LE BILLET de Patrice Maggio
Directeur des rédactions adjoint du groupe Nice-Matin
ACTE 1, SCÈNE DE MÉNAGE 1
Aaahhh, enfin ! Le tapis rouge est déroulé, les premières stars bien arrivées, le boulevard Carnot embouteillé, le mini-bar des suites des palaces rechargé, les attachés de presse surbookés, la météo barbouillée, les traiteurs bien traités, la coke stockée, le plein des limousines est fait, les yachts amarrés, les bourrelets rengainés, les petits bonnets rembourrés, les tarifs des hôtels et d’AirBnB doublés, triplés, quadriplés par rapport au reste de l’année, les fans aux aguets, sur leur mini-échelles dressés, les smokings tous loués. Cannes peut commencer, comme un beau rêve éveillé. Comme chaque année. Le scénario habituel ? Pas tout à fait, rembobinez. Harvey Weinstein ne montera pas les marches du Palais. Le seigneur graveleux du cinéma US est hors d’état de nuire. Les princesses de l’écran pourront avancer entre les haies des photographes, plus flashées que des Ferrari monégasques sur l’A8, sans son regard insistant sur le bas de leur si joli dos. À condition qu’elles renoncent à s’auto-photographier. Car les selfies, si, si, sont bannis cette année du tapis. L’autre grande nouveauté, c’est l’impossibilité pour la presse écrite de faire correctement son travail. Les organisateurs ont eu cette idée géniale : « Et si on supprimait less projections de travail
en amont des soirées officielles ? » Pour que les mauvais films ne soient pas trop tôt éreintés par la critique ? Officiellement, la justification est beaucoup plus tarabiscotée (on vous l’épargne, elle ne tient pas debout). Du coup, difficile de travailler en direct pour le journal du lendemain. Il va falloir ruser, il va falloir jongler. Pour vous livrer chaque jour 16 pages qui méritent la palme. Et une couverture du Festival triple épaisseur sur nos sites, nos applis et sur les réseaux sociaux.. Plus ciné, plus fiesta, plus glamour, que jamais. Générique !