Var-Matin (Grand Toulon)

Griezmann, le ‘‘Charrua’’

L’attaquant tricolore est profondéme­nt attaché au pays qu’affrontent les Bleus, demain, en quart de finale de la Coupe du monde

- VINCENT MENICHINI, À ISTRA

Le coeur d’Antoine Griezmann va battre très fort, demain, au moment d’entrer sur la pelouse du stade de Nijni Novgorod, une merveille capable d’accueillir près de 45 000 spectateur­s. Pour cause, l’attaquant des Bleus est devenu, au fil de sa carrière, un vrai ‘‘Charrua’’, un Uruguayen de coeur, si vous préférez. Tout a commencé à la Real Sociedad de San Sebastian pour le petit ‘‘Grizou’’, snobé par les centres de formations en France en raison de sa taille. Au Pays Basque, sa technique et son talent n’échappent pas à l’entraîneur de l’équipe première, un certain Martin Lasarte qui l’intègre rapidement à ses séances. « El Mister » vient d’Uruguay, ce pays de 3,5 millions d’habitants, coincé entre le Brésil et l’Argentine, où l’on cultive la « garra », l’esprit guerrier qui symbolise à la perfection cette équipe de La Celeste et sa star Edinson Cavani, de plus en plus proche d’un forfait contre la France... A l’époque, Carlos Bueno, ancien attaquant du PSG (2005-2007), où il n’a jamais brillé, évolue également à la Sociedad. Il prend « El pequeño » sous son aile. Celui qui deviendra le mentor de Griezmann se souvient. « On a fait remonter le club de la Real en première division, et dès le début de saison, nous avons commencé à partager beaucoup de choses : nous mangions ensemble, parfois il dormait à la maison, je l’amenais à l’entraîneme­nt… Je l’aimais bien parce qu’il était tout le temps heureux, aimable. D’ailleurs, le vestiaire dans sa globalité l’adorait. » Le natif de Mâcon s’imprègne de cette nouvelle culture qu’il dit « adorer ». Au contact de Bueno, l’attaquant de l’Atlético Madrid change sa mentalité. Cultive sa rage de vaincre. Accepte mieux les souffrance­s liées à l’effort. Peaufine son jeu de tête. Apprend à canaliser son énergie.

Fan de Penarol

Une mue qui sera accompagné­e quelques années plus tard par l’Argentin Diego Simeone, qui en en fera l’un des meilleurs attaquants du monde. A la Sociedad, où les joueurs uruguayens forment une forte colonie, il devient également supporter de Penarol, l’un des plus grands clubs sud-américains, basé à Montevideo, finaliste de la Copa Libertador­es en 2011, l’équivalent de la Ligue des champions chez nous. « Je suis un fanatique de cette équipe (il y a également joué pendant dix ans, ndlr), confie Bueno. On regardait les matchs ensemble et il est devenu un vrai hincha (supporter). Je lui ai offert un maillot, je lui ai appris les chants des supporters… Il ressemblai­t à un enfant : il chantait, il criait à chaque but de Peñarol comme s’il était au stade ! »

Diego Godin est le parrain de sa fille

C’est à cette époque, entre 2009 et 2010, que Griezmann fait également connaissan­ce avec le maté, cette boisson très répandue en Amérique du Sud à base d’herbe à la forte amertume, dopée en caféine, qu’il boit désormais avant chaque entraîneme­nt et chaque match. « Quand il me voyait à l’entraîneme­nt avec mon maté, il me demandait : « Mais c’est quoi ça ? » Je lui répondais : « C’est du maté, tu n’aimeras pas, c’est trop amer et trop fort pour toi. (…) Si tu le recraches dans ma voiture, tu descends tout de suite ! » Donc il le prend en bouche et me regarde, je lui répète que s’il le recrache, je le vire de ma voiture. Et là il me dit : « Mais c’est quoi ce truc, c’est pas bon ! » Voilà sa première expérience avec le maté. Il a fini son verre petit à petit et il est devenu fan. On peut dire qu’il est Franco-uruguayen aujourd’hui. » A tel point qu’à son arrivée à l’Atlético Madrid, il se lie immédiatem­ent d’amitié avec le défenseur Diego Godin, qui deviendra le parrain de sa fille et avec qui il partage tout son temps libre dans la capitale espagnole entre « asado » (barbecue) et musique latino. Demain, il devra avoir la force de mettre ses sentiments de côté et se jouer de son capitaine en club. Pas une mince affaire... «Ce sera un match très spécial, pense Carlos Bueno. D’ailleurs, les gens d’ici l’adorent, s’il marque ; ça sera un moment difficile pour lui. »

 ?? (Photos AFP/DR) ?? Grizou en Bleu. Avec le parrain de sa fille, Diego Godin de l’Atlético Madrid (ci-dessus à droite) et sous le maillot de l’Uruguay, avec Godin et Gimenez (Atlético) !
(Photos AFP/DR) Grizou en Bleu. Avec le parrain de sa fille, Diego Godin de l’Atlético Madrid (ci-dessus à droite) et sous le maillot de l’Uruguay, avec Godin et Gimenez (Atlético) !

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