Var-Matin (Grand Toulon)

parcours semé de dangers « J’ai été mis dans la cage des porcs »

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« Dans la province de Laghmân, à côté de Kaboul, je distribuai­s l’essence aux véhicules militaires américains. Je remplissai­s mon camion de fuel et j’allais jusqu’à une de leur base. Les talibans étaient venus menacer mon père à cause de mon travail, mais j’avais décidé de continuer malgré tout. Mais j’ai dû quitter l’Afghanista­n parce que j’ai refusé de poser une bombe dans la base des Américains et en représaill­es, les talibans ont exécuté mon petit frère de  ans... J’ai vendu un terrain et payé   dollars pour aller jusqu’en Europe. Ce qui a été délicat, c’est le passage de la Bulgarie. J’ai passé la frontière à pied, avec dix-sept réfugiés et deux passeurs. Il faisait froid, c’était l’automne… On marchait de nuit, dans la forêt. Soudain, des policiers nous ont tiré dessus. Deux d’entre eux nous ont sommés, en anglais, de nous arrêter. Pendant une demi-heure, j’ai couru dans la forêt avec une autre personne. On a entendu des aboiements, on a grimpé aux arbres. Les policiers ont menacé de nous tirer dessus, alors on est descendu, mais les chiens nous ont attaqués ! J’ai caché mon visage, les chiens nous ont mordus. Les policiers, eux, rigolaient… Leur chef nous a donné des coups de pieds sur tout le corps, il m’a cassé deux doigts. Avec trois autres réfugiés qu’ils avaient réussi à attraper, ils nous ont ensuite embarqués dans des voitures et nous ont conduits jusqu’à un poste de police. A côté, il y avait une sorte de salle, immonde et froide. Elle était composée de trois murs et d’une grille, comme une cage. Ils nous ont mis tous les cinq dedans et un des policiers m’a dit : “Tu es musulman ? Eh bien c’est là qu’on garde les porcs !” On est resté quelques jours, enfermés dans cette salle, sans couverture, avec un peu de pain et d’eau. On était blessés, mais ils ne nous ont rien donné pour nous soigner. Ils ne sont pas humains… Après quelques jours, ils nous ont renvoyés en Turquie en nous disant : “ne repassez pas par la Bulgarie ou on vous tue !” Après un passage par la Turquie, j’ai finalement réussi à passer la Bulgarie et je suis arrivé jusqu’en France. Je compte y rester et devenir chauffeur. J’ai eu de la chance : mes empreintes n’ont été relevées nulle part et j’ai eu un titre de séjour d’un an. Mais j’ai peur que mes enfants restés en Afghanista­n ne se fassent recruter par Daesh... » LE SYSTEME DE DUBLIN

Le système de Dublin, dit Dublin III, est organisé par le règlement européen n°/, adopté le  juin .

Il s’agit d’une procédure nonobligat­oire de gestion des demandeurs d’asile, en vigueur dans les pays de l’Union européenne et quelques autres pays d’Europe.

Ce système prévoit que les réfugiés présents dans un pays européen ne peuvent faire leur demande d’asile que dans un seul État d’Europe, en l’occurrence celui par lequel les réfugiés sont entrés sur le continent et ont été contrôlés. Il peut également s’agir du premier État européen ayant accordé un visa ou un titre de séjour. En pratique, souvent l’Italie.

Avant d’expulser un réfugié, la préfecture demande au pays dans lequel ce dernier a déposé ses empreintes s’il veut le récupérer. Au bout de deux mois de silence, cela vaut accord tacite. La France a alors six mois pour expulser le réfugié. Passé ce délai, il peut demander l’asile dans l’Hexagone.

Le  novembre, le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, a pris une circulaire dans laquelle il est notamment affirmé que la mise en oeuvre du règlement Dublin « revêt un enjeu majeur » et que « tout accord, implicite ou explicite de l’Etat membre requis, donne lieu à la notificati­on de l’arrêté de transfert ». Les responsabl­es associatif­s s’inquiètent pour leur part du transfert de réfugiés vers certains pays, tels que la Bulgarie et l’Italie.

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