Crise politique autour des migrants en Allemagne
La coalition gouvernementale d’Angela Merkel en Allemagne menace d’être emportée par un conflit autour des migrants, après que sa composante la plus à droite a jugé hier insuffisantes les propositions de la chancelière pour réduire le nombre des demandeurs d’asile. Après plus de deux semaines de tensions entre la chancelière conservatrice et le parti bavarois CSU, à sa droite, le conflit devait, en principe, être tranché dans la soirée : un compromis, ou un possible éclatement de la fragile coalition mise sur pied en mars. En cause : les suites de la décision controversée d’Angela Merkel d’ouvrir les portes du pays en 2015 à des centaines de milliers de demandeurs d’asile. Membre de sa coalition gouvernementale, la CSU exige que les migrants arrivant à la frontière allemande mais déjà enregistrés dans un autre pays de l’UE – ce qui est le cas de la grande majorité d’entre eux – soient désormais refoulés. Il a fixé un ultimatum à début juillet. Angela Merkel refuse, de crainte d’un « effet domino » dans toute l’Europe. Elle pensait pouvoir amadouer ce parti rebelle grâce aux mesures prises lors du dernier sommet européen pour réduire les flux migratoires vers l’Europe et au sein de l’UE. Mais son ministre de l’Intérieur Horst Seehofer, qui est aussi président de la CSU, les a rejetées, lors d’une réunion à huis clos du parti. A cette occasion, il a reproché Angela Merkel d’être restée inflexible lors d’un entretien qu’il a eu samedi soir avec elle à Berlin.
Possible départ de Merkel ?
Angela Merkel a jugé elle hier que les mesures européennes, avec notamment une plus grande surveillance des frontières extérieures de l’UE mais aussi une meilleure coopération pour empêcher les demandeurs d’asile de se déplacer d’un pays à un autre, étaient «équivalentes» aux exigences de son ministre. M. Seehofer a aussi rejeté hier une proposition de compromis au niveau national avancée samedi par la chancelière. Plutôt que de refouler à la frontière les migrants déjà enregistrés ailleurs, elle a suggéré de les installer dans des sortes de centres de rétention, appelés «centres d’ancrage», jusqu’à ce que leurs dossiers aient été examinés. Reste à présent à savoir ce que vont faire concrètement le ministre de l’Intérieur et son parti. Plusieurs scénarios sont possibles. M. Seehofer, dont les relations avec Angela Merkel sont exécrables, pourrait démissionner. Ou bien il pourrait décidé de passer outre la chancelière en imposant de son propre chef la semaine prochaine les refoulements de migrants aux frontières. On voit mal dans cette hypothèse que Mme Merkel puisse le conserver au gouvernement. Dans tous les cas de figure, l’avenir du gouvernement tout entier serait menacé et l’Allemagne s’enfoncerait dans une nouvelle grave crise politique après celle déjà provoquée par la percée en septembre 2017 de l’extrême droite lors des élections législatives. Dans cette hypothèse, le départ d’Angela Merkel et la convocation d’élections anticipées font partie des options évoquées dans les médias comme issues possibles.