Ce que le faux prêtre arrêté à Toulon a dit au tribunal
Edmond Romano a été condamné hier à deux ans de prison. Poursuivi pour « filouterie » et « escroquerie », le sexagénaire a justifié son parcours de délinquant par la mort de son fils
Crâne dégarni, cheveux grisonnant et portant la moustache, le faux prêtre Edmond Romano était jugé hier à Toulon pour « escroquerie » et « filouterie ». Le sexagénaire avait été interpellé dans la nuit du 24 au 25 mai alors qu’il avait obtenu le gîte et le couvert à la paroisse Saint-Georges à Toulon. « Vous ne méritez pas ce que je vous ai fait », s’est excusé Edmond Romano à la barre du tribunal, en se tournant vers le père Samuel, vicaire de la paroisse embobinée. Se disant victime d’une agression, le faux prêtre avait obtenu un don de 360 euros après une collecte (dont 300 euros versés par un seul paroissien).
Un élément déclencheur
« Oui, j’ai vraiment été agressé à Marseille où je me suis rendu pour régler un problème [de caveau familial] au cimetière, a répondu le prévenu interrogé par la présidente, Virginie Santoro. Non, je n’ai pas porté plainte parce que je me doutais que j’étais recherché pour les filouteries d’hôtels.» Le tribunal est revenu sur le parcours de cet homme qui aligne une vingtaine de condamnations entre 1984 et 2015 – dont une à Draguignan en 2002. « Il y a un élément déclencheur, c’est la mort de mon fils », s’est justifié le prévenu, divorcé, qui n’a plus de contact avec ses deux filles, âgées de 28 et 32 ans. Dénonçant « un mode de vie » susceptible de « représenter un trouble à l’ordre public », le ministère public avait requis une peine de dix-huit mois de prison. Doté d’une solide culture ecclésiastique, Edmond Romano s’est fait passer pour un prêtre à plusieurs reprises depuis 1998. « J’ai un rapport spécial à la religion, je suis très croyant», a-t-il déclaré. Ce natif de Marseille a même concélébré des messes et recueilli les confessions de fidèles, notamment à La Castille, où il a porté la soutane lors d’un forum catholique en juillet 2017. « Les gens se livrent, peuvent donner des informations importantes, a témoigné le père Samuel. J’ai porté plainte pour que cela s’arrête, pour que M. Romano prenne conscience des conséquences et qu’il redémarre dans la vie. Il ferait un très bon acteur.» Et le faux curé de préciser : « Je n’ai jamais révélé ce que j’ai entendu en confession. » Mais pourquoi recueillir tous ces secrets ? « Si j’avais la réponse…», a-t-il soufflé.
«Je n’ai rien contre l’Église »
Et les larcins, sont-ils compatibles avec les préceptes de la religion ? « Je ne parle pas de religion, je parle de foi.» Me Anne-Claire Burot, avocate du père Samuel, lui a demandé s’il aimait l’Église. « Je n’ai rien contre l’Église.» Edmond Romano s’était rendu à Toulon en mai après avoir passé plusieurs nuits dans des hôtels, en pension complète, sans régler les factures de ces séjours. « C’est un marginal, il dort dans sa voiture », a précisé son avocat. Si les faits de filouterie dans les hôtels ne sont pas contestés, Me Richard Gianelli a plaidé sans succès la relaxe pour l’escroquerie. « Le père Samuel lui a remis de l’argent parce qu’il était face à un homme à la dérive, c’est le devoir de conscience d’un homme d’Église (...) Il n’y a pas de lien de causalité entre cette remise et l’usage de fausse qualité.» Edmond Romano dispose d’un délai de dix jours pour faire appel de sa condamnation.