Balançan : le préfet à l’heure des choix
Alors que la grève de ce lundi annoncée par les personnels de Pizzorno marque l’actualité, le préfet du Var concède n’avoir, pour l’heure, arrêté aucune décision sur l’exploitation du Balançan
Le Balançan ? Jean-Luc Videlaine n’a, pour l’heure, pris aucune décision. Ouvert sur le sujet à toutes les discussions, le préfet du Var participera à une assemblée générale extraordinaire de l’association des maires du Var (a priori le 12 février prochain). En poste depuis près d’un an et demi dans le Var, le préfet savoure certes le cadre et la qualité de vie « indéniables », mais entend en premier lieu, ne pas perdre de vue les préoccupations et les intérêts du million de Varois. Dans toute la mesure que lui confère sa fonction, et avant que l’actualité dramatique de la fin de semaine (le crash de deux hélicoptères de l’EALAT) ne le rattrape, il a répondu à nos questions.
La semaine débute par le mouvement de grève des salariés du groupe Pizzorno. En cause: l’exploitation du Balançan. Le sujet n’est pas nouveau. Mes prédécesseurs avaient même tiré la sonnette d’alarme à l’époque où le Département était compétent en la matière. Pour poursuivre l’exploitation du Balançan (), Pizzorno me demande de passer par la procédure de Projet d’intérêt général (PIG) pour l’ouverture d’un cinquième casier de stockage des déchets, car le plan local d’urbanisme du Cannet-desMaures ne le permet pas. Un PIG, c’est deux ans de procédure. Tout cela dans une perspective où le casier actuel serait plein à la fin de l’année civile, fin . C’est ce que j’ai fait valoir à l’entreprise et aux élus. Je les ai réunis deux fois : fin juin l’an dernier, pour les prévenir que la césure allait se produire entre la fin d’exploitation du site du Balançan et le début d’exploitation des autres sites – une bonne année au moins. Fin décembre, je leur ai dit que le PIG était inopérant compte tenu les délais. J’ai dit la même chose à l’entreprise il y a huit jours, ainsi qu’aux représentants syndicaux lorsque nous les avons reçus en préfecture.
Aucune autre solution n’est envisageable ? Le président de l’association des maires du Var, Jean-Pierre Véran, me propose de signer une convention pour poursuivre l’exploitation du Balançan. Pour l’instant, je n’en vois pas les contours, mais ce qui est certain, c’est que le maire du Cannet-desMaures devra être partie prenante dans l’élaboration de ce document. Pizzorno de son côté, qui demande une exploitation de cinq ans, me propose une déclaration de projet. On est en train d’étudier la question.
Vous avez évoqué la possibilité de faire acheminer les déchets vers d’autres sites. Certes, mais cela ne pourrait se faire que dans une situation délicate et coûteuse, c’est bien ce qui suscite autant d’émotion.
Quand seront exploitables les autres sites ? Les sites prévus comme Bagnols, Brignoles etc. ne seront pas exploitables avant que la césure (l’arrêt de l’exploitation si un nouveau casier de stockage n‘était pas acté, Ndlr) ne se produise.
Vous penchez pour une poursuite de l’exploitation? Mon sentiment va plutôt dans le sens inverse. Mais ma fonction consiste aussi à voir le réel, juridique et technique. Je souhaite surtout pour que les choses se passent bien, et j’essaie de ne pas être un marchand d’illusions. Je crois qu’il faut se confronter à la vérité et la réalité. Je dis cela sans aucun esprit critique envers les élus dont certains se sont beaucoup engagés sur ce dossier.
Qu’est-il ressorti de la concertation que vous avez menée sur la police de sécurité du quotidien ? Il y a une adhésion des interlocuteurs à ce concept, qu’ils trouvent pertinent. Cependant, policiers et gendarmes ont insisté sur le besoin d’avoir plus de temps. Cela signifie plus d’effectifs bien sûr, mais ils fondent aussi beaucoup d’espoir sur la réforme de la procédure pénale annoncée. Aujourd’hui ils consacrent beaucoup de temps à rédiger des procèsverbaux par exemple. Il y a aussi un certain nombre de tâches dont ils considèrent qu’elles obèrent leur action sur le terrain, comme l’établissement des procurations dans le cadre des élections. Vous relevez, en matière de sécurité publique, la hausse de l’usage des armes à feu (). Le président de la métropole Toulon Provence Méditerranée (TPM), Hubert Falco, avait sollicité des moyens supplémentaires pour lutter contre la recrudescence de cette violence. Va-t-il être entendu? Le ministre de l’Intérieur va présenter la police de sécurité du quotidien le février prochain. Les évolutions des effectifs seront sans doute mentionnées à ce moment-là. On sait qu’il est prévu au niveau national, le recrutement d’un grand nombre de policiers et de gendarmes.
