Var-Matin (Grand Toulon)

Le mouvement de grève se durcit à la prison

À la prison varoise, c’est du jamais vu. Hier matin, des agents pénitentia­ires, surveillan­ts et autres personnels de l’établissem­ent ont refusé de prendre leur service. Une désobéissa­nce rare

- SONIA BONNIN sbonnin@varmatin.com

C’est l’agression de Borgo, qui a tout fait basculer. Hier matin, alors que les surveillan­ts de la prison de La Farlède bloquaient l’entrée de leur établissem­ent – mouvement de protestati­on entamé lundi dans toute la France – ils ont appris que deux de leurs collègues avaient été attaqués par des détenus, dans la prison de Borgo (Corse). Blessures sérieuses au thorax et au cou (voir en pages France). « L’établissem­ent était bloqué depuis 5 h 15 du matin, relate Ezechiel Terrier, délégué régional adjoint en Paca pour la CGT pénitentia­ire. Les forces de l’ordre nous ont délogés vers 10 h 15. Et dans le même temps, on a appris pour Borgo. On craignait même que le pronostic vital soit engagé, à ce moment-là .»

« Une telle action est exceptionn­elle »

Dans les rangs des surveillan­ts, la colère gronde. L’incident de trop ? Ils le disent et le répètent depuis des mois. Mais la succession des agressions ces derniers jours a exacerbé le mécontente­ment, profitant de la caisse de résonance du mouvement social. Fait rarissime, les portes de la prison ont donc été débloquées, mais ne se sont pas ouvertes pour autant. « Les collègues ont refusé de prendre le service, note David Mantion, secrétaire régional adjoint de l’UFAP Justice. Sachant qu’on est sous statut spécial, qui ne reconnaît pas le droit de grève, une telle action est exceptionn­elle. » Selon les témoignage­s, des personnels administra­tifs, d’insertion, du secteur médical et même des prestatair­es privés n’ont pas bougé. « Personne n’a été empêché d’entrer », c’est « le personnel [qui] a refusé de prendre les clés », décrivent les syndicats, auxquels la section FO pénitentia­ire de La Farlède s’est jointe. Plusieurs dizaines de personnes sont ainsi restées de marbre, debout et dehors, y compris lorsque le chef d’établissem­ent est venu une première fois leur faire l’injonction d’usage de prendre le service. En cas de refus, les agents s’exposent à des sanctions, «qui peuvent aller de l’avertissem­ent à la révocation », souligne la CGT. Après le deuxième coup de semonce de la direction, claironné à 12h25, les agents pénitentia­ires ont repris les clés, comme ils disent – «mais la mort dans l’âme ; cela n’a pas été évident de se convaincre d’y retourner ».À13h,laprison avait achevé son mouvement spontané de solidarité. Si la direction de La Farlède a refusé de faire tout commentair­e, il a été reconnu qu’un «certain nombre» d’agents pénitentia­ires n’avait pas pris le service entre 10 h 30 et 13 h. La préoccupat­ion de la direction étant «de faire tourner l’établissem­ent de façon suffisamme­nt sécure pour les agents à l’intérieur, et pour les détenus ». C’est sur les moyens d’y arriver que les avis divergent.

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(Photo DR) Hier, la barricade a tenu jusqu’à h. Mais ceux de la pénitentia­ire sont encore restés dehors, sous le choc de l’agression de Borgo.

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