La question des droits des patients en débat
Disposer d’une information claire et complète, accéder à son dossier médical, faire respecter sa volonté… instaurés par la loi, ces droits sont-ils effectifs?
Quatre mars 2002. La loi Kouchner est promulguée (1) par le gouvernement Jospin. Une loi de 119 pages qui consacre deux principes étroitement liés l’un à l’autre: le consentement libre et éclairé du patient aux actes et traitements qui lui sont proposés, et son corollaire, le droit du patient d’être informé sur son état de santé. Une véritable révolution qui signe le rejet du paternalisme médical, marqué par l’autorité du praticien et l’infantilisation du malade. Exit le « Vous faites ce que je dis», le malade est désormais invité par la loi à devenir acteur de sa propre santé en participant activement aux décisions qui le concernent. Seize ans presque jour pour jour après la loi Kouchner, quel bilan ? Le patient exerce-t-il ses droits ? Les connaît-il au moins ? Ces nouveaux droits ont-ils bouleversé les relations entre malades et professionnels de santé ? Ces questions ont fait l’objet d’échanges passionnants entre les adhérents du club Santé de Nice-Matin.
Plus de confiance
« Les médecins ont vécu dans les premiers temps cette loi comme quelque chose qui remettait en cause leur statut. Ces temps sont révolus; la loi est entrée dans les pratiques. Il fallait comprendre que ce n’était pas une loi contre les médecins, mais pour la médecine », introduit Malik Albert, directeur général adjoint du groupe Saint George. Une loi dont chacun s’accorde à reconnaître qu’elle a permis de rétablir la confiance dans un système de santé jusque-là très opaque. Les patients sont sans aucun doute mieux informés que dans le passé sur leur état de santé, les soins et les traitements qui leur sont délivrés. Et c’est normal, puisque «l’information est devenue une démarche obligée pour les professionnels de santé. » Sur simple demande, sans justification, les patients peuvent ainsi accéder à leur dossier médical. La loi leur permet aussi de réaffirmer leurs droits en terme de consentement aux soins, associé à la possibilité de désigner une personne de confiance susceptible de prendre les décisions à leur place s’ils sont empêchés.
Nouvelle donne
Sur papier du moins, on ne peut que se féliciter de toutes ces avancées. Il reste que dans les faits, les patients se saisissent peu – ou pas – des droits qu’ils ont acquis. Malik Albert en convient : « Il faut que le patient se repère mieux dans le système de santé et qu’il utilise mieux ses droits. C’est là que l’on doit progresser ». Si la révolution annoncée par la loi Kouchner a un petit goût d’inachevé, cela tient peut-être aussi aux mentalités, comme le suggère Cécilia Breneur, infirmière libérale : « On est dans un changement de paradigme : avant, le médecin, l’hôpital, étaient au coeur de toutes les décisions. Aujourd’hui, il faut que ce soit le patient. » Et il n’est pas si simple de s’adapter à cette nouvelle donne. 1. Loi n° 2002-303 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé qui sera complétée par la loi du 22 avril 2005 dite « loi Leonetti » conçue dans le prolongement de la première - loi relative aux droits des malades et à la fin de vie.