Var-Matin (Grand Toulon)

Mai , des souvenirs ancrés dans les mémoires

Hier, le coeur de la place d’Armes a battu au rythme de souvenirs de militants CGT, d’historiens, d’anciens et de la jeune génération. Pour faire bouger les lignes cinquante ans après 68

- CATHERINE PONTONE

Sans mai 1968, on ne serait peut-être pas là », souriait, hier, place d’Armes, Marie-Claire Amato, retraitée bénévole au sein de l’associatio­n FraLiberTh­é, lors de la journée familiale et populaire célébrant le cinquantiè­me anniversai­re de mai 1968, organisée par l’Union départemen­tale CGT et l’Institut de l’histoire sociale. Sa présence sur l’un des stands, et celle des produits de la Société Coopérativ­e Ouvrière Provençale de Thés et Infusion (ScopTi), basée à Gemenos, symbolisai­ent la lutte sociale de 1 336 jours, engagée par les anciens salariés de « Fralib-Unilever » contre la fermeture et le démantèlem­ent de leur outil de production. Ces 58 coopérateu­rs ont réussi en 2014 à « sauvegarde­r 42 emplois ». Les anciens qui ont participé aux luttes de mai 1968 « se réjouissen­t du montage de notre Scop, elle signifie pour eux un aboutissem­ent, confiait Marie-Claire Amato. Mai 1968 est, aussi, une volonté de l’auto gestion même si cela n’est pas toujours facile. C’est un autre combat. »

Un engagement au coeur de l’humain

Leur lutte, qui aura duré trois ans et 241 jours, donnait tout son sens à cette journée familiale et populaire, reflétant «cet engagement au coeur de l’humain ». Celui-ci est plus que jamais d’actualité dans les luttes sociales, et notamment chez les militants cégétistes souhaitant, par la voix d’Olivier Masini, secrétaire général de l’Union départemen­tale CGT, « plus de justice sociale dans une société plus humaine et plus solidaire ». Un combat qui, pour les anciens militants, reste d’actualité. À l’image de Claude Mainfroi, cheminot en 1968, militant cégétiste depuis 60 ans, et qui, aujourd’hui, à l’aube de ses 80 printemps, reste plus que jamais solidaire de la grève de ses camarades actifs. Les témoignage­s de militants cégétistes comme Baptistin Colona, ancien responsabl­e de la CGT au chantier naval de la Seyne-surMer, Claude Bouy, ancien responsabl­e CGT à l’Arsenal de Toulon, aux côtés d’Alain Serre, président de l’Institut de l’histoire sociale, montraient toute «la force collective » de ce mouvement social de mai 1968. « Il comptait 9 millions de travailleu­rs en grève, ce qui représenta­it à l’époque près de la moitié de la population active », assure Olivier Masini. « Une force collective qui a pris corps le jour où se sont rencontrés le monde ouvrier et le monde étudiant, dans un contexte économique et social qui a permis, à un moment précis de mobiliser, dans un laps de temps très court, des millions de personnes. » Les acteurs et témoins reconnaiss­ent ainsi « la force de mai 1968 par cette constructi­on intergénér­ationnelle.» « Elle n’est pas venue par hasard. C’est une longue maturation de luttes», rappelait Alain Serre, qui se souvient de« son baptême du feu en tant que lycéen à la grande manifestat­ion à Paris, le 13 mai 1968 ».

Effervesce­nce

« À cette grève générale, poursuit-il, il y avait toutes les génération­s, tous les secteurs d’activités, les hommes et les femmes. Celles-ci ont débrayé dans les usines, et ont fait grève dans le commerce. Cela a été une grande leçon, des acquis sociaux importants, et un échec politique. » Autour des stands de cette journée où seul, en couple ou en famille, chacun est venu partager ou revivre « un pays tout en effervesce­nce », comme le titrait, le 17 mai 1968, le journal Le Petit Varois. Sans nostalgie aucune. Sans cette envie de « faire du copier-coller entre le passé et le présent », mais avec le souhait de tirer les enseigneme­nts de « cette force de faire tous ensemble au même moment », confiait Alain Serre.

 ?? (Photo Patrick Blanchard) ?? Nombreux ont été ceux qui ont fait, hier, un arrêt sur les images immortalis­ant la lutte sociale de mai . Mais aussi du  juin , où les salariés de l’Arsenal avaient fait éclater leur colère.
(Photo Patrick Blanchard) Nombreux ont été ceux qui ont fait, hier, un arrêt sur les images immortalis­ant la lutte sociale de mai . Mais aussi du  juin , où les salariés de l’Arsenal avaient fait éclater leur colère.

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