injuste que de tirer à la courte paille, fut-elle algorithmi­que, ceux qui peuvent avoir accès à l’université et ceux à qui cela est refusé ? Injuste, ce système est de plus hypocrite, car il n’est pas généralisé à tout l’enseigneme­nt supérieur. La sélection sur critères académique­s existe déjà et pas seulement par l’existence de classes préparatoi­res à l’entrée, sur concours, dans les grandes écoles. Elle existe aussi pour les technicien­s supérieurs candidats aux BTS. Elle existe même dans certains lycées profession­nels, où, on ne le sait pas toujours, une sélection se fait à l’entrée de certaines discipline­s trop demandées, comme les formations prévues pour les esthéticie­nnes, où les places sont plus limitées que les demandes. Et enfin, le système actuel est inefficace, et même dangereux, car il organise en réalité une autre sorte de sélection qui ne dit pas son nom : la sélection par l’échec. Le taux moyen d’échec aux licences est de  %. Chaque année, plus de  % des étudiants inscrits en première année de médecine échouent à passer en seconde année. En droit, le taux d’échec à l’issue de la première année est comparable. Il n’est donc pas rare de trouver des étudiants en panne au bout de deux ou trois ans, ou pire encore, qui ne trouvent pas d’emplois après avoir opté pour des filières peu porteuses. Voilà pourquoi la réforme qui vient d’être proposée par le Premier ministre et la ministre de l’Enseigneme­nt supérieur semble aller dans le sens de la sagesse. Il s’agit plus de conseils donnés dès le secondaire aux lycéens : chacun formulerai­t ses voeux, une dizaine seulement, durant son année de terminale, leurs professeur­s émettraien­t des avis, favorables ou dubitatifs, sur ces voeux, avant que les dossiers ne remontent aux établissem­ents d’enseigneme­nt supérieur. Le lycéen aurait certes le droit de maintenir sa déterminat­ion, mais il pourrait être fermement incité à suivre une remise à niveau. Même si, à peine le texte de la réforme présenté, un des plus importants syndicats étudiants, l’UNEF, s’inquiète des contrainte­s fixées aux aspirants aux études supérieure­s. Les mesures proposées semblent néanmoins de simple bon sens : établir une passerelle entre le secondaire et le supérieur, et surtout gérer les échecs et les frustratio­ns de ceux qui jettent l’éponge, sans rien dans les poches, après avoir suivi une mauvaise piste.

« La réforme qui vient d’être proposée par le Premier ministre et la ministre de l’Enseigneme­nt supérieur semble aller dans le sens de la sagesse. »

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