Ablation de la prostate : des séquelles réduites
Environ 20000 prostatectomies sont réalisées chaque année. Une majorité de ces exérèses sont robo-assistées ou réalisées par voie coelioscopique conventionnelle. Avantages
Opérer ou pas les patients atteints d’un cancer de la prostate? En utilisant quelle procédure ? Longtemps, ces questions ne se posaient même pas, faute de connaissance suffisante de la maladie et surtout d’alternatives ; lorsqu’une tumeur au niveau de la prostate était diagnostiquée, les chirurgiens « ouvraient» les chairs (chirurgie «à ciel ouvert ») et retiraient toute la prostate, en dépit des séquelles que ce geste pouvait générer. Les temps ont changé. « Dans 95 % des cas, le cancer est aujourd’hui découvert à un stade encore localisé ou localement avancé, mais sans métastases. Une simple surveillance active et rapprochée est préconisée lorsque la maladie est à faible risque de progression, soit chez environ 30 % des patients. Pour les autres, et selon le stade de la tumeur, différentes solutions peuvent être proposées : radiothérapie, curiethérapie ou chirurgie. Notre rôle est d’expliquer aux patients ces différentes possibilités et les effets secondaires possibles associés à chaque approche », relatent les Drs Klifa et Rouscoff, chirurgiens urologues à la clinique Saint George à Nice (1).
L’ablation de la prostate pour % des patients
Si le dossier de chaque malade est examiné par un ensemble de professionnels réunis dans le cadre d’une RCP (réunion de concertation pluridisciplinaire), qui vont s’accorder sur la prise en charge optimale, la décision finale appartient toujours au patient. « Dans environ 40 % des cas, c’est l’ablation chirurgicale de la prostate (prostatectomie) qui est proposée. » Une solution radicale mais qui bénéficie du développement d’approches mini invasives : la coelioscopie [technique chirurgicale à ventre fermé au cours de laquelle l’opérateur passe un système optique ainsi que des instruments chirurgicaux à l’intérieur de l’abdomen, ndlr], et plus récemment de la robotique. « Il y a dix ans encore, sur 100 prostatectomies, à peine 10 étaient réalisées par coelioscopie ou robotique », relatent les spécialistes. Depuis, la tendance s’est totalement inversée : il y a 5 ans, la chirurgie « à ciel ouvert » ne représentait déjà plus que 50 % des interventions, et moins de 20 % aujourd’hui. En dépit de leur coût très élevé (2), plusieurs établissements, à l’instar de la clinique Saint George, ont choisi d’investir dans des robots chirurgiens. «Le robot permet de réaliser une prostatectomie radicale avec une extrême précision, grâce à la vision stéréo et la mobilité des outils dans les quatre dimensions, note, enthousiaste le Dr Klifa. On a l’impression d’avoir les mains plongées dans le corps du patient. » Mais, au-delà du confort pour le praticien lui-même, quels sont les avantages pour les malades ? « Avec la laparoscopie, comme avec la robotique, on obtient des cicatrices plus petites, voire invisibles, une durée d’hospitalisation réduite, une récupération plus rapide, moins de pertes sanguines durant l’opération et un risque diminué de séquelles liées à l’opération », énumèrent les spécialistes. Séquelles. Le mot est lâché. Celui qui effraie tous les hommes qui apprennent qu’ils vont devoir être opérés de la prostate. « Tous posent la question du maintien de l’érection. Le risque d’incontinence les inquiète aussi, mais dans une moindre mesure », confirme le Dr Rouscoff. Des peurs compréhensibles, compte tenu de la localisation de la prostate, intercalée entre la vessie et l’urètre, très près du sphincter qui assure la continence et en contact très étroit avec les bandelettes nerveuses qui assurent l’érection. «L’intervention, quelle
Préserver les nerfs de l’érection
que soit la modalité, peut induire une incontinence urinaire. Mais celle-ci est dans l’immense majorité des cas, transitoire, rassurent les spécialistes. Après une chirurgie robotique ou par laparoscopie, le retour à la continence est effectif 1 à 1,5 mois maximum après l’opération, la précision de l’intervention permettant de préserver le col de la vessie. Après une chirurgie à ciel ouvert, ce délai est rallongé à 3 mois. » Plus rarement (1,5 à 3 % des cas), l’incontinence peut persister audelà de 9 mois, quelle que soit l’approche utilisée, chirurgie à ciel, robotique ou par voie coelioscopique. Concernant l’impuissance, la coelioscopie, comme la laparoscopie, ont permis, là encore, de réduire ce risque, sans toutefois l’abolir. « Il y a 15 ans encore, on était obligé de présenter la perte d’érection comme une fatalité. La laparoscopie ou la chirurgie robotique, en nous permettant de mieux visualiser les nerfs de l’érection, nous aide à les préserver. » Bilan : environ un quart des hommes opérés en utilisant l’une ou l’autre de ces approches y sont confrontés, contre 50 % après une chirurgie à ciel ouvert. Confrontés, mais pas condamnés. Plusieurs solutions peuvent être proposées à ces hommes pour les aider à retrouver une vie sexuelle.
1. Une journée Portes Ouvertes était récemment organisée par l’établissement niçois pour faire découvrir au public les potentialités du Robot Da Vinci. C’est dans cette même clinique que la première prostatectomie par voie robotique en clinique privée était réalisée par le Dr Lagha. 2. Le robot Da Vinci coûte environ deux millions d’euros auxquels il faut ajouter environ 150 000 euros de maintenance par an.