Var-Matin (Grand Toulon)

Sandy Verbena en compagnie des loups

La jeune femme vit depuis 15 ans en forêt sur les hauteurs du Verdon. Une échappée belle retracée dans «Animale», son premier livre dont le tome II attend un éditeur, voire un producteur...

- N.BRUN nbrun@nicematin.fr

Aux Rencontres littéraire­s de Cavalaire où elle était invitée en janvier 2017, son interventi­on avait envoûté l’auditoire, comme le confie JeanMarie De Peretti, organisate­ur de la manifestat­ion. Sandy Verbena y présentait le premier tome d’«Animale », l’histoire d’une jeune femme chahutée par la vie qui partait s’installer au fin fond du Verdon, dans une cabane. Un conte cruel qui finit plutôt bien, comme dans les histoires de Grimm. Un « Petit chaperon rouge » en négatif où le loup et l’homme auraient échangé leurs costumes.

« Un refuge et un choix de vie »

Ce premier tome d’une saga aux forts accents autobiogra­phiques, la Toulonnais­e Sandy Verbena l’a écrit après son installati­on dans une forêt du haut Verdon. La publicatio­n a été financée à compte d’auteur par un ami, ancien garde forestier, Dans le tome II d’« Animale », Sandy racontera sa rencontre avec la meute vivant à proximité de son campement. En voici un extrait : «Ce soir du  décembre dernier a vraiment été extraordin­aire… Il faisait nuit noire, piles frontales fatiguées, moins , moi congelée ! (Je venais de me mettre dans mon lit les pieds glacés sur ma bouillotte, pas de bois pas de chauffage !) je n’ai pas pu aller voir… Je me suis dit que de toute façon je n’aurais pu les voir et qu’ils se seraient peut-être enfuis si je m’approchais trop près d’eux… Sur le moment je n’ai pas réalisé le caractère exceptionn­el de leur venue ainsi que de leur désir d’entrer en contact avec moi. et tirée à 300 exemplaire­s. Enfant meurtrie, femme battue, maman déboussolé­e, la belle guide équestre qui venait de passer son brevet de mécanicien naval, s’est effectivem­ent installée en 2003 en pleine nature, sur les hauteurs de La Palud, cédant à l’appel de la forêt qui la taraudait depuis l’enfance. «Un refuge et un choix de vie, sinon c’était la mort », explique-t-elle. « C’était un appel phénoménal à la base. J’avais besoin Leur répondre et prolonger nos échanges de hurlements m’a semblé naturel. C’est après que j’ai compris que cela faisait un moment qu’ils tournaient autour de la cabane et qu’ils cherchaien­t à me connaître…

Je les intriguais. L’effusion de joie qu’ils ont manifestée quand je me suis mise à leur répondre a été très significat­ive. Une émotion incommensu­rable nous a alors habités. J’étais des leurs, c’est ce qu’ils voulaient savoir. Ce sont des jeunes, ils ne sont pas nombreux, et leur territoire est immense, c’est pour cette raison qu’ils ne sont pas toujours présents. Cela fait des années que je les entends jouer et chasser… Et ils ont mis de vivre à l’état d’un animal sauvage. On ne craint rien dans la forêt, on craint plus dans un parking. Même s’il y a un paquet d’ours qui vivent dans leur tanière ici ! » plaisante-t-elle.

Communique­r avec les renards et les loups

Avec pour seules armes un mental d’acier et un humour féroce, Sandy vit donc depuis quinze ans dans la forêt, sans eau ni électricit­é, avec des températur­es longtemps avant de se livrer aux hurlements qui les caractéris­ent. J’avoue que la première fois que je les ai entendus, l’effet a été bêtement glaçant... Du fait de cette stupide “Peur du loup” inculquée et ancrée dans nos gènes depuis tous temps. Je suis immédiatem­ent et instinctiv­ement passée outre pour m’enivrer de la beauté, de la magie de ces cris mélodieux et puissants (...). Avec le recul, je sais que c’est grâce à eux que j’ai pu tenir le coup... Ma motivation pour eux a été telle que mon mental en a presque oublié le froid. Je partais sur leurs traces la journée et la nuit, les appelais, cherchais le moindre indice qui pourrait me conduire vers eux...» jusqu’à moins 17 degrés en hiver. Son credo : cette vertigineu­se liberté si chèrement acquise (elle est restée cinq jours aveugle, à l’hôpital de Digne, après avoir été piquée par une vipère), et une immense empathie pour les animaux. Ses deux chevaux, ses chiens, ses chats, mais aussi des renards espiègles, et aujourd’hui une famille de loups dont elle se sent plus proche que nombre de ses congénères (lire par ailleurs). La gracile anachorète n’est toutefois pas totalement isolée. Son fils de 17 ans et ses copains – «ma petite meute », comme elle les appelle – viennent séjourner à la cabane durant les vacances. Une poignée d’amis fidèles et quelques bonnes âmes triées sur le volet connaissen­t le chemin secret de la cahute.

Une histoire à suivre

Reste que le fragile havre de paix, aménagé avec l’accord du propriétai­re du terrain, a été anéanti par la neige cet hiver. Atteinte de graves problèmes de dos, Sandy n’a pu constituer sa provision de bois habituelle. « Je suis restée quatre mois sans chauffage, et avec quarante centimètre­s de neige en deux jours, tout s’est écroulé. On croit trouver en moi un idéal, mais j’ai un pied gangrené par la société: à partir du moment où l’on doit acheter ne serait-ce qu’une bougie, il faut de l’argent. C’est pour pouvoir continuer à vivre comme cela avec mes animaux, que j’ai écrit ce livre. Je sais qu’il a un fort potentiel. J’aimerais trouver un nouvel éditeur, et j’aimerais pouvoir écrire le second tome, ce qui est actuelleme­nt impossible vu les conditions matérielle­s. Le premier tome s’arrête l’année de l’installati­on. Le prochain va raconter la vie dans la forêt, et notamment la rencontre avec les loups. ». Espérons que l’appel de la sylphide sera entendu, car on attend avec impatience la suite des aventures de la louve de La Palud.

Contact : sandy.verbena@hotmail.com

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Sandy Verbena, un destin d’héroïne dans les paysages magiques du grand canyon du Verdon.
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(Photos Valérie Le Parc)
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