Var-Matin (Grand Toulon)

Grande jetée: des travaux sous haute surveillan­ce

En attendant que les travaux de réfection de l’ouvrage commencent début 2019, une enquête publique a démarré ce 2 mai. L’occasion de découvrir les nombreuses contrainte­s environnem­entales du chantier

- P.-L. PAGÈS plpages@varmatin.com

Certes, on est encore loin du premier « coup de pioche », mais le calendrier des travaux de réfection de la grande jetée, cet ouvrage qui délimite la grande rade de Toulon de la petite, tout en protégeant cette dernière des assauts de la houle d’est, se précise. Annoncé dans un premier temps pour le second semestre 2018, le chantier devrait, selon nos informatio­ns, finalement démarrer en début d’année prochaine. Avec le lancement ce mercredi 2 mai d’une enquête publique – « au titre de la

(1) loi sur l’eau » –, et les délais incompress­ibles découlant de cette procédure administra­tive, le ministère des Armées, propriétai­re de l’ouvrage, ne pourra en effet pas autoriser les travaux avant le 4 octobre prochain. Et à partir de cette date, le titulaire du marché aura trois mois pour préparer le chantier.

Urgence des travaux

Plus rien ne semble donc pouvoir retarder la réfection de la grande jetée, ouvrage plus que centenaire dont tout le monde s’accorde à reconnaîtr­e l’importance. Pour preuve, cette phrase extraite du dossier d’autorisati­on au titre de la Loi sur l’Eau, daté de novembre 2017: «La grande jetée est actuelleme­nt un ouvrage submersibl­e et son état de dégradatio­n nuit à sa vocation d’ouvrage de protection ». Aussi, pour être sûr que les travaux ne souffrent aucun délai supplément­aire – l’économie de la rade (conchylicu­lture, plaisance, transport maritime de fret et de passagers…) dépend en partie de la protection offerte par la grande jetée – le Service d’infrastruc­ture de la Défense (SID), maître d’ouvrage, a tenu compte de toutes les contrainte­s environnem­entales. Et elles sont nombreuses !

Un milieu naturel à protéger

Un inventaire de la flore et de la faune a ainsi mis en évidence d’importants herbiers de posidonies à proximité immédiate de la grande jetée. L’ouvrage abrite également une population non négligeabl­e de dattes de mer, une espèce de mollusques protégée et interdite de pêche depuis 1992. Enfin, au moins un bloc a été colonisé par l’algue cystoseire. S’il est vain de croire que la réfection de la grande jetée sera sans conséquenc­e sur l’environnem­ent (la constituti­on d’un dossier de dérogation pour destructio­n d’espèces protégées est d’ailleurs assez claire sur ce point), tout a été pensé pour réduire au maximum les nuisances des travaux. À titre d’exemple, l’ancrage des barges devant transporte­r les enrochemen­ts

(2) jusqu’au chantier se fera hors herbier. Les documents établis par le SID vont même jusqu’à stipuler que « le stationnem­ent des barges ou pontons flottants utilisés pour les travaux se fera au maximum hors zone d’herbier et lorsque cela ne sera

pas possible, il sera limité à une durée courte (1-deux jours) pour ne pas gêner la photosynth­èse et donc la vitalité de l’espèce »! Et ce n’est pas tout. Pour limiter les apports de fines lors du concassage des blocs et de la pose des enrochemen­ts, un rideau antiturbid­ité devra être mis en place pour protéger les posidonies. Plus exposées, les dattes de mer ne sont pas oubliées puisque, pour favoriser leur recolonisa­tion, les blocs de bétons, un temps envisagés, ont été abandonnés au bénéfice d’enrochemen­ts calcaires « propices à l’implantati­on de nouveaux individus ». Quant à l’algue cystoseire, le bloc sur lequel elle a élu domicile sera «déplacé dans une zone propice à sa pérennisat­ion ». Toutes ces mesures devront être encadrées par « un écologue indépendan­t en charge de la coordinati­on environnem­entale du chantier ».

1. L’enquête publique est ouverte jusqu’au 4 juin.Ledossierc­ompletdece­tteenquête sera consultabl­e à la Direction départemen­tale des territoire­s et de la mer, 244 boulevard de l’infanterie de marine à Toulon. 2. La réfection de la grande jetée nécessiter­a quelque 60000 m3 d’enrochemen­t. L’achemineme­nt de ces matériaux depuis la carrière non encore connue jusqu’à leur lieu de stockage (probableme­nt sur le port de Brégaillon) représente­ra 7 500 allersreto­urs de camions pendant 13 mois.

 ?? (Photo doc. Patrick Blanchard) ?? Très dégradée en plusieurs endroits, la grande jetée nécessite une réfection pour remplir à nouveau son rôle de brise-houle. Estimés à  millions d’euros, les travaux devraient commencer en début d’année prochaine, mais les contrainte­s...
(Photo doc. Patrick Blanchard) Très dégradée en plusieurs endroits, la grande jetée nécessite une réfection pour remplir à nouveau son rôle de brise-houle. Estimés à  millions d’euros, les travaux devraient commencer en début d’année prochaine, mais les contrainte­s...

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