Les écrans décryptés aux écoliers
Cette semaine, les écoliers décryptent, avec l’expertise de deux intervenants, les images qu’ils voient à la télévision, mais aussi sur Internet via les téléphones portables et les tablettes
Ce lundi, Super Nanny s’est invitée dans la classe de Mme GarbailPicon, à l’école primaire valettoise Pierre-de-Ronsard. Exceptionnellement, dans le cadre de la Semaine sans écran, les CM2 ont eu le droit de… regarder la télé en classe. Deux intervenants ont décrypté, à leurs côtés, la séquence choisie : il s’agit d’Alain Durand, président de l’association crauroise 3/12 ans, et de Denis Rougé, président de l’association nationale Les Pieds dans le paf.
Quel est l’objectif de cette opération ? Alain Durand : C’est de l’éducation aux médias, à travers un atelier d’une heure de déconstruction des images, du son, du montage et du point de vue du réalisateur. On donne les clés aux élèves, qui regardent en moyenne un écran durant trois heures cinquante minutes chaque jour, et à leurs enseignants. Denis Rougé : Une forte concentration d’images arrive sur nos écrans en flux continu, on manque de recul. Le but est donc de décortiquer ce qui se met en place, tout en restant objectif. On est là pour se poser les bonnes questions.
Y a-t-il beaucoup de fantasmes autour de l’univers de la télé ? Alain : Oui, on essaie de les gommer. Par exemple, les enfants nous ont demandé si un faux bébé avait été utilisé, ou si le lancer de fourchette d’un gamin turbulent n’avait pas été mis en scène… Denis : On adapte notre intervention, car il peut y avoir de gros décalages. Cette semaine, on aborde aussi un reportage du journal télévisé sur les migrants, où le point de vue du réalisateur est essentiel ; ou un extrait de Koh-Lanta, sur le sexisme. Dans Les Reines du shopping, le timing est très précis, on voit bien que le tournage dure plus d’une journée.
Quelles sont leurs nouvelles habitudes ? Denis: Notre époque, c’est chacun dans son coin à regarder ses programmes. L’évolution technologique nous apporte de plus en plus de supports. Les enfants n’y échappent pas. Alain: D’ailleurs, les troisquarts de la classe ont un téléphone (lire ci-contre)…
Dans ce contexte, quel rôle doivent jouer les parents ? Alain : Ils tentent le défi eux aussi, ça change leurs habitudes. Certains me disent qu’ils retrouvent de la communication, ou des soirées consacrées aux jeux de société. Notre passage peut jouer un rôle de détonateur. Si cela peut éviter de regarder les mauvais programmes… Denis : On ne laisse pas un enfant seul sur l’autoroute, non ? Eh bien, on ne laisse pas non plus un enfant seul face aux images. Cela nécessite un accompagnement face à des images choquantes, dérangeantes. Il faut donner l’explication à l’enfant.
Le danger est-il mieux pris en compte par les jeunes générations ? Au tableau Koh-Lanta, Touche pas à mon poste ou encore Les Marseillais, etc. Autant de programmes télé qui défilent, cette semaine... au tableau ! Dix-sept écoles du territoire métropolitain participent, depuis lundi, aux animations menées dans le cadre de la Semaine sans écran. « Beaucoup mangent devant la télé, explique Mme GarbailPicon, une institutrice. Alors ils me disent : “C’était chouette, on a discuté.” »
Denis : Oui, le regard face au cyber-harcèlement, ou sur la protection des données, évolue. Les jeunes apprennent vite. Pour l’anecdote, j’avais programmé un code parental il y a cinq ans pour verrouiller les flux d’images. Mes enfants l’ont contourné en modifiant l’heure de l’ordinateur. Je ne savais même pas que cela était possible !