Var-Matin (Grand Toulon)

«Le sabordage a changé ma vie!»

Marcelle Palix, 92 ans, veuve d’officier de Marine, 16 ans lors du sabordage

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« À cette époque, j’étais au lycée de jeunes filles de Toulon, l’actuel lycée Bonaparte. Mais j’habitais à La Seyne, juste sur le quai. Le  novembre, on savait déjà par des “on-dit” que les Allemands étaient à Ollioules. Dans la nuit, mon père s’est levé en premier. Il m’a réveillée et m’a lancé : “Il y a des soldats partout !” Mais moi, je croyais que c’était les Américains, ils avaient débarqué en Afrique du Nord ! “Mais non !”, m’a-t-il répondu. J’ai regardé à travers les volets : c’était plein de chars allemands ! Et là, tout à coup, vers  heures, paf ! Ça a sauté, ça a brûlé, ça a explosé ! Mon père m’a dit : “Ça y est, ils se sabordent !” Mon père a essayé de sortir sur le port, mais les soldats l’en ont empêché. Je me souviens aussi de militaires français qui se déshabilla­ient pour ne pas se faire attraper. Le Strasbourg coulait tout droit. Des bateaux brûlaient, d’autres étaient renversés. À ce moment, j’ai eu de la haine pour les Allemands… Très vite, on n’a plus rien vu sur la rade, il y avait des fumées noires partout. Le lendemain du sabordage, mon père, qui travaillai­t au centre des torpilles du Mourillon, a photograph­ié le Strasbourg et a réalisé, dans la cave de la maison, une affiche avec son groupe de résistance. On peut y lire “Pavillon haut malgré tout !” Suite au sabordage, je n’ai plus pu aller au lycée, ni devenir pharmacien­ne. J’ai travaillé aux impôts et épousé un officier de Marine. Le sabordage a changé ma vie. »

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