La maison des têtes reste dans leur coeur, ans après
Le 15 février 1989, à 14 h 26, le bâtiment de la place à l’Huile était soufflé par une explosion dont l’origine reste polémique. Comme tous les ans, les victimes et leurs familles se souviennent
Treize victimes à déplorer et seize personnes réunies hier pour respecter une minute de silence à leur mémoire. Un silence qui, vingt-neuf ans après le souffle, pourrait aussi bien évoquer l’hommage… que l’oubli dans lequel l’explosion de la maison des têtes est doucement en train de glisser.
« Ça reste très douloureux »
Le visage grave autour des bouquets de fleurs déposés sur la place à l’Huile, les membres de l’association des victimes du drame veulent pourtant tout faire pour que cela n’arrive pas. Pas avant d’avoir obtenu la vérité. «C’est sûr qu’on est de moins en moins nombreux à venir ,se désole Jeanine Cilia, présidente de l’association. Mais, certains sont disparus, et puis les gens ne rajeunissent pas et ça reste très douloureux. Certains n’arrivent même pas à traverser Toulon. »
Souvenirs et espoirs
Touché dans sa chair, Wulfran Dherment (48 ans), lui, a une nouvelle fois fait le déplacement. L’occasion, pour celui qui était en stage chez le prothésiste dentaire du premier étage, de se remémorer les neuf heures qu’il a passées dans les décombres et d’évoquer les séquelles physiques qu’il ressent encore. « J’ai des douleurs constantes, une grosse fatigue à la marche, les poumons, les reins et tout le système nerveux touchés… Et ça ne s’arrange pas en vieillissant. » Avec Karine Simon et sa tante Cécile Ayasse, présentes elles aussi hier (elles occupaient le 5e étage), il fait partie de ceux qui ont vécu l’explosion de l’immeuble de l’intérieur. Une fraction de seconde qui a changé leur vie. Aujourd’hui, plus que les souvenirs, ce qui les motive à faire le déplacement, c’est l’espoir de voir l’Etat «sortir du nondit » en revenant sur le « secret défense » qui empêche de faire toute la lumière sur les circonstances du drame. Aucun doute, cependant, dans leur esprit. Ce n’est ni un suicide au gaz, ni une fuite qui a transformé le bâtiment historique en tas de gravats. Pour les membres de l’association, la thèse du missile égaré par les militaires – qu’ils soient Français ou Américains – ne fait aucun doute. « Et à force d’entretenir les mensonges et les non-dits, l’Etat a transformé un accident en crime », s’agace Jeanine Cilia. « Le temps a passé, mais on n’a toujours pas eu de vérité officielle », déplore Wulfran Dherment.