Assises : quinze ans requis pour tentative d’assassinat
La cour d’assises du Var s’est retirée hier vers 19h30 pour délibérer sur le sort de Sylvia Martin et Fabrice Pietri, qui se sont affrontés dans une lutte sans merci pour la garde de leur fils
L’avocat général a requis quinze ans de réclusion criminelle hier, devant la cour d’assises du Var, contre Sylvia Martin, 32 ans, pour avoir tenté d’assassiner son ex-compagnon Fabrice Pietri, 44 ans, en l’égorgeant dans son lit la nuit du 8 juillet 2015 à son domicile de Draguignan. Estimant que la victime avait exercé sur son ex-compagne des violences graves, au-delà des nécessités de la légitime défense, l’avocat général a aussi requis que Fabrice Pietri soit également condamné à deux ans de prison, dont un an avec sursis et mise à l’épreuve.
Un anxieux et une psychotique
Les derniers experts entendus par la cour, des psychologues, ont pour l’essentiel confirmé le sentiment qu’avaient eu les psychiatres sur les personnalités des accusés. Ils ont balayé l’idée que Fabrice Pietri, qui avait été présenté par Sylvia Martin comme ayant une double personnalité, soit atteint de troubles pathologiques. Donc pas de schizophrénie, ni de bipolarité, mais un tempérament anxieux. S’agissant de Sylvia Martin, ils ont noté une défaillance de l’estime de soi, qui la conduisait à ne jamais se sentir à la hauteur. Jusqu’à la naissance de son fils, où elle s’est idéalisée en mère absolue et s’est accaparée l’enfant. Ils ont conclu à une structure psychotique de la personnalité, rejoignant l’avis du psychiatre qui avait conclu à une altération de son discernement.
Lutte inégale
Dans sa démonstration, l’avocat général Caroline Collet s’est appuyée sur les éléments matériels de la scène de crime sur lesquels les deux accusés étaient d’accord, chacun en tirant toutefois une vérité différente. « La lutte était inégale, a-t-elle souligné. Fabrice Pietri est en caleçon et tee-shirt dans son lit, sans arme, et se réveille face à Sylvia Martin alerte, en tenue de combat, armée d’un couteau, et qui lui tranche la gorge. » Pour Mme Collet, la préméditation débutait cinq jours avant les faits, au moment où la justice avait décidé que la garde de l’enfant était confiée à son père. « Elle était dos au mur. C’était l’expédition de la dernière chance. Plutôt que d’abandonner son enfant, elle a fait en sorte de se débarrasser définitivement du père. » Sur les violences reprochées à Fabrice Pietri, l’avocat général estimait qu’il s’était «acharné désespérément à vivre, mais a dépassé le cadre d’une défense proportionnée». Elle a fixé la frontière au moment où, après avoir rendu Sylvia Martin inconsciente en lui cognant la tête sur l’escalier, il lui avait de plus cassé le bras gauche. « C’est ce geste qui le fait sortir de la légitime défense pour basculer dans la vengeance. »
Les défenses dos à dos
Aux intérêts de Fabrice Pietri, qu’elle a assisté dans son combat pour récupérer son fils, Me Marie-Pierre Rougé a dressé de Sylvia Martin le portrait d’une femme «à l’allure fragile, mais préparée physiquement et mentalement, et déterminée à ne pas ramener l’enfant à son père ». « Il a dû lui faire mal pour sauver sa vie», a complété Me Virginie Pin. Selon elle, Fabrice Pietri était toujours dans le temps de la légitime défense quand il a cassé le bras de Sylvia Martin. « Elle a été prise par le cou et elle a été obligée de réagir avec une arme, a plaidé Me Cyril Malgras pour Sylvia Martin. Les apparences sont trompeuses. Ce sont seulement des violences volontaires avec arme. » Me Jean-Marc Darrigade a plaidé sur le mobile qui avait animé Sylvia Martin, pour se rendre en pleine nuit au domicile de son ex, en costume de ninja. « Elle était en quête du Graal, d’une preuve de son appétence au cannabis, pour faire comprendre au juge des affaires familiales qu’il fallait prendre plus de précautions avant de lui confier la garde de l’enfant.»