Var-Matin (Grand Toulon)

St-Laurent (): un arrêté municipal «anti-Roms»?

- GAËTAN PEYREBESSE gpeyrebess­e@nicematinn.fr

La phrase dans sa globalité interroge. « J’ai pris un arrêté contre l’ouverture des poubelles» a lancé le maire de Saint-Laurent-du-Var (AlpesMarit­imes), Joseph Segura, lors du forum de quartier organisé vendredi dernier à l’école Sainte-Pétronille. Avant d’ajouter, afin « de verbaliser ces Roms qui les ouvrent. » Joseph Segura a-t-il, par ses propos, stigmatisé une population ? Pour Viorel Costache, président de l’associatio­n de défense des droits des Roms, Prales, il « stigmatise bien la population Roms. L’utilisatio­n du mot Roms est discrimina­toire. Plusieurs population­s fouillent les poubelles pour récupérer des objets et parfois tenter de les vendre pour gagner un peu d’argent. C’est juste un moyen de survie ». Pour le maire, il n’est pas question d’une quelconque stigmatisa­tion. «Je dis les choses simplement. Je suis un pragmatiqu­e. Il y a une situation qui s’impose, et je dois réagir », explique Joseph Segura, joint hier au téléphone. « Un groupe de Roms est installé sur un terrain qui ne leur appartient pas et opère ce genre de faits. Il faut dire les choses. Je ne stigmatise personne. Je dénonce des agissement­s. » Le maire assure ne viser que les individus qui cherchent à «récupérer du cuivre, des objets pour les revendre » et affirme faire la différence avec «le mendiant qui essaye de survivre en trouvant de quoi se nourrir dans les poubelles. À Saint-Laurent, nous n’en avons pas. Avec l’accueil de jour et de nuit, les associatio­ns, comme les Restos du coeur, le CCAS, il existe un dispositif social de prise en charge ». Et d’ajouter, « je suis attentif à la réponse à taille humaine avant tout. Mais face à un problème de société, d’insalubrit­é, je suis moins tolérant. Je ne veux pas que ce problème prenne de l’ampleur ». L’arrêté municipal en question n’est pas nouveau. En 2015, il avait été pris, interdisan­t la fouille de poubelles et autres conteneurs, mais juste durant l’été. Le 3 février 2017, le maire, Joseph Segura, a signé un arrêté similaire, mais qui cette fois-ci court sur toute l’année et englobe tous les secteurs de la commune.

Une centaine de PV

Il donne ainsi la possibilit­é aux policiers municipaux témoins d’ouvertures intempesti­ves de poubelles de verbaliser le contrevena­nt d’une amende de 38 euros. «Nous avons pris cet arrêté à la demande des Laurentins, qui constataie­nt que plusieurs individus faisaient le tour de la ville à vélos, éventraien­t les poubelles, et laissaient les détritus étalés partout », déclare le maire. Il a donc pris cet arrêté, car « en terme de salubrité publique, ce n’était pas bon. Et puis, voir des gens la nuit faire cela, même s’ils n’étaient pas agressifs, créait auprès des mères de familles qui rentraient chez elles, un sentiment d’insécurité. » Selon le maire, une centaine de PV ont été ainsi dressés depuis 2017 : « Tous les quartiers sont touchés, Sauvaigo, le centre-ville, le Plateau-fleuri... Depuis cette répression, nous avons divisé par deux le nombre de faits. De temps en temps, cela revient. C’est cyclique. » Attaqué par la Ligue des droits de l’homme, un tel arrêté pris par une municipali­té du nord de la France a été validé en novembre 2017 par le Conseil d’État, après six ans de procédure. La bataille judiciaire est-elle pour autant terminée ? Peut-être pas. Viorel Costache se garde le droit d’ouvrir un nouveau front : cette fois-ci sur la discrimina­tion qui est faite, selon lui, à SaintLaure­nt-du-Var envers les Roms. Et il vise directemen­t les propos du maire.

 ?? (Photo Sébastien Botella) ?? La ville de Saint-Laurent-du-Var ne veut pas qu’on fouille dans ses poubelles, qu’on éventre les sacs et que les détritus finissent sur le trottoir. Pour le maire, les fauteurs doivent être punis. Au risque de stigmatise­r une population particuliè­re ?
(Photo Sébastien Botella) La ville de Saint-Laurent-du-Var ne veut pas qu’on fouille dans ses poubelles, qu’on éventre les sacs et que les détritus finissent sur le trottoir. Pour le maire, les fauteurs doivent être punis. Au risque de stigmatise­r une population particuliè­re ?

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