Var-Matin (Grand Toulon)

Le livre du jour

- THIERRY PRUDHON

Marlène Schiappa a la plume incontinen­te. « Graphomane », ditelle, elle se sent obligée d’écrire. Pour prouver sa légitimité, reconnaît-elle. Après Lettres à mon utérus ou Le Dictionnai­re déjanté de la maternité, parmi une quinzaine de livres publiés depuis , la secrétaire d’Etat à l’Egalité entre les femmes et les hommes sort Si souvent éloignée de vous, lettres à mes filles. Tout commence – mal – par l’aveu qu’elle chipe le shampooing de ses deux gamines, «objet transition­nel» qui lui permet de les emporter avec elle et de les « respirer » toute la journée, alors qu’elle ne rentrera souvent que lorsqu’elles seront couchées. Cela se poursuit par ses appels angoissés et répétés à SOS Médecins, lesquels concluent que sa fille aînée est simplement… en train de s’endormir, puis les débats familiaux pour décider si les vacances estivales se passeront en Corse ou à Marseille. Le récit a le mérite d’être enlevé, enjoué, léger. Très léger, même. Celle qui a créé le réseau Maman travaille n’oublie cependant jamais de se replacer sur le terrain du combat et d’y initier ses « bébés » : contre les violences conjugales et le harcèlemen­t, pour l’égalité salariale et la laïcité. Des credo qui vont chez elle (et son mari) jusqu’à sommer son aînée de refuser le cadeau d’un garçon ! Les jours fastes où elle rentre plus tôt à la maison, elle lit à ses filles Histoires du soir pour filles rebelles, cent destins de femmes extraordin­aires. Militante, jusqu’en pyjama ! Marlène Schiappa ne mégote pas son admiration à ce « Président incroyable » qui a aussi « une femme formidable », sans oublier de s’envoyer quelques fleurs à elle-même, « qui a passé l’essentiel de sa vie à écrire des livres, organiser ou animer des conférence­s, donner bénévoleme­nt de cours à l’ENA, plaider pour les mères qui travaillen­t ». Sirupeux à souhait. Un livre familial pour les enfants. Ses enfants. Celui d’une mère bulldozer qui s’efforce, sans y parvenir vraiment, « de dîner à la maison trois fois par semaine », quitte à retourner ensuite au ministère jusqu’à une heure du matin. Une mère déjà mélancoliq­ue de l’enfance de ses filles qui lui a filé « comme de l’eau entre les doigts ». Le lot de tous les parents, si ça peut la consoler.

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