Iran: UE, Russie et Chine ripostent aux sanctions US
Les Européens ont annoncé hier leur première réplique concrète aux tentatives des États-Unis de Donald Trump d’isoler économiquement l’Iran, dans le sillage des pions avancés par les Russes et les Chinois pour maintenir leurs liens avec Téhéran. Le retrait américain de l’accord sur le programme nucléaire iranien, accompagné du retour des sanctions américaines, fait brusquement planer des risques financiers considérables sur les entreprises voulant investir en Iran.
Un outil imaginé pour Cuba
«Nous devons maintenant agir», a déclaré le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, à l’issue d’un sommet des dirigeants européens avec leurs homologues des Balkans à Sofia, éclipsé par le front uni que les Européens ont voulu afficher face à Washington. «C’est la raison pour laquelle nous lançons le processus de la loi de blocage, le “blocking status” de 1996, qui vise à neutraliser les effets extraterritoriaux des sanctions américaines.» Ce règlement européen datant de 1996, créé à l’origine pour contourner l’embargo sur Cuba et qu’il s’agit désormais d’adapter, permet aux entreprises et tribunaux européens de ne pas se soumettre à des sanctions prises par des pays tiers. Le désaccord avec les États-Unis sur l’embargo cubain avait toutefois été résolu au niveau politique, et l’efficacité de ce règlement n’a donc jamais été éprouvée. «Le cas iranien va probablement impliquer le renforcement de la Chine dans la région », s’inquiétait hier une source diplomatique à Sofia, illustrant les craintes de voir les Russes et les Chinois tirer avantage de la situation.
Total remplacé par le chinois CNPC ?
Face au retrait probable du français Total d’un projet de développement du vaste champ gazier iranien Pars Sud, l’Iran a ainsi aussitôt prévenu qu’il serait remplacé par le géant énergétique chinois CNPC, partenaire de Total dans ce contrat de 4,8 milliards de dollars. La Chine, assoiffée d’hydrocarbures et premier partenaire commercial de Téhéran, semble avoir l’intention de passer outre les sanctions américaines afin de muscler ses investissements en Iran. Au risque d’aggraver les relations avec Washington, déjà tendues depuis l’introduction de droits de douane par les USA sur l’acier et aluminium. La Russie, alliée de Téhéran qui avait maintenu des liens commerciaux lorsque les sanctions occidentales étaient en place, a de son côté fait un pas important pour rapprocher l’Iran de sa zone d’influence économique: l’Union économique eurasiatique, réunissant plusieurs ex-républiques soviétiques, a signé à Astana hier un accord préliminaire avec l’Iran. Réduisant d’ores et déjà les droits de douane sur certains produits pour trois ans, l’objectif est de créer à terme une zone de libre-échange.