Alerte avalanche
A Auron, le peloton de gendarmerie de haute-montagne a orchestré un exercice de secours grandeur nature. CRS, pompiers et pisteurs y ont participé avec un même but : sauver des vies
Est-ce que tu as des ensevelis ? » Talkie-walkie à la main, concentration à son paroxysme, le capitaine Sarah Chelpi écoute la voix grésillarde lui répondre: « Il y en a au moins quatre sous la neige. Peut-être cinq... » Auron, piste du Riounet, à plus de 2 000 mètres d’altitude. Alerte avalanche. Alerte factice, fort heureusement. Ce lundi 15 janvier, sous un soleil généreux, les professionnels de la montagne se livrent à un exercice de secours grandeur nature. Précaution pas inutile : dans le Mercantour, l’alerte avalanche est actuellement de 3 sur une échelle de 5, à un niveau « marqué ». L’exercice est un classique en hiver. Mais celui-ci sort quelque peu de l’ordinaire. Tous les corps de secours sont réunis pour un entraînement commun. Initiative louable : dans les massifs des Alpes-Maritimes, la cohabitation entre gendarmes, policiers et pompiers suscite régulièrement des tensions. Rien de tel ici. Tous obéissent aux ordres fermes, mais bienveillants, du capitaine Chelpi. Cette jeune Cannoise, devenue il y a un an la première femme commandant un peloton de gendarmerie de haute-montagne (PGHM), est la chef d’orchestre des opérations du jour.
« En avant, sondez »
En lice : huit militaires du PGHM 06, trois autres du groupe montagne de la gendarmerie, trois policiers de la CRS Alpes, trois médecins du groupe milieu périlleux du Sdis 06, six pisteurs, deux chiens de détection, et l’hélicoptère de la gendarmerie de Digne. Leur mission : secourir cinq victimes ensevelies. C’est Hiss, le chien du PGHM, qui ouvre la piste. Et qui découvre un premier skieur. « Ça va monsieur ? Vous nous entendez ? » Les secours dégagent le mannequin, évaluent son pronostic vital, puis entreprennent de le médicaliser. L’opération va se répéter pour chaque « enseveli ». D’abord, les secours sillonnent la pente, traçant de grands « Z » dans la neige, les yeux rivés sur leur détecteur de victime d’avalanche(DVA). Une fois la zone ciblée, les sondeurs évoluent en rang serré, au coude à coude : « Allez on avance, deux par deux, et on sonde bien profond, exhorte le chef Rémi Castaings. Un pas en avant... Sondez ! » Dans les airs, Choucas 04 enchaîne les norias, acheminant sur place secouristes et matériel. Seuls deux « blessés » seront évacués en urgence absolue. Les trois autres « victimes » sont décédées. Les opérations auront duré 1 h 15. Un temps satisfaisant, de l’avis de tous, pour une simulation où les cinq victimes ont été retrouvées. Autre satisfaction : la coordination de la prise en charge médicale. « En revanche, on peut progresser sur les transmissions radio, reconnaît le capitaine Chelpi. Car tous les services n’ont pas la même fréquence. »
Se rôder ensemble
Pas la même fréquence. Mais un même esprit montagnard. Lundi, tous ces secouristes ont « réussi à travailler tous ensemble. C’était l’un des objectifs », salue Sarah Chelpi à l’heure du débriefing. Jean-Gabriel Delacroy, directeur de cabinet du préfet, passe saluer les troupes : « Cet exercice donne à ces services une habitude de travail en commun partagée. Cela permet de rôder les procédures et de s’articuler. » A charge pour les victimes potentielles de leur faciliter la tâche. Pour éviter l’accident, la pratique du hors piste doit rester limitée aux skieurs « formés, équipés, expérimentés et sachant réagir », dixit l’adjudant-chef Simon Ribel, du PGHM 06, qui a organisé l’exercice. Une fois enseveli, quelles chances de survie ? « C’est très aléatoire, reconnaît le lieutenant-colonel Sandra Lantelme, médecin-pompier. ça dépend de la qualité de la neige, du lieu, de la hauteur d’ensevelissement... Mais on sait que les quinze premières minutes sont primordiales. » Au-delà, les chances de survie sont divisées par deux.