Le principe de «fraternité» inscrit dans le droit
Questionné sur l’aide aux migrants, le Conseil constitutionnel a affirmé qu’une aide désintéressée au « séjour irrégulier » des étrangers ne saurait être passible de poursuites
De devise, la « fraternité » passe à principe du droit français. Dans un climat européen tendu sur la question des migrants – notamment sur la question de leur prise en charge –, le Conseil constitutionnel a affirmé, hier, qu’une aide désintéressée au « séjour ir régulier » des étrangers ne saurait être passible de poursuites. Et ce, au nom du principe de «fraternité ». Une victoire très importante pour les associations et particuliers qui avaient posé cette question de constitutionnalité. Parmi eux, Cédric Herrou, l’agriculteur de Breil-sur-Roya. Me Patrick Spinosi, l’un des avocats des requérants, a salué une « immense victoire », qui a pour conséquence « d’interdire de poursuivre en justice des actes purement humanitaires à l’égard des migrants ».
«Mon combat légitimé »
Cédric Herrou a salué cette décision, estimant son combat « légitimé ». « La décision vient dire que le pays n’appartient pas aux nationalistes, à la droite extrême. La France ce n’est pas un pays fermé sur lui-même, égocentré. La France c’est Liberté, Egalité, Fraternité, les droits de l’homme, les droits de l’enfant. » Et l’agriculteur d’insister : «Quand vous avez un humain en difficulté en bas de chez vous, vous l’aidez, c’est tout. C’est ça la fraternité ». Mireille Damiano, avocate de « Roya citoyenne », a qualifié cette décision de « fabuleuse ». « Le Conseil constitutionnel indique qu’il revient au Parlement de prendre les décisions nécessaires pour qu’il y ait adéquation entre la reconnaissance de ce principe et l’ordre public. » Exultant, Martine Landry, humanitaire de Amnesty international, qui attend le résultat de son procès, le 13 juillet à Nice, a salué un « retour aux valeurs de la République ». Pour le président du Conseil, Laurent Fabius, « la fraternité devra être respectée comme principe constitutionnel par le législateur et elle pourra être invoquée devant les juridictions ». Eric Ciotti (LR), pour sa part, a trouvé cette décision « laxiste » et « étonnante ». Elle affaiblit selon lui « encore un peu plus l’autorité nécessaire de l’Etat et renforce le pouvoir d’associations pseudo-humanitaires qui profitent de leur exposition médiatique pour faire pression sur l’État ». Le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, a salué la décision, tout en estimant qu’il serait disproportionné d’étendre les exemptions existantes «à l’entrée irrégulière sur le territoire français». Ce qui n’est pas prévu, le Conseil constitutionnel ayant maintenu les sanctions dans ce cas.