Hôpital : une dérogation pour les heures sup’
Le centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne face à une crise hivernale a obtenu le feu vert du trésorier : depuis 24 heures, il peut dépasser le plafond d’heures supplémentaires
Àl’instar des hôpitaux publics, le centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne( CHITS) vit, depuis plusieurs semaines, une crise hivernale sans précédent pour faire face à l’afflux de patients aux urgences et dans les services (nos éditions précédentes). Le personnel de santé et sa direction, qui doivent, une fois encore, affronter un week-end «sous tension », ont raté de peu d’être asphyxiés par une décision réglementaire. Assouplie, depuis seulement 24 heures, la décision du trésorier a finalement mis l’hôpital sous perfusion, autorisant les personnels à dépasser le sacro-saint plafond mensuel des 15 heures supplémentaires.
Un décret qui irrite
Une décision tombée, avant-hier soir, après une mobilisation de la direction et des représentants syndicaux qui ont également alerté la députée Les Républicains Geneviève Levy, membre du conseil de surveillance. Le trésorier, début décembre, avait demandé à l’établissement, de ne pas dépasser le nombre d’heures supplémentaires, limité à 15 heures dans la fonction publique hospitalière conformément au décret de 2002.
(1) L’annonce avait soulevé une colère froide dans les rangs des personnels qui, dans une période sous tension, étaient volontaires à travailler plus. Après avoir fustigé « les restrictions budgétaires et les fermetures de lits à venir», induites par le projet de loi de finances de la sécurité sociale 2018, Vincent Carret, médecin urgentiste, délégué varois de l’Association des médecins urgentistes de France, a soulevé le malaise.
« Alors que le président de la République prône la valeur travail, on interdit aux personnels de l’hôpital, en période de crise, et qui en font la demande, de faire des heures supplémentaires. On ne respecte pas les équipes volontaires. On rêve, et on marche sur la tête dans ce pays », s’offusque-t-il.
La ministre de la Santé alertée
La décision d’appliquer stricto sensu la réglementation a eu pour conséquence d’avoir un recours majeur au personnel intérimaire (lire ci-contre). Blouses blanches et administration ont donc fait bloc pour demander une dérogation au décret de 2002. D’autant que la précédente datait de 2013 et donnait la possibilité d’étaler le paiement des heures supplémentaires, dépassant le plafond mensuel. En supprimant cette possibilité, le trésorier mettait l’hôpital dans une impasse : « La récupération des heures supplémentaires au-delà des 15 heures ou 18 heures est irréalisable en raison de la limitation des effectifs », alerte FO. La députée Geneviève Levy qui «connaît très bien les problèmes de l’hôpital » a adressé un courrier daté d’hier à la ministre de la Santé. Elle a insisté sur « la mise en oeuvre des heures supplémentaires surtout quand elles s’avèrent importantes, comme c’est le cas en période de crise. »« La prise en compte des bons élèves n’est malheureusement pas suffisamment probante pour permettre un fonctionnement dans les périodes de crise avec toute la volonté et l’engagement du personnel », a-t-elle déploré, regrettant une « Agence régionale de santé pas suffisamment à l’écoute des besoins et de la marche à suivre ». La rencontre, avant-hier, entre le directeur Michel Perrot et le trésorier a finalement abouti à assouplir une décision jugée bien trop rigide dans les rangs des blouses blanches et du service des urgences. S’il a finalement accepté de revenir sur sa décision, « sa position reste dérogatoire », met en garde JeanEric Lodevic, secrétaire général de FO. « Malgré la nécessité de garantir l’offre de soins et la continuité du service public hospitalier, le décret concernant la fonction publique hospitalière est plus restrictif que celui de la fonction publique d’État ou territoriale (plafonnées, elles, à 25 heures) » , déplore t-il.
Un plafond trop bas
«Cela fait un delta relativement important, reconnaît Frédéric Rodriguez, secrétaire général du CHITS. Cela conduit à ce qu’il y ait des contraintes d’organisations avec ce plafond plus bas dans la fonction publique hospitalière.» Les personnels sont contraints de mener de front les combats tout en devant gérer des situations critiques. « Nous avons la capacité hospitalière en aval des urgences grâce aux actions que nous avons menées tout au long de la semaine. Cela nous a permis d’améliorer la situation de prise en charge. La situation reste sous contrôle», assure Frédéric Rodriguez. 1. 18 heures par mois pour les infirmiers spécialisés, les sages-femmes et les manipulateurs en radiologie.