À Salon, les «Prophéties» de Nostradamus pour Nice, Monaco, La Seyne et Antibes
Au pied de son château de l’Emperi, Salon-de-Provence enroule le dédale de ses vieilles rues. Attiré comme par un aimant, le visiteur se retrouve inévitablement au numéro 2 de la petite rue Nostradamus. C’est là qu’a vécu, de 1547 à sa mort en 1566, le célèbre auteur des « Prophéties ». La maison a été transformée en musée. Aussitôt franchi le seuil de la demeure, on est pris par une atmosphère mystérieuse. On imagine le médecin barbu coiffé d’un bonnet noir, retiré au milieu des grimoires de sa bibliothèque tandis qu’au dehors les rafales de mistral font trembler les murs. Le crâne traversé de tempêtes, il classe ses pensées dans d’obscurs quatrains, lançant aux siècles futurs le défi d’en démêler les secrets. Mme Bertrand-Hardy, directrice de la maison, a une analyse scientifique et raisonnable du travail et des écrits du personnage: « Nostradamus a écrit des textes volontairement énigmatiques qui constituaient peutêtre une mise en garde adressée aux hommes de son temps. D’une certaine façon, les guerres de religion lui ont donné raison. On a voulu y voir une annonce d’événements à venir, mais toutes ces interprétations ont toujours été faites après coup. On peut voir par exemple toutes les erreurs qui ont été commises par ceux qui croyaient y déceler à l’avance l’annonce de la fin du monde au moment de l’an 2000 ! »
Sollicité par Catherine Médicis et Charles IX
Qui est-il, cet énigmatique Nostradamus ? Nommé Michel de Nostredame, il est né à 1 503 à Saint-Rémy-deProvence. Son grand-père, juif, s’est converti au catholicisme. Il étudie à Avignon et à Montpellier puis voyage en France, étudiant plantes et maladies. Vers l’âge de 40 ans, il revient en Provence pour combattre la peste. En 1547, il se marie à Salon, dont un de ses six enfants deviendra le maire. Il exerce à Salon et dans la région son métier principal, qui est celui de médecin.
Catherine Médicis et le roi Charles IX lui rendent visite en 1 564 et sollicitent ses conseils Ses quatrains sont classés par groupe de cent appelés « Centuries ». Plusieurs concernent notre région. Quatrain 60 de la dixième Centurie : «Je pleure Nice, Monaco, Pise, Gênes :/Couvertes de sang, par la religion des armes,/Feu et bombardements, par terre et mer, malheureuse nuit. » À quel drame ramène cette prophétie ? On n’a pas vraiment la réponse. Quatrain 18 de la première Centurie : «Par la discorde et négligence française/Le passage à Mahomet sera ouvert/De sang trempé la terre et la mer Senoise/Le port phocéen, de voiles et de nefs sera couvert. »Le« Port phocéen » est Marseille, bien sûr, et la « mer senoise» certainement La Seyne. Quatrain 4 de la deuxième Centurie : « Depuis Monaco jusqu’à la Sicile,/Toutes plages seront désolées et ravagées/Il n’y aura aucune ville et faubourgs,/Que les Barbares n’auront pillées et volées ». Quatrain 87 de la dixième Centurie : « Grand Roy viendra prendre port près de Nice/Le grand empire de la mort si en fera/Aux antipolles posera son genisse/Par mer la Pille tout évanouira. » S’agit-il d’une évocation des attaques turques de Nice en 1543 commanditées par François 1er, ou une prophétie de la destruction du château de Nice par Louis XIV en 1705 ? Les deux derniers vers sont encore plus énigmatiques : « antipolles» désigne-t-il « Antibes » (« Antipolis »), « genisse » (« jeunesse ») étant le descendant du roy et « Pille » une appellation moyenâgeuse de l’Angleterre. Quatrain 82 de la troisième Centurie : « Lérins, Antibes, villes autour de Nice,/Seront dévastées fort par mer et par terre:/Les sauterelles feront/ Prisonniers, morts, volés, pillés sans loi de guerre ». Les « sauterelles » désignentelles des militaires de manière allégorique ou simplement les nuages d’insectes qui ravagèrent la région en 1613 ou 1749? Ces quatrains concernent-ils des événements qui ont déjà eu lieu ou sont à venir ? La question reste posée. En tout cas, ils sont peu rassurants ! ANDRÉ PEYREGNE
Maison de Nostradamus, ouverte de 9 heures à 12 heures et de 14 heures à 18 heures les lundi, mercredi, jeudi et vendredi. De 14 heures à 18 heures, les samedi et dimanche. Fermé le mardi. Tél. : 04. 90. 56. 64. 31.