Var-Matin (Grand Toulon)

ERIC GALLIANO

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L’aval du ministre ?

Car tel est le montant que la société Promosaga a dû acquitter pour devenir propriétai­re de douze des quinze villas de la cité Mistral, la municipali­té de Saint-Tropez ayant décidé de faire valoir son droit de priorité sur les trois restantes (lire par ailleurs). C’est en effet cette société constituée pour l’occasion, en mars 2014, par un homme d’affaires libanais, Gabriel Sahyoun, qui a emporté le gros lot. Ils étaient pourtant nombreux à avoir répondu à l’appel d’offres de DCNS. Et non des moindres ! Il se murmure que François Pinault et Vincent Bolloré faisaient partie de la douzaine de candidats à se disputer cette belle affaire immobilièr­e. Le marchand de biens niçois Pierre Reynaud était lui aussi sur les rangs. Et pour ce profession­nel de l’immobilier le choix de DCNS est « incompréhe­nsible »:« Seul l’un des quatre grands groupes en compétitio­n pouvait l’emporter... Sauf interventi­on politique. » Car pour Pierre Reynaud, une telle vente par une société dont il rappelle que l’État est l’actionnair­e majoritair­e, « ne pouvait se faire sans l’aval du ministre de tutelle ».

« Aucune assise financière »

Et d’ajouter : « Ce qui paraît surprenant c’est qu’ils aient cautionné l’offre d’un candidat qui n’avait aucune assise financière. » Les concurrent­s malchanceu­x ont parfois la dent dure, mais le fait est que l’acheteur libanais, Gabriel Sahyoun, tentait surtout à l’époque d’éviter le dépôt de bilan. Il affichait un solde débiteur de plus de deux millions d’euros à la banque Havilland qui a racheté la Pasche Monaco et semblait avoir bien du mal à rembourser les échéances de ses prêts. Pourtant c’est rubis sur l’ongle qu’il s’acquitte, le 2 juin 2014, des 17 millions d’euros de la cité Mistral. « Prix payé comptant et quittance à l’acte», précise le notaire du 8e arrondisse­ment de Paris qui enregistre l’acte de cession avec la DCNS.

Un Libanais peut en cacher un autre

Où Sahyoun a-t-il pu trouver une somme pareille ? C’est la question que se posent tous ses concurrent­s malchanceu­x. La réponse, elle se trouve peut-être dans un procès-verbal de l’assemblée générale extraordin­aire que la société Promosaga a tenu le 3 juin, soit 24 heures à peine après avoir acheté la cité Mistral. Du moins furtivemen­t. Car l’unique actionnair­e de Promosaga, Gabriel Sahyoun, décide alors de céder 51 % de ses parts à une autre société, la Fimas, détenue cette fois par Iskandar Safa. Décidément un Libanais peut en cacher un autre. C’est ainsi que l’ancien marchand d’armes reconverti dans l’immobilier se retrouve propriétai­re de cet ensemble immobilier pour l’acquisitio­n duquel il n’avait pourtant pas candidaté! Et c’est peut-être le fond du problème. Car dans son appel d’offres, DCNS avait pris le soin d’imposer aux candidats des clauses pour justement éviter les faux nez. Reste à savoir quel intérêt aurait pu avoir le milliardai­re Iskander Safa à avancer masqué? C’est peut-être là l’une des questions susceptibl­es d’intéresser aujourd’hui la justice. Tout comme celle de savoir pourquoi, contre toute attente, c’est le plus « improbable » des candidats qui a remporté l’appel d’offres. Y a-til eu interventi­on politique ? Au niveau local il est vrai que la Ville a également fait une très jolie opération financière à l’occasion de la cession de la cité Mistral. Mais les relations du libanais Iskandar Safa dépassent sans aucun doute le microcosme tropézien. Contactés, la société Promosaga et le directeur général de Fimas et la mairie de Saint-Tropez n’ont pas souhaité donner suite à nos appels

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Le plan de masse de la cité Mistral tel qu’il figurait dans l’appel d’offres, faisant apparaître des villas de luxe et, en bas, les logements collectifs que la Ville avait annoncé envisager de construire à la place des trois villas qu’elle avait...

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