À Hyères, des chercheurs réinventent les fleurs
Le SCRADH, Syndicat du centre régional d’application et de démonstration horticole, est présent pour la première fois au salon de l’Agriculture à Paris, avec ses conseils pour les jardiniers
Le SCRADH, Syndicat du centre régional d’application et de démonstration horticole, participe pour la première fois au salon de l’Agriculture à Paris. Il est depuis hier, vendredi, et jusqu’à dimanche, sur le stand du conseil départemental du Var. Depuis trente ans, le SCRADH fait de la recherche, de l’innovation et de l’expérimentation sur une station de 23 000 mètres carrés, basée à Hyères. « Nous travaillons pour une horticulture de qualité, compétitive, innovante et respectueuse de l’environnement » explique Laurent Ronco, le directeur. « Nous travaillons pour les professionnels horticoles dont la fleur coupée, qui est une grosse partie de notre activité. Les produits que nous mettons au point pour cette filière sont ensuite développés par les producteurs et vendus sur les marchés. Pour cela, le Scradh passe par la Sica Marché aux fleurs d’Hyères. » Selon Laurent Ronco, un jardinier amateur doit aujourd’hui s’informer et se former a minima, à de nouvelles contraintes. Il explique.
Qu’allez-vous faire découvrir aux visiteurs du salon à Paris ? Nous allons mettre l’accent sur la protection des cultures, la qualité de nos systèmes de production et sur l’innovation commerciale, notamment la fleur comestible : la bourrache ; les croquantes et acidulées bégonias ; les pensées qui font surtout jolies dans l’assiette ; les tulbaghias au parfum sucré et au goût d’ail ; les oeillets d’Inde qui ont un goût d’agrume, notamment d’écorce de pamplemousse rose. Les oeillets d’Inde ça marche très bien. Pour l’instant ils sont commercialisés auprès des restaurateurs mais nous envisageons de développer ces produits pour le grand public qui pourra en acheter dans les magasins. En particulier les oeillets d’Inde jaune qui accompagnent très bien une salade de carottes râpées ou une tarte aux fraises. Quel est votre rôle dans cette filière ? Nous avons mis au point les produits à commercialiser. On les a fait goûter aux restaurateurs pour les faire valider. Nous avons mené ensuite des expérimentations sur les produits retenus afin d’être capables de maîtriser un cycle de production propre, sain et sans rupture, y compris quand il y a des attaques de ravageurs ou des maladies. Car, une fois commercialisés, il faut pouvoir les fournir.
La lutte naturelle contre les ravageurs fait-elle partie de vos objectifs ? Oui, c’est un impératif. Une des animations pendant ces trois jours sur le salon, porte sur la protection des plantes. Les visiteurs pourront observer à l’aide de microscopes le travail des auxiliaires de lutte contre les ravageurs. La protection des cultures avec peu ou pas de pesticides est un enjeu pour les années à venir. Bientôt la vente de pesticides sera très réduite pour les professionnels et interdite pour le grand public. Il faut donc prévoir un calendrier de production de ravageurs pour en disposer quand on en a besoin, afin de lutter par exemple contre les pucerons. Parmi ces auxiliaires capables de supprimer un insecte ravageur et de remplacer les produits chimiques, il y a la coccinelle mais aussi des micro-guêpes, des mouches prédatrices, ou des acariens, etc. On les a expérimentés sur le site d’Hyères. Cela fait ans que le SCRADH étudie la lutte alternative dite « Protection Biologique Intégrée ».
Ces ravageurs sont-ils plus présents avec le réchauffement climatique ? Oui, le fait de ne plus avoir d’hivers trop marqués (), amplifie le problème des ravageurs. D’autant que la Provence et la Méditerranée sont une porte d’entrée pour de nombreux ravageurs, à cause du tourisme et du commerce. Pour le grand public, il est important d’attirer dans les jardins ces auxiliaires capables de lutter contre eux. Il faut donc diminuer la pression phytosanitaire, car si les pesticides tuent les insectes ravageurs, ils tuent également les auxiliaires. Aujourd’hui un jardinier, même amateur, doit se tenir au courant de tout cela et s’adapter.
La gestion de l’eau fait-elle partie de vos priorités ? Oui. Et cette gestion de l’eau permet aussi de lutter contre les maladies. Ainsi, il est important par exemple, d’arroser les tomates au goutte-à-goutte, au pied. Tout jardinier doit aussi savoir cela. Nous travaillons beaucoup sur la culture hors sol mais aussi sur l’aéroponie. Cette méthode de culture, économe en eau, permet de faire pousser des plantes dans l’air et on brumise leurs racines. C’est une solution développée au SCRDADH pour la culture du lisianthus. La culture intensive et en plein sol de cette plante posait problème. Or cette fleur est importante car beaucoup utilisée pour les bouquets. Sa culture en aéroponie permettra peut-être de les résoudre.
Existe-t-il une plante à faire pousser dans les jardins compatible avec tous ces objectifs ? Sur notre site www.innoplante.fr nous donnons beaucoup d’exemples et de conseils. Nous sommes très satisfaits du résultat que nous avons obtenu, après expérimentation, sur l’Hétéroméles arbutifolia. C’est un arbre de taille moyenne – environ mètres – qui produit des fruits rouges à Noël. Originaire de Californie, il est appelé Christmas Tree aux ÉtatsUnis. Sa feuille et sa floraison ressemblent à celle de l’arbousier. Il a été obtenu en auprès du conservateur du domaine du Rayol. À la station, on a étudié comment le multiplier et l’utiliser. Puis on l’a testé dans des
La Provence et la Méditerranée sont une porte d’entrée pour de nombreux ravageurs, à cause du tourisme et du commerce ”
‘‘La gestion de l’eau permet aussi de lutter contre les maladies. Pour cela, il est important par exemple, d’arroser les tomates au goutte-à-goutte, au pied. ”
conditions réelles en le plantant à Hyères. Résultat : il n’est pas assoiffé, pas trop malade et demande peu d’entretien. Il résistera bien au changement climatique. Nos travaux ont permis de le commercialiser en jardinerie. 1. L’épisode de froid des derniers jours est exceptionnel, Ndlr.