Les pompiers ont envie de mettre le feu à la caserne
Le Muy Dangereux et insalubres, les locaux de la vieille caserne se délabrent à vue d’oeil. Sous couvert de l’anonymat, un pompier a décidé de briser le silence. Témoignage
Les violents orages de la mijanvier ont été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase au sein du corps des sapeurs-pompiers de la commune du Muy. Car si ces derniers ont effectivement dû effectuer des sorties habituelles pour des pompages d’eau sur leur secteur, ils ont été les premiers sinistrés lorsque les vents violents et la grêle ont sérieusement endommagé les locaux de leur caserne. Outre les grands volets de fermeture des garages partiellement endommagés, «le plafond d’une chambre, qu’on peut déjà qualifier d’insalubre, s’est effondré à la suite des infiltrations d’eau. On nous dit qu’aucuns travaux ne peuvent être faits vu que la caserne est remplie d’amiante », dénonce, sous le couvert de l’anonymat, l’un des pompiers du Muy.
« Tout le monde pète les plombs ! »
Visiblement au bout du rouleau, il a accepté de crever l’abcès en disant tout haut ce que tout le monde subit et pense tout bas… « Cela fait maintenant 20 ans que j’entends que cette caserne doit être refaite. Vingt ans que la hiérarchie, les politiques, etc., nous promettent des choses qu’on ne voit jamais arriver. Qu’est-ce qu’on attend ? Heureusement que ce soir de janvier, il n’y avait personne dans ce local lorsque le toit s’est effondré. » D’autant que ces derniers incidents sont loin d’être les premiers. «Rien n’est aux normes! Il n’y a aucune isolation nulle part. Il n’y a qu’une seule douche, un seul WC pour tout le personnel ! La chambre des filles est un simple mobilhome de fortune installé en face. Elles sont obligées de traverser pour leurs besoins. Nous vivons à quatre dans une chambre de garde de 6 mètres carrés, avec en prime des merdes de rats que nous voyons passer régulièrement. Avec tout le respect que j’ai pour les sans-abri, même un SDF ne voudrait pas y passer ne serait-ce qu’une seule nuit. Dans le couloir d’accès est posée une plaque d’égout à même le sol. Lorsqu’on enlève ce cachemisère, on voit passer nos excréments ! À tous les niveaux, les conditions d’hygiène et de vie sont déplorables. » Ras-le-bol, déprime, sentiment d’abandon sont les mots qui reviennent le plus souvent. « Tout le monde pète les plombs ! Beaucoup d’entre-nous ne veulent plus prendre de garde de nuit pour éviter de vivre dans la crasse. Lorsqu’on se permet de demander des comptes, on nous répond systématiquement : on verra, on verra… Cela étant, la hiérarchie nous met une certaine pression pour éviter que ces problèmes internes filtrent en dehors. Mais aujourd’hui, c’est tout simplement insupportable. J’ai un collègue basé au Muy depuis des années qui est victime de sérieux problèmes aux poumons. C’est à se demander si son cas n’est pas lié à l’amiante qui est partout dans cette caserne. » Si ce pompier a décidé de briser la loi du silence, c’est dans l’intérêt de tous ses collègues varois. « Car aujourd’hui, cet état de délabrement avancé concerne également les casernes des Arcs, Carcès voire Sanary. On n’en peut plus de travailler dans de telles conditions… » Et dire que sur cette commune du Muy, un terrain d’un peu plus d’un hectare est toujours en attente d’abriter la nouvelle caserne promise depuis des années. « Faut-il qu’un drame se produise pour faire avancer les choses?», se demande ce pompier désabusé avant de reprendre son service… à reculons.