Votre fin d’année a été marquée par la problématique d’accueil des migrants. Où en est-on de la prise en charge ? Les trois Centres d’accueil et d’orientation (CAO) prennent en charge à ce jour, personnes. Un quatrième centre, à La Seyne, est fermé pour cause de travaux. J’ajoute que quand on choisit un lieu, on ne choisit pas des communes mais des structures susceptibles d’être adaptées comme locaux de vie. Cela a été le cas pour l’ancien Formule de La Londe. Et comme le racontent les habitants de Tourves (), cette présence de migrants n’a pas causé de troubles à l’ordre public. Dans le cas contraire, on sévirait en excluant les gens de ces structures.
La circulaire Collomb est-elle appliquée dans le Var? J’ai réuni les associations gestionnaires des foyers d’accueil concernés – une douzaine de partenaires – il y a une dizaine de jours. Elles m’ont confirmé qu’elles ne souhaitaient pas que les binômes OFI (Office français de l’immigration) et agents de la préfecture se présentent dans leurs locaux. J’attends le résultat du contentieux (les associations ont saisi le conseil d’État, Ndlr) pour les revoir. Nous ne pourrons pas le faire sans leur concours.
Vous avez sanctionné les communes qui ne répondent pas aux objectifs de la loi SRU. Or certains élus pointent un manque de foncier. Qu’en est-il du dispositif permettant de céder les terrains de l’État pour la construction de logement social ? On a déjà eu recours à ce dispositif dans le Var: à Toulon, l’ancien bâtiment de la direction Jeunesse et sport bd Dessaix, le terrain de La Solde également, ainsi que le terrain Missiery à Fréjus. Mais cela ne suffit pas à répondre à l’ensemble des besoins. Même s’il est vrai que certaines communes rencontrent des difficultés avec le foncier, quand on veut en trouver…
Le rapport annuel de la fondation Abbé Pierre pointe également la « suroccupation des logements ». La suroccupation oui, mais l’inverse, la sous-occupation est également d’actualité. Lorsque la vie évolue, le logement qui autrefois abritait une famille de cinq personnes l’est aujourd'hui par une seule personne. On sait que les demandes de déménagement sont nombreuses mais à ce sujet, seuls les offices HLM sont compétents pour intervenir.
L’agglomération TPM vient d’être instituée métropole. Une bonne chose pour le Var? Cela fait bientôt mois que je suis là et tous les interlocuteurs m’ont parlé de leur crainte de voir le Var écrasé par Marseille et Nice. De ce point de vue, le fait que TPM devienne une métropole me semble une bonne chose. D’autant que, sociologiquement, on n’invente pas une métropole, on reconnaît un espace qui existe. Maintenant qu’elle est sur les rails, la question est : quel Département avec la métropole ? Je compte d’ailleurs m’entretenir avec les présidents Falco et Giraud à ce sujet. Des gens, des élus, s’en inquiètent, car ils ont vu qu’à Lyon, le Département a été absorbé par la métropole. Cela n’est pas envisageable pour le Var cependant, nous avons à apporter des réponses sur le sujet aux élus non métropolitains.
Aujourd’hui, la métropole compte douze communes. Demain? Il y a des candidats, les seuls dont j’ai vraiment connaissance c’est la communauté de communes de la Vallée du Gapeau. Cependant je n’ai pas l’impression que le sujet soit immédiat.
J’essaie surtout de ne pas être un marchand d’illusions ”
1. L’entreprise Pizzorno peut poursuivre l’exploitation jusqu’en 2020 à condition de ne pas dépasser le volume de stockage défini, volume qui devrait être atteint en fin d’année) ou le tonnage maximal (qui selon les syndicats, pourrait lui être atteint en juin prochain). L’entreprise sollicite donc l’ouverture d’un cinquième casier de stockage sur le site du Balançan. 2. En particulier dans le cadre de trafics de stupéfiants. En raison du crash des deux hélicoptères de l’EALAT, la présentation des chiffres de la sécurité publique a été reportée. 3. Dans notre dossier du mois sur varmatin.com.