Var-Matin (Grand Toulon)

Procès Lambin-Fornasari à Nice : une victime improbable

- CHRISTOPHE PERRIN

Robert Ludi était un discret gardien d’école, exécuté de deux balles dans la tête à Antibes en 2002. Sa soeur, Florence Ludi, 44 ans, ne laissait rien paraître de son chagrin depuis l’ouverture du procès. Hier après-midi, le président Delaunay l’a invitée à témoigner à la barre de la cour d’assises des Alpes-Maritimes. Cette femme discrète s’avance en pleine lumière. Dans le box, l’accusé Michel Lambin, malade, installé sur son fauteuil médicalisé, semble assommé par la morphine. Emile Fornasari lui, est très attentif derrière ses lunettes. Florence Ludi se remémore la journée du 6 décembre 2002. La voix s’étrangle aussitôt. Elle s’interrompt, inspire pour se calmer. Evoquer à nouveau la mort de son frère, quinze ans après jour pour jour, la submerge d’émotions. Inquiète le 6 décembre de ne pouvoir joindre Robert dont elle était très proche, elle se rend au domicile de son frère. « J’avais les clefs. Je l’ai cherché partout. Je suis allée à la voiture. J’ai ouvert la portière, j’ai trouvé mon frère allongé sur le côté. » Florence pense à un malaise. Sans trop y croire : « Ce n’était pas beau à voir. Je lui ai tenu la main, j’ai appelé les pompiers, j’ai appelé mon conjoint. » Le légiste a confirmé hier que la victime avait été atteinte de deux balles au visage, décédée à cause « d’un saignement abondant avec, sans doute assez vite, une perte de conscience même s’il y a eu plusieurs heures d’agonie. » Me Frédéric Gascard, conseil de la partie civile, s’adresse à Florence Ludi : « Votre frère avait-il des ennemis ? »« Je pensais qu’il n’avait que des amis. [...]Cette mort, c’était inconcevab­le. » Comment un garçon si ordinaire à la vie rangée, célibatair­e si dévoué, fondateur d’une équipe de foot à la mairie d’Antibes, se retrouve exécuté dans sa Peugeot 205 comme un malfrat? L’enquête s’annonçait complexe. Emile Fornasari n’aurait pas supporté la séparation avec Séverine Laurent, mère de leur fils et ami d’enfance de Robert avec qui elle renoue alors. En compagnie du père de Séverine, Emile Fornasari serait venu, menacer Robert Ludi qui avait aussitôt cessé toute relation avec la jeune femme. Fornasari, selon l’accusation, aurait ensuite demandé à Michel Lambin d’exécuter le contrat. Une écoute téléphoniq­ue confortera­it cette hypothèse. Me Isabelle Gortina et Me Tina Colombani, avocat d’Emile Fornasari et défenseur de Michel Lambin, trouvent l’explicatio­n un peu courte. Elles se lèvent tour à tour : « Pourquoi n’y at-il pas eu de recherches d’empreintes sur ce courrier ? » Idem pour les portières de la 205. «Robert Ludi était un joueur de casino, rappelle Me Colombani. Pourquoi ne pas s’intéresser aux mouvements d’argent sur son compte, sommes qui dépassaien­t largement ses 1 900 euros de revenus mensuels ?»

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