Des incertitudes pèsent sur le TGI de Draguignan
Le bâtonnier du barreau de Draguignan adresse une lettre ouverte à tous les maires de la circonscription pour influer la réforme de la carte judiciaire qui s’annonce
Un vent d’inquiétude souffle depuis une semaine sur la tête des avocats du barreau de Draguignan. Au point que leur bâtonnier, Me Philippe Schreck, vient d’adresser une lettre ouverte aux 134 maires des communes concernées par le ressort du tribunal de grande instance de Draguignan. Motif ? Le TGI de Draguignan pourrait devenir à terme un tribunal de seconde zone. C’est du moins ce que redoutent les avocats du barreau dracénois, à la lecture des rapports des « Chantiers de la justice » qui viennent d’être publiés. Ils préfigurent une énième réforme de la justice, qui sera présentée en conseil des ministres au printemps prochain, avec débats parlementaires pendant l’été, pour une mise en application à l’automne.
Un super-tribunal par département
Sous le titre « Les juridictions de première instance revitalisées au sein des départements », l’un de ces rapports propose de supprimer les tribunaux de grande instance et les tribunaux d’instance. En lieu et place, il serait instauré un tribunal judiciaire départemental avec toutes les compétences juridictionnelles, vraisemblablement au chef-lieu du département, par souci de cohérence avec l’ensemble des services de l’État. Les autres juridictions deviendraient des «tribunaux de proximité», chargés des contentieux du quotidien et des procédures simplifiées. «Le postulat est d’instaurer une juridiction de premier ressort départementale unique, résume le bâtonnier Philippe Schreck. Il prendrait le contentieux technique. Et si la réforme suit ce rapport, on aura à Draguignan un tribunal de proximité, qui sera vidé de 70 % de sa substance. »
Draguignan : exceptionnel
Le rapport en question ne ferme cependant pas définitivement la porte. Il prévoit « des adaptations aux réalités locales » et, dans certains départements, «la coexistence d’un ou plusieurs tribunaux judiciaires avec le tribunal judiciaire départemental ». « Certaines exceptions demeureront nécessaires, précise le texte, au regard des spécificités des territoires: étendue géographique, densité de population, volume de contentieux, activités économiques du ressort, etc. » C’est sur ce levier que le bâtonnier Schreck compte peser. «Le tribunal de Draguignan tel qu’il est aujourd’hui est beaucoup plus important que nombre de futurs tribunaux départementaux uniques. C’est le 27e de France. Il doit être considéré comme une exception, en raison de nos 500 000 habitants dans 134 communes, de notre impact économique et des distances entre les limites du ressort. Il n’y a pas un bourg de ce territoire où il n’y ait pas un avocat. » De fait, le tribunal de Draguignan est compétent sur les trois quarts du département, de la frontière avec les Bouches-du-Rhône à l’ouest, à celle avec les Alpes-deHaute-Provence au nord, et jusqu’à celle avec les AlpesMaritimes à l’est. Il abrite en outre la cour d’assises du Var, tout comme celle des Bouches-du-Rhône siège à Aix-en-Provence et non à Marseille. Sur cette “exception judiciaire dracénoise ”, le bâtonnier Schreck espère mobiliser le plus grand nombre de maires. «Il est incroyable que, dans le même mois, on donne à notre circonscription une prison et qu’on lui enlève un tribunal. »