Cité Berthe : un consommateur de cannabis relaxé
Poursuivi pour des faits de trafic de stupéfiants, un jeune homme de La Seyne a été relaxé car aucun élément suffisant ne permettait de l’incriminer
Que s’est-il vraiment passé jeudi dernier, vers 15 heures, dans la résidence Jules-Renard, à la cité Berthe ? Et que faisait Lyes (1), interpellé au beau milieu d’une zone quadrillée par les guetteurs des trafics de drogue, et déféré samedi devant la justice ? Les interrogations du tribunal correctionnel de Toulon sont restées sans réponse, hier.
Une enquête maladroite
À la barre, le jeune de 18 ans s’est affranchi des faits pour lesquels il était accusé, à savoir d’usage de produits stupéfiants en récidive, de complicité de détention, d’offre ou cession de stupéfiants, ainsi que de faits de violence sur un fonctionnaire de police. À la sortie du long débat contradictoire, le Seynois a été relaxé intégralement (2). Pourquoi? À cause d’une ribambelle de «maladresses de rédaction» des procès-verbaux, relevées d’ailleurs par le ministère public. «C’est un modèle du genre, a expliqué le parquet. Cette procédure n’a pas été relue pour gommer les aspérités. » Jeudi, une patrouille de policiers opère au démantèlement d’un trafic de résine de cannabis dans le quartier seynois. Un fonctionnaire, déguisé en peintre, franchit même le filtre du hall d’immeuble, en quête du «charbonneur », à savoir le dealer qui conserve les produits illicites. Malgré l’absence de flagrant délit, et à la suite d’une cavalcade dans la cage d’escalier, les policiers procèdent à deux interpellations, dont celle de Lyes, un habitant du quartier, sur lequel aucun produit stupéfiant ni somme d’argent n’ont été retrouvés. À la barre, le petit blond aux cheveux frisés affirme être passé au mauvais endroit, au mauvais moment. «Je suis consommateur, j’ai voulu acheter une barrette, lâche-til d’une voix chevrotante. Un homme en bleu de travail (sic.) m’a poussé dans l’escalier, je suis tombé et je suis resté au sol un moment. Puis il est revenu et s’est déchaîné sur moi.» À l’audience, son avocat, Me Christophe Hernandez, a même apporté des photos «d’un pull taché de sang». «Mais c’est votre troisième version différente Monsieur , interpelle la présidente du tribunal, Julie Delorme. Que dois-je en conclure ? »« Ce sont les coups… », pleurniche-t-il. De son côté, le parquet a signalé «des accusations gravissimes de violences purement gratuites. Vous dénoncez une procédure montée à l’envers.» La défense, elle, a relevé l’incohérence des qualifications retenues, des horaires d’interpellation et des diagnostics médicaux compilés dans une « enquête médiocre ». « Ça ne tient pas (...), il faut être précis quand on accuse un homme », expose Me Hernandez. Le tribunal n’a pas suivi les réquisitions du ministère public (10 mois d’emprisonnement), considérant qu’aucun élément ne caractérisait le trafic. Et Lyes est rentré chez ses parents. 1. Le prénom a été modifié. 2. Le tribunal a retenu la constitution de partie civile